Ce n'est pas qu'il y avait de la mauvaise volonté. Il n'y en avait simplement aucune.

Ce n'est pas qu'il y avait de la mauvaise volonté. Il n'y en avait simplement aucune.

«J'ai toujours joué le rôle de l'autruche et de la cigale», raconte Sophie. Les finances personnelles - ses finances personnelles - ne l'intéressaient aucunement. Celles-ci le lui rendaient bien.

Sophie est âgé de 43 ans et son conjoint Sylvain a 47 ans. Elle travaille dans un organisme à raison de 56 heures par semaine, réparties en quatre jours.

Sylvain est pigiste. Ses revenus, variables, montrent un écart de 15 000$ entre 2005 et 2006. Ensemble, ils ont dégagé l'an dernier un revenu net d'environ 72 000$.

Ils ont un enfant de 5 ans qui ira en maternelle en septembre.

Sylvain a amassé quelque 60 000$ dans son REER. Celui de Sophie ne contient que 8000$. Elle vient tout juste de contracter un prêt REER de 10 000$. Elle a retiré 20 000$ de son REER en vertu du Régime d'accession à la propriété en 1996, et une autre somme de 10 000$ dans le cadre du régime d'éducation permanente en 2002.

Outre un solde hypothécaire de 75 000$ sur son cottage montréalais, le couple a une dette sur marge de crédit de 19 000$ et un solde de 4000$ sur la carte de crédit de Sylvain. Le compte bancaire de Sophie montre un déficit de 600$.

«Nous avons été sondés par une filiale d'une société financière américaine pour nous remettre sur le droit chemin de la retraite, car il semble que nous ne soyons pas sur la bonne voie, indique Sophie. Notre banque nous dit qu'on va se faire avoir. Je vous jure qu'on n'en dort plus.»

Devraient-ils consolider la marge de crédit avec l'hypothèque? En accélérer le remboursement?

«On ne sait vraiment pas quoi faire...»

Ils ont tout de même agi. Peu de temps après que son problème eut été soumis à notre planificatrice financière, le couple a accepté la suggestion de refinancement hypothécaire que lui avait présentée son institution financière.

Dans ce contexte, Hélène Bronsard, vice-présidente chez Raymond Chabot Gestion Privée, recommande que le couple prenne des mesures pour compenser les incertitudes et fluctuations de ses revenus.

«Nous suggérons pour l'instant de ne pas accélérer le remboursement hypothécaire au-delà de l'engagement actuel, mais plutôt de bâtir un fonds de réserve pour éviter de devoir recourir à l'emprunt», explique-t-elle.

Ce fonds de réserve devrait équivaloir à trois à six mois de dépenses.

Le couple devra également établir un budget équilibré en fonction des revenus minimaux qu'il a touchés ces dernières années. Ces seuils seraient fixés à environ 70 000$ pour Sylvain et 30 000$ pour Sophie. Tout supplément serait versé à l'épargne.

Tous deux devront également réviser leur portefeuille d'assurances vie et invalidité.

«Comme ils n'aiment pas la gestion financière, ils devraient mettre en place une structure qui faciliterait le suivi des entrées et des dépenses», recommande également Hélène Bronsard.

Avec un seul relevé de carte de crédit pour les dépenses du couple et un relevé bancaire qui précise les paiements de factures effectués, cette corvée serait facilitée.

Sophie et Sylvain devraient également éviter les petites dépenses qui n'améliorent en rien la qualité de vie et grugent l'argent disponible - frais bancaires, intérêts sur les cartes de crédit...

Notre planificatrice souligne à ce propos l'importance de certains postes de dépenses. Ainsi, leurs primes d'assurances auto et habitation totalisent 3800$.

Les services de communication - téléphone, câblodistribution, internet, cellulaire - coûtent 2100$ par année. Dans un cas comme dans l'autre, une rationalisation et une comparaison avec la concurrence amèneraient sans doute quelques bienfaits.

Leur budget comptabilise 2300$ par année pour l'argent de poche des deux conjoints, en sus des autres dépenses portées au budget. Il serait souhaitable de mieux détailler ces frais.

Hélène Bronsard souligne par ailleurs les impôts fonciers considérables, qui correspondent à 4600$. "

«Le choix du quartier est une question de mode de vie et l'emplacement est un élément très important, fait-elle valoir. Cette dépense est mise en lumière ici surtout pour attirer l'attention et susciter l'évaluation du lien qu'ils ont avec leur quartier. Si ce lien est fondamental, il faut le conserver et faire des concessions sur d'autres postes budgétaires.»

En raison de son travail de pigiste irrégulier, Sylvain touche chaque année quelques prestations d'assurance emploi, qu'il rembourse ensuite en bonne partie dans sa déclaration de revenus.

«Ce remboursement pourrait être évité s'il prenait des REER», observe notre spécialiste. Si on suppose un taux marginal d'imposition de 42,4%, Sylvain économiserait 424$ pour chaque tranche de 1000$.

REP, RAP...

Une fois le budget bien en main, le couple devra-t-il privilégier ses contributions au REER ou le remboursement de ses REP et RAP?

Hélène Bronsard favorise cette dernière voie. Si le remboursement minimal n'est pas fait, la somme qui aurait dû être versée est ajoutée au revenu annuel et imposée en conséquence.

La planificatrice donne l'exemple d'un remboursement de 1333$, correspondant à un retrait de 20 000$. Pour un revenu de 75 000$, le manquement au remboursement minimal entraînerait un coût de 579$ en impôt additionnel.

Cette sanction diminue avec le revenu: elle ne serait plus que de 213$ pour un revenu imposable de 25 000$. "

«Dans certains contextes, si on ne possède pas les liquidités nécessaires, il peut s'avérer moins coûteux et moins dommageable pour l'équilibre budgétaire de ne pas rembourser le RAP que d'emprunter pour le faire», indique Mme Bronsard. Le cas échéant, Sophie devra peser cette possibilité, avise-t-elle.

Néanmoins, c'est sur le contrôle des dépenses que va se jouer leur future retraite... et leur sérénité actuelle.

«Nous suggérons un cours sur la gestion budgétaire donné par un ACEF, insiste Hélène Bronsard. Ce 70$ est un excellent investissement pour les couples qui veulent maximiser leur environnement financier et comprendre comment agir sur celui-ci.»

LA QUESTION

«L'argent ne coule pas à flot, on ne profite pas de la vie tant que ça, si on compare aux années précédentes» Sophie

LE PROBLÈME

Sophie et Sylvain ont perdu le contrôle en fait, n'ont jamais eu le contrôle de leurs dépenses. Leurs dettes sont élevées, et leurs épargnes de retraite, basses. Comment reprendre les choses en main?

LES FAITS

Sophie, 43 ans

REER: 8000$

RAP: 20 000$

REP: 10 000$

Sylvain, 47 ans

REER: 60 000$

Revenu familial net: 72 000$

Hypothèque: 76 000$

Marge de crédit: 19 400$

Solde de carte de crédit: 3900$

LA SUGGESTION

Sophie et Sylvain viennent de liquider la marge de crédit en renégociant leur hypothèque mais ils doivent encore instaurer une série de mesures de contrôle budgétaire qui leur permettront de dégager des économies.

«Le problème principal, c'est qu'ils n'ont pas de fonds d'urgence, alors que leurs revenus varient beaucoup d'une année à l'autre. À la pige, on est plus vulnérable.»