Objet de nombreuses critiques et d'une enquête pour monopole, BAA, la société responsable des principaux aéroports britanniques que possède en partie la Caisse de dépôt et de placement, traverse des jours difficiles.

Objet de nombreuses critiques et d'une enquête pour monopole, BAA, la société responsable des principaux aéroports britanniques que possède en partie la Caisse de dépôt et de placement, traverse des jours difficiles.

Critiquer BAA, la firme responsable des aéroports Heathrow, Gatwick et Stansted à Londres, est devenu un sport national en Angleterre.

Pas un jour ou presque ne passe sans que la compagnie, détenue à hauteur de 28% par la Caisse de dépôt et de placement du Québec, ne fasse les manchettes.

Heathrow, l'aéroport international le plus achalandé au monde, «fait honte à Londres», a récemment déclaré le maire de la ville, Ken Livingstone.

«Si on regarde les installations, comme le terminal 2, elles sont abominables», a soutenu pour sa part Lyell Strambi, chef des opérations chez Virgin Atlantic.

Sans parler des hommes d'affaires qui ne veulent plus voyager par Heathrow ou des écologistes qui contestent les projets d'expansion dudit aéroport.

Heathrow est particulièrement critiqué pour la désuétude de ses installations, ses délais, les bagages qui s'y perdent (22 000 par mois) et, surtout, ses interminables files d'attente à la sécurité.

L'ancien chef de la direction de l'aéroport, Tony Douglas, a même admis lors de sa démission en juillet qu'Heathrow «est maintenu par moments à l'aide de sparadraps.»

«En ce qui concerne les récentes critiques à l'endroit d'Heathrow, nous reconnaissons que voyager par Heathrow actuellement n'est pas l'expérience que cela devrait être», avoue Cathy Mussert, porte-parole de BAA-Heathrow.

«Une bonne partie de nos installations sont vieillissantes et dépassées, poursuit-elle. La majorité de nos terminaux ont été construits dans les années 1960 et la situation est compliquée par le fait que plus de 68 millions de passagers utilisent Heathrow chaque année, alors qu'il n'a été conçu que pour 45 millions.»

Les compagnies aériennes soutiennent quant à elles que BAA n'investit pas suffisamment dans ses infrastructures, malgré les profits que la compagnie engrange (1,35 milliards de dollars en 2006).

C'est pour toutes ces raisons que la Commission de la concurrence (CC) vient de lancer une enquête concernant BAA. Elle va tenter de voir si la position quasi monopolistique de BAA à Londres ne nuit pas aux services qu'elle offre.

À terme, BAA pourrait être forcée de se départir d'une, voire de plusieurs de ses installations.

Est-ce que la perspective de voir BAA obligée de vendre l'un de ses aéroports inquiète la Caisse de dépôt et de placement du Québec? L'investisseur n'a pas voulu émettre de commentaire à ce sujet, pas plus qu'il n'a voulu évoquer les récentes critiques à l'égard de BAA.

Peter Morrell, du département du transport aérien de l'Université de Cranfield, croit qu'il est «tout à fait possible» que BAA soit forcée de se départir d'un de ses aéroports par la CC.

De son côté, David Gillingwater, de l'Université de Loughborough, ne croit pas que le fait que BAA gère 90% du trafic aérien londonien soit un problème.

Le professeur au département de gestion du transport aérien souligne d'ailleurs que la loi oblige déjà BAA à gérer indépendamment chacune de ses facilités.

«L'actuelle structure de propriété n'est pas le problème», soutient le professeur. Selon lui, les difficultés proviennent des régulations en place qui garantissent des revenus à BAA (des compagnies aériennes qui utilisent ses facilités), sans prévoir suffisamment d'incitatifs pour forcer la compagnie à investir davantage.

Pour sa part, BAA reconnaît que les aéroports de Londres ont besoin d'investissements. «Nous avons planifié un ambitieux plan pour transformer nos aéroports», a rappelé le directeur exécutif de BAA, Stephen Nelson, au début août.

Le problème? Construire ce genre d'infrastructure prend du temps, beaucoup de temps. Le tout nouveau terminal d'Heathrow, qui doit être inauguré en mars prochain, a été pensé il y a déjà 20 ans, rappelle David Gillingwater.

En plus du nouveau terminal construit au coût de 9 milliards de dollars, BAA prévoit rénover tous ses terminaux à Heathrow d'ici 2016. La société promet qu'avec toutes ces améliorations, Heathrow sera radicalement transformé.

«Heathrow va certainement être un meilleur aéroport. Le traitement des passagers à travers les terminaux va être grandement amélioré», croit Peter Morrell.

Il faut l'espérer car, selon les dernières prédictions, le nombre de passagers voyageant par Heathrow devrait passer de 68 millions à plus de 80 millions d'ici l'an 2016. Une troisième piste d'atterrissage, contestée par les écologistes et le voisinage, est également sur la planche à dessin.