C'est essentiellement vers le secteur manufacturier que vont les investissements du budget Audet dans les affaires cette année: Québec invite cette industrie en difficulté à se moderniser, en lui faisant miroiter une exemption de la taxe honnie sur le capital.

C'est essentiellement vers le secteur manufacturier que vont les investissements du budget Audet dans les affaires cette année: Québec invite cette industrie en difficulté à se moderniser, en lui faisant miroiter une exemption de la taxe honnie sur le capital.

En effet, annonce le gouvernement, les entreprises manufacturières qui investissent dans leur équipement de fabrication et de transformation ne paieront plus de taxe sur le capital dès minuit mardi.

«La critique qui nous était faite, c'était que la taxe sur le capital était une nuisance aux gens qui voulaient investir », a expliqué le ministre Audet, admettant du même souffle que «l'investissement manufacturier traîne la patte au Québec».

Selon Québec, c'est la quasi-totalité des 20 000 compagnies du secteur qui seront ainsi exemptées de la taxe.

Mais selon Jean-Michel Laurin, porte-parole de Manufacturiers et exportateurs du Québec, des compagnies seront laissées pour compte parce qu'elles n'ont pas les moyens d'investir dans leur modernisation.

«On ne peut pas être insatisfaits, mais on aurait souhaité que la taxe disparaisse vraiment pour tout le monde, dit-il. Ça ne règlera pas tous les problèmes du secteur.»

D'autres experts approuvent la mesure mais déplorent qu'elle soit limitée aux manufactures.

«Le secteur manufacturier en a bien besoin, mais l'élimination complète, dès maintenant, de la taxe sur le capital pour tous les nouveaux investissements aurait été nettement plus bénéfique pour l'économie québécoise», déclare Diane Bellemare, économiste en chef du Conseil du patronat du Québec.

«Les manufacturiers vont en profiter à condition d'investir, renchérit l'économiste en chef de la Banque Nationale, Clément Gignac. Et c'est malheureux que la mesure soit limitée à ce secteur.»

Précisément, l'abolition passe par une majoration de 5 à 10% du crédit de taxe sur le capital des entreprises, crédit qui est par ailleurs prolongé jusqu'en 2012.

Deux autres réductions de la taxe sur le capital sont consenties en particulier à des secteurs vulnérables: le crédit de 15 % de cette taxe pour l'industrie de la première transformation du bois est prolongé jusqu'à la fin de 2012, et la déduction accordée aux sociétés agricoles ou de pêche bondit de 400 000 $ à 5 M$.

La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante donne une appréciation mitigée du budget.

«Pour les entreprises, c'est modeste, juge le vice-président de cette association pour le Québec, Richard Fahey. C'est un budget chirurgical , qui cible les secteurs en difficulté plutôt que d'adopter une approche généraliste.»

La Fédération demandait notamment une réduction de 8 à 5 % du fardeau fiscal des PME, soutenant que leur taux d'imposition actuel n'est pas compétitif face à celui de leurs homologues canadiennes.

Un mandat «moyen» pour les affaires

Le gouvernement, qui dresse un bilan de son soutien au monde des affaires à la veille du déclenchement de la campagne électorale, calcule avoir réduit le fardeau fiscal des entreprises de 825 M$ depuis le début de son mandat.

Les mesures des années précédentes incluaient la réduction du taux d'imposition des PME à 8 %, la réduction progressive de la taxe générale sur le capital à 0,29 % d'ici 2009, l'augmentation à 1 M$ du seuil d'imposition de cette taxe, ainsi que des allégements de l'imposition des dividendes.

Pour le fiscaliste Stéphane Leblanc, de la firme Ernst & Young, le soutien des libéraux aux entreprises sur quatre ans est aussi mitigé.

Il rappelle que si les PME ont eu droit à un allégement fiscal, le taux d'imposition des grosses compagnies est passé de 8,9 à 11 %.

«Les réductions à la taxe sur le capital, c'est quelque chose d'important, mais il faudrait en venir à éliminer complètement cette taxe contre-productive», juge-t-il par ailleurs.

«On peut dire que le gouvernement aura allégé davantage le fardeau des entreprises que des particuliers durant ce mandat», conclut de son côté Clément Gignac, parlant d'une performance «moyenne» pour le soutien aux affaires.

Richard Fahey parle d'une «livraison partielle» de la marchandise souhaitée par les PME pour l'ensemble du mandat libéral.