Un matin d'octobre à Londres, un financier du nom de James Cameron se penche sur une carte de la Chine dans ses bureaux près de la Tamise.

Un matin d'octobre à Londres, un financier du nom de James Cameron se penche sur une carte de la Chine dans ses bureaux près de la Tamise.

Une vingtaine d'étiquettes colorées sont éparpillées sur la carte, chacune indiquant un endroit où la compagnie de M. Cameron, Climate Change Capital, mise des dizaines de millions de dollars.

Mais M. Cameron n'investit pas dans des actions ou des obligations. Il investit dans le gaz carbonique, la principale cause du réchauffement planétaire.

En échange d'une réduction des émissions, en Chine, disons, M. Cameron peut vendre le droit d'émettre du gaz carbonique dans l'air européen. Cette semaine, le prix se situait à environ 17 euros (24$US) la tonne métrique.

Depuis qu'il a cofondé Climate Change Capital en 2003, M. Cameron et son partenaire d'affaires, Mark Woodall, ont fait de leur compagnie un joueur majeur sur le marché mondial des gaz à effet de serre, marché qui est en plein essor. Stimulé par le Protocole de Kyoto, un accord que M. Cameron a contribué à rédiger, ce secteur des produits dérivés croît comme jamais.

Un grand défi

Il se peut que le réchauffement planétaire soit le plus grand défi auquel les humains auront été confrontés. Mais pour M. Cameron, c'est l'occasion de réaliser des profits.

On ignore pour l'instant si cette quête des bénéfices pourra écarter les conséquences potentiellement catastrophiques du réchauffement.

Un choix autre que les transactions sur les crédits carbone serait de taxer les émissions, ce qui serait par conséquent plus coûteux pour les compagnies qui continuent de polluer.

Al Gore, qui a remporté le mois dernier le Prix Nobel de la Paix pour son travail sur les changements climatiques, favorise les transactions comme l'une des façons de réduire les émissions de gaz carbonique, dont la structure moléculaire a pour effet d'emprisonner la chaleur près de la surface de la terre.

Ces marchés permettent aux producteurs d'électricité, aux raffineries et aux usines d'acheter et de vendre le droit de polluer une fois que les autorités fixent un plafond aux niveaux d'émissions.

Les États-Unis accusent du retard au chapitre des transactions sur les crédits carbone parce que le président George W. Bush a rejeté le Protocole de Kyoto qui, dit-il, impose de strictes limites trop coûteuses pour les compagnies américaines.

Il en résulte que Londres est devenu la capitale mondiale des finances «carbone». Dans le cadre des dispositions de Kyoto, l'Union européenne a créé un marché unique des crédits carbone le 1er janvier 2005. Les transactions ont explosé.

Le marché a triplé

L'an dernier, le marché mondial du carbone a triplé à 30 milliards $ US, selon la Banque mondiale.

Les investisseurs ont fourni environ 12 milliards $ US aux fonds consacrés à l'environnement, précise New Carbon Finance, une firme d'analyse de Londres.

D'ici 2020, le marché mondial du carbone pourrait atteindre 565 milliards $ US, estime Point Carbon, une firme de recherches d'Oslo.

La course au carbone est donc lancée. En janvier dernier, Morgan Stanley a acheté 38% de MGM International, une compagnie de Miami qui investit dans des projets de réduction d'émissions, dans le cadre d'un placement de 3 milliards $ US sur le marché du carbone.

En juin dernier, Credit Suisse Group achetait 10% de EcoSecurities Group, de Dublin, en Irlande.

M. Cameron, 46 ans, et M. Woodall, 45 ans, dirigent Climate Change Capital depuis un édifice de bureaux en verre.

La compagnie, qui compte environ 120 employés, projette une image écologique.