Depuis 10 ans, les prix des maisons dans le monde industrialisé ont évolué dans un sens: vers le haut. Or, la vitesse de cette envolée a été aussi spectaculaire qu'inquiétante.

Depuis 10 ans, les prix des maisons dans le monde industrialisé ont évolué dans un sens: vers le haut. Or, la vitesse de cette envolée a été aussi spectaculaire qu'inquiétante.

On a beaucoup parlé de la bulle immobilière aux États-Unis et dans certaines villes canadiennes. Mais ce phénomène existe aussi de l'autre côté de l'Atlantique.

En Espagne et en France, la valeur moyenne des maisons a plus que doublé depuis 1996. En Angleterre, durant ce temps, les prix des logements ont triplé et ils ont quadruplé en Irlande.

La frénésie immobilière s'est même emparée de l'Europe de l'Est. En Lituanie et en Slovénie, acheter un logis coûtera 20% plus cher dans un an, selon des courtiers. À Moscou, c'est la "folie", disait un économiste américain récemment...

Si bien que des millions de jeunes en Occident ne voient pas le jour où ils pourront acheter une maison.

Imaginez habiter à Londres, où le prix moyen d'un logement a bondi de 18% depuis un an pour atteindre 345 000 livres, soit 760 000 $CAN. Dans le chic quartier Chelsea, on vient de franchir la barre du million de livres (2,2 millions) pour un "flat" moyen, selon Rightmove Plc.

Vers une crise?

Heureusement, des sonnettes d'alarme retentissent un peu partout, même dans les riches milieux financiers de la City, à Londres. Car les experts savent que la bulle immobilière ne peut grossir éternellement.

Le courtier Morgan Stanley UK prévient qu'un "repli substantiel" des prix de l'immobilier au Royaume-Uni est "probable dans un proche avenir". Pour sa part, PricewaterhouseCoopers évalue à "un sur trois" les risques d'une baisse du marché d'ici 2010.

Certes, on s'inquiète pour les ménages anglais qui, comme beaucoup d'Américains, ont hypothéqué la plus-value de leur maison pour acheter des voitures et des biens courants. Mais on redoute surtout les effets d'une crise immobilière sur l'économie et sur le système financier.

Car les banques ont grandement alimenté la frénésie immobilière en offrant du crédit quasi illimité à leurs clients.

Il est maintenant fréquent pour un Britannique d'obtenir une hypothèque équivalant à cinq fois son revenu, alors que le seuil de tolérance des banques était jadis de trois fois.

À l'instar d'une pratique américaine, un nombre croissant d'emprunteurs ne remboursent que les intérêts de leur hypothèque pendant quelques années. Si bien que la proportion de ces prêts à risque, dans le portefeuille hypothécaire des banques, est passée de 6 à 16% depuis trois ans, selon la BBC.

Et les lecteurs de La Presse Affaires ont appris récemment que les banques britanniques viennent de concocter un nouveau produit hypothécaire. Une petite merveille qui permet de rembourser un prêt pendant un maximum de 57 ans afin de réduire ses paiements. Bref, emprunter est un jeu d'enfant. Toutefois, des fissures apparaissent dans le château immobilier britannique. Au dernier trimestre, les huissiers ont saisi 24 000 résidences dont les propriétaires étaient incapables de payer leurs dettes. C'est un sommet depuis 1993.

De plus, les faillites personnelles ont atteint un record depuis qu'on a commencé à compiler des statistiques en 1960.

Aussi le Financial Services Autority, le gardien du secteur financier au Royaume-Uni, vient de servir cet avertissement: avec les taux d'intérêt qui grimpent, les banques doivent prévoir des mesures pour survivre à une chute des prix immobiliers. Pas très rassurant.

Dans le "Nouveau Monde", entre-temps, on se croise les doigts. Au Canada, les experts écartent les risques d'un krach immobilier car le marché revient graduellement à la normale. Tant mieux.

Par contre aux États-Unis, on regarde nerveusement les prix des maisons baisser depuis l'été dans plusieurs villes. On craint que la bulle immobilière se dégonfle trop rapidement et provoque une récession. Là, ça devient plus inquiétant.

Dans beaucoup de pays, en somme, posséder un toit coûte cher. Beaucoup trop cher, aux yeux de plusieurs. On réalise, enfin, les dangers d'habiter dans une bulle.