Ça n'a duré qu'un court instant. L'atteinte d'un nouveau sommet du prix du brut aura suffi à propulser le huard bien au-dessus des 94 cents américains mercredi malgré les déboires du marché boursier canadien.

Ça n'a duré qu'un court instant. L'atteinte d'un nouveau sommet du prix du brut aura suffi à propulser le huard bien au-dessus des 94 cents américains mercredi malgré les déboires du marché boursier canadien.

En baisse en début de séance, le prix du baril de pétrole a bondi à 78,77$ américains dans les minutes qui ont suivi l'annonce d'un fort repli des stocks de brut aux États-Unis.

Sous l'effet du choc, le dollar canadien s'est apprécié contre chacune des 16 autres grandes monnaies négociées par les cambistes, y compris le yen et le billet vert.

Chose étonnante, il a gagné du terrain toute la journée pour finir à 94,56 cents US, même si le prix du brut cotait en clôture 76,53$US, en baisse de 1,68$ sur mardi et même si la Bourse de Toronto a essuyé des pertes beaucoup plus lourdes que ses cousines new-yorkaises.

«On paraissait immunisé face à ce qui se passe dans le mouvement global», avançait Hughes Lajeunesse, vice-président principal change étranger chez BNP Paribas.

«On a eu une autre annonce de fusion-acquisition (celle de Marathon qui achète Western Oil) venue soutenir notre devise, expliquait pour sa part François Barrière, vice-président développement marchés des changes à la Banque Laurentienne. La recherche d'actifs ayant de la vraie valeur favorise le Canada.»

Cela dit, il ne serait pas surpris si le huard se repliait au cours des prochains jours pour mieux rebondir à l'automne.

C'est aussi l'avis de Stéfane Marion, économiste en chef adjoint à la Financière Banque Nationale. «Les positions spéculatives vont le garder dans un canal de consolidation quelques semaines.»

C'est aussi la spéculation, celle des fonds de couverture en particulier, qui nourrit la poussée récente des cours du brut.

Les spéculateurs parient sur la diminution plus rapide que prévu des réserves américaines, sur la tension entre l'offre et la demande hors États-Unis et sur l'absence apparente de volonté de l'OPEP de rehausser sa production.

«Tout peut arriver, résume Earl Sweet, économiste en chef adjoint chez BMO Marchés des capitaux. L'OPEP ne souhaite pas un prix supérieur à 80$ le baril qui peut freiner la croissance, mais la saison des ouragans est à peine commencée.»

Hormis les États-Unis, les grands pays consommateurs ne disposent pas de réserves tandis que la demande croît et que l'offre s'assèche.

En plus des ennuis que connaissent le Nigeria ou le Venezuela, c'est aussi la mer du Nord qui s'épuise.

L'an dernier, la production norvégienne s'élevait à 2,8 millions de baril par jour (mbj), cette année, ce sera plutôt 2,15 mbj.

Malgré tout, les pétrolières canadiennes engrangeront des profits moins élevés que l'an dernier.

C'est l'hiver doux que nous avons connu qui en est la cause, explique le Conference Board du Canada. Il aura fait baisser de 18% à 14% leur marge de profit.

«À hauteur de 13 milliards, les bénéfices seront quand même élevés sur une base historique», affirme Louis Thériault, directeur du service des perspectives économiques industrielles de l'organisme de recherches basé à Ottawa. En 2006, ils s'étaient élevés à 16,7 milliards.

À ses yeux, la poussée récente des prix du brut est en partie annulée par celle du huard quand on examine le bilan des sociétés pétrolières canadiennes cette année. L'industrie est aux prises avec une pénurie de main-d'oeuvre qualifiée et d'équipement ce qui pousse ses coûts à la hausse.

À moins que les cours du brut ne s'emballent au point de provoquer un ralentissement économique mondial, les profits devraient rester stables l'an prochain et rebondir dès 2009, prédit-il.

À mesure que s'épuisent les réserves albertaines de brut léger et les ressources offshore de Terre-Neuve, la production de pétrole non conventionnel prend de l'importance. En 2011, elle devrait atteindre 2,6 mbj, soit 3% de la demande mondiale, croit le Board.