Pour la première fois depuis 1984, la Saskatchewan sert de terre d'accueil à plus de Canadiens qu'elle en perd au profit des autres provinces. Le Québec n'a pas cette chance avec son solde migratoire.

Pour la première fois depuis 1984, la Saskatchewan sert de terre d'accueil à plus de Canadiens qu'elle en perd au profit des autres provinces. Le Québec n'a pas cette chance avec son solde migratoire.

Depuis un an, la province aux cieux infinis connaît une formidable croissance de l'emploi grâce à ses ressources gazières, minérales (potasse, uranium) et la poussée des prix des céréales, soulignait Michael Gregory, économiste principal chez BMO Marchés des capitaux.

Cela entraîne aussi une flambée des prix sur le marché de l'habitation. Saskatoon rivalise désormais avec Calgary et Edmonton pour l'inflation sur le prix des maisons.

Les trois provinces les plus à l'ouest du pays enregistrent un solde migratoire interprovincial positif, au détriment des sept autres.

«Rien qu'en 2006, un peu plus de 70 000 migrants se sont dirigés vers l'Alberta et la Colombie-Britannique», note pour sa part Yanick Desnoyers, de la Financière Banque Nationale.

Bien sûr, la part du lion revient à l'Alberta, province des scheiks aux yeux bleus. «Avec 120 000 migrants depuis 2005, poursuit-il, c'est comme si les États-Unis en avaient accueilli 1,2 million.»

Cela y a poussé la croissance de la population active de 4% -qui s'est assez facilement trouvé du travail. La province a créé plus de 85 000 emplois depuis un an et son taux de chômage stagne à... 3,8%.

«Même si les travailleurs canadiens vont continuer d'y affluer, ils viendront en moins grand nombre car le coût de la vie grimpe», prévient cependant M. Gregory.

Les économies du Québec et de l'Ontario souffrent des difficultés de leur secteur manufacturier, affligé par la force de notre monnaie, le ralentissement de la consommation des ménages américains et la concurrence des puissances émergentes d'Asie.

Beaucoup de leurs travailleurs tentent l'aventure de l'Ouest. L'Ontario, province la plus populeuse et la plus touchée par la crise manufacturière à cause du poids de l'industrie automobile, subit la plus forte saignée. En deux ans, elle a vu partir 55 000 migrants. Le Québec suit avec une perte de plus de 21 000 personnes.

Jusqu'ici cependant, l'Ontario demeure le choix du plus grand nombre d'immigrants internationaux. L'an dernier, elle en a accueilli près de 110 000, contre un peu plus de 38 000 pour le Québec, deuxième terre d'accueil des étrangers, et la Colombie-Britannique avec environ 35 000.

À ce chapitre, l'Alberta fait piètre figure, avec tout juste plus de 15 000 immigrants.

Quand on cumule les deux types de nouveaux arrivants cependant, on constate que l'Ontario reste la grande gagnante en chiffres absolus, alors que le Québec glisse au quatrième rang.

Si on porte le solde migratoire net en rapport avec la population de la province, alors l'Alberta devient championne et le Québec s'enfonce davantage.

L'apport des immigrants étrangers et des autres provinces gonfle la population de 1,5% par année en Alberta, de 0,92% en Colombie-Britannique, de 0,76% en Ontario et de 0,42% seulement au Québec, calcule M. Desnoyers.

À elle seule, la natalité ne peut compenser cet écart, malgré le petit baby-boom observé au Québec depuis deux ans.

En revanche, son marché de l'emploi n'a jamais fait preuve d'autant de vitalité. Cela a de quoi encourager les gens à continuer de vivre dans la Belle province, où le coût de la vie est plus faible que dans l'Ouest.

La croissance économique reste faible à cause du lourd déficit commercial, mais moins que celle de l'Ontario. L'Institut de la Statistique du Québec nous apprenait hier que le PIB par industrie s'était accru d'un solide 0,3% en avril, soit tout autant qu'en mars. Au Canada dans son ensemble, il a fait du surplace en avril.

Mieux, les manufacturiers donnent des signes de convalescence malgré les difficultés des secteurs de la forêt, des vêtements et du textile. La fabrication a crû pour un troisième mois d'affilée en avril, mettant fin à une récession de plus d'un an.

En Ontario, le portrait est plus sombre. Pour la première fois de son histoire, le taux de chômage y est plus élevé que la moyenne canadienne. La croissance de l'emploi y sera plus faible qu'au Québec cette année et l'an prochain encore. Le taux de chômage continuera d'y progresser légèrement, prédisent les économistes de BMO Marchés des capitaux.

Cela dit, l'appel des Prairies sera encore entendu.