Hydro-Québec a inondé cet hiver le marché nord-américain de l'électricité en doublant ses exportations. Conséquence: les prix ont baissé.

Hydro-Québec a inondé cet hiver le marché nord-américain de l'électricité en doublant ses exportations. Conséquence: les prix ont baissé.

Des données compilées par l'Office national de l'énergie (ONE) démontrent qu'entre janvier et la fin avril, Hydro-Québec a surtout exporté 6,3 millions de mégawatts (MW) au sud de la frontière comparativement à 3,1 millions de MW en 2006. Les ventes ont ainsi rapporté 509 millions $ (+28 %) cette année contre 363 millions $ en 2006.

Or, Hydro-Québec a réussi à vendre son électricité en sol américain à un coût moyen de 6,9 ¢ le kilowattheure, soit à un prix à peine plus élevé que sur le marché québécois. Au Québec, la clientèle résidentielle paie 6,6 ¢ le kilowattheure.

L'an dernier, en exportant moins d'électricité, Hydro avait réussi a obtenir davantage pour chaque kilowattheure écoulé chez nos voisins américains. La société d'État avait alors obtenu 8,3 ¢ du kilowattheure.

«C'est une preuve que les ventes d'électricité dans les marchés hors Québec ne sont pas aussi rentables qu'on veut nous le faire croire», signale Luc Boulanger, porte-parole de l'Association québécoise des consommateurs industriels d'électricité.

Hydro-Québec est d'ailleurs accusée par un courtier d'énergie américain d'avoir manipulé les prix de l'électricité ces dernières semaines sur le marché de New York. Une plainte officielle a été déposée devant la Federal Energy Regulatory Commission (FERC).

Chez Hydro-Québec, on affirme que c'est le temps froid cet hiver qui a fait grimper la demande aux États-Unis.

«Quand il fait froid, le prix des combustibles hors Québec, comme le gaz naturel, le charbon et le pétrole, augmentent, ce qui fait augmenter le prix de nos exportations», faisait observer récemment le chef des services financiers Daniel Garant.

Il faut dire que les chiffres de l'ONE reflètent uniquement les ventes réelles d'électricité, et non les activités de courtage d'Hydro-Québec, qui n'impliquent souvent aucun échange d'énergie.

N'empêche. Hydro-Québec a été très active cette année sur le marché des exportations en raison notamment de la mise en service de nouveaux barrages, dont Eastmain-1-A. Ces nouvelles installations lui ont procuré une marge de manoeuvre d'environ 10 térawattheures (TWh) cet hiver.

À cette nouvelle réalité, il faut savoir que la filiale Distribution d'Hydro a également d'importants surplus d'électricité à écouler sur les marchés. Cette filiale a acheté trop d'électricité cette année à Hydro-Québec Production.

La division Distribution a pourtant tout tenté pour refiler ces surplus à la filiale Production, en annulant les contrats signés il y a de cela quelques années. Or, l'entente a été refusée l'automne dernier par la Régie de l'énergie.

Ces blocs d'énergie, totalisant près de 5 milliards de kilowattheures, sont actuellement vendus sur les marchés nord-américains et s'ajoutent aux surplus à écouler de la filiale Production.

Selon Luc Boulanger, cette situation démontre que plus Hydro-Québec exporte, plus elle contribue à faire baisser les prix dans le nord-est américain.

En analysant les prix de l'électricité depuis deux ans, M. Boulanger a constaté que les prix ont été supérieurs à 8 ¢ le kilowattheure pendant seulement 20 % du temps dans les États de la Nouvelle- Angleterre et de New York.

Dans ces marchés, dit-il, les centrales nucléaires, les centrales au charbon et les centrales au gaz naturel ne peuvent arrêter de produire lorsque la demande baisse. Alors qu'arrive-t-il ? «Les prix chutent parce que ces centrales doivent écouler leur électricité, à rabais s'il le faut. Et c'est ce que nous avons vu cet hiver», de faire valoir M. Boulanger.