La Société des alcools du Québec ne veut vraiment pas que les citoyens jettent un coup d'oeil sur les allocations de dépenses de ses hauts dirigeants.

La Société des alcools du Québec ne veut vraiment pas que les citoyens jettent un coup d'oeil sur les allocations de dépenses de ses hauts dirigeants.

La SAQ vient d'en appeler d'une décision de la Commission d'accès à l'information qui lui ordonnait de fournir à La Presse Affaires les comptes de dépenses des membres de la haute direction au sujet de déplacements à l'intérieur et à l'extérieur du Québec.

La SAQ entend notamment faire valoir qu'il s'agit là de renseignements personnels et que la demande de La Presse Affaires est abusive.

«L'appelante entend démontrer qu'une demande qui vise plus de 40 000 documents, qu'il faut prendre un à un pour en élaguer des renseignements, est manifestement et objectivement abusive et est contraire à l'objet même de la Loi», fait valoir la SAQ dans son inscription en appel à la Cour du Québec.

L'initiative de la Société des alcools ne surprend pas Yvon Duplessis, professeur à la section de droit civil de la faculté de droit de l'Université d'Ottawa et co-auteur d'un livre sur l'accès à l'information.

«Que ces gens-là se battent, ce ne sont pas les premiers et il y en aura toujours, déclare-t-il au cours d'une entrevue téléphonique. Il y a une culture du secret qui existe toujours.»

Selon lui, les dirigeants des organismes publics doivent réaliser qu'ils font face à des exigences différentes de celles qui s'appliquent aux dirigeants d'entreprises privées.

«Ils ne comprennent pas que s'ils vont au restaurant, c'est au moyen des fonds publics et que cette information devrait être connue».

M. Duplessis ajoute que la démarche de la SAQ n'est pas surprenante parce qu'à l'heure actuelle, il existe deux jugements contradictoires de la Cour du Québec sur la question de l'accès aux comptes de dépenses. L'un accorde cet accès, l'autre non.

«J'ai l'impression que la SAQ veut faire clarifier cette question et en arriver à une décision qui tiendra la route», affirme-t-il.

Il estime cependant que la jurisprudence tend à favoriser l'accès aux comptes de dépenses. Il croit ainsi que le jugement de la Commission d'accès à l'information sur la requête de La Presse Affaires «n'est pas tout à fait dans la tangente majoritaire» parce qu'elle permet à la SAQ de masquer certaines informations, comme le nom et l'adresse des établissements où les dépenses ont été encourues.

«Je pense qu'en vertu de la jurisprudence majoritaire, le nom et l'adresse des établissements où les dépenses sont encourues sont publics», déclare-t-il.

Il s'agit de renseignements précieux: le fait de se faire payer un repas au Continental plutôt qu'au McDonald a son importance.

«Quand je paye pour, je devrais savoir où les gens vont manger», lance M. Duplessis.

Il estime qu'en allant en appel, la SAQ prend un risque et pourrait essuyer un recul en perdant la permission de masquer certaines informations.