La longue et fructueuse carrière de l'arnaqueur montréalais Laurent Barnabé a probablement pris fin mardi quand l'homme de 68 ans a plaidé coupable à deux chefs d'accusation de blanchiment d'argent aux États-Unis.

La longue et fructueuse carrière de l'arnaqueur montréalais Laurent Barnabé a probablement pris fin mardi quand l'homme de 68 ans a plaidé coupable à deux chefs d'accusation de blanchiment d'argent aux États-Unis.

Il a reconnu son rôle dans une fraude offshore de 170 M$ US commise de 1996 à 2000 par la First International Bank of Grenada (FIBG). Cette fausse banque était utilisée pour attirer et détourner l'argent de déposants alléchés par la promesse d'intérêts élevés à l'abri du fisc.

Renonçant à son procès qui devait commencer en avril à Portland, sur la côte ouest américaine, M. Barnabé a plaidé coupable à deux accusations de blanchiment d'argent.

En échange, la justice américaine a abandonné plusieurs autres accusations et a recommandé une peine réduite de six ans de prison, trois ans de moins que la peine initialement recherchée. La sentence doit être approuvée par un juge le 11 juin.

Les aveux spécifiques de «Larry» Barnabé visent deux virements illégaux totalisant 64 783 $, en 2000. Mais M. Barnabé reconnaît que ses actes ont eu un impact sur plus de 100 millions de dollars dans le stratagème de la FIBG.

Plusieurs complices (dont deux avocats) ont également plaidé coupable, écopant de peines de 4 à 10 ans de prison. L'accusé principal, l'évangéliste et prêteur hypothécaire Gilbert Ziegler est mort d'un infarctus en 2005, avant d'être traduit en justice.

Durant les années 90, M. Barnabé avait été condamné à des amendes au Québec et en Ontario pour des infractions aux lois sur les Valeurs mobilières.

Encore aujourd'hui, il est poursuivi au civil, à Montréal, pour son rôle dans un scandale de faux abris fiscaux en recherche et développement, dans lesquels des investisseurs prétendent avoir perdu 100 millions.

«En 1999, au moment même où il plaidait coupable au Québec, M. Barnabé donnait des séminaires, dans les Caraïbes, où il disait à des investisseurs comment acheter des certificats de dépôt offshore tout en restant sous le radar des autorités réglementaires», a dit jeudi à La Presse Claire Fay, la procureure fédérale qui vient d'obtenir la condamnation de M. Barnabé.

«Nous avons des vidéos de ses performances. C'est un excellent vendeur, très convaincant, charmant, il a vraiment l'air d'un bon gars. Bref, un sociopathe typique.»

Les certificats de dépôt à haut rendement promus par M. Barnabé étaient de la frime.

«La FIBG n'a jamais été une vraie banque et n'avait aucune expertise bancaire, les nouveaux dépôts servaient à payer les intérêts dus aux déposants antérieurs», affirme Me Fay. L'essentiel de l'argent était volé et investi dans toutes sortes de projets fumeux.

«Larry s'est acheté un bateau de 350 000 $ à Fort Lauderdale, apparemment, il voulait vendre des petites croisières aux touristes. Mais le bateau a été utilisé durant un grand total de 45 minutes et il l'a revendu pour 170 000 $, a dit Me Fay.»

«On sait aussi qu'il a fait un dépôt de 125 000 $ sur un condo à Las Vegas», a dit la procureure fédérale.

Vidée, la FIBG a fermé en 2000.

«Entre décembre 1999 et mars 2000, (M. Barnabé) transférait 100 000 $ par semaine vers deux comptes dans une banque de Vienne, en Autriche», a dit Me Fay.

M. Barnabé s'est installé à Las Vegas, où il a lancé une nouvelle affaire, affirme Me Fay: «Il avait appelé ça l'International Learning Center, on pense qu'il avait l'intention de conseiller les gens sur l'investissement offshore.»

«À un moment donné, Larry avait dû se dire que ce qui était bon pour (ses complices) était bon pour lui, alors il avait parti sa propre banque offshore, la Oxford Bank, également dans l'île de la Grenade», qui fonctionnait comme la FIBG, a dit Me Fay.

Deux des complices de M. Barnabé ont fui en Ouganda, où ils ont acheté un des anciens palais du dictateur Idi Amine Dada, avant d'être arrêtés et renvoyés aux États-Unis en 2004.

Selon Me Fay, M. Barnabé avait un rôle important à la FIBG, celui de trouver les poissons. Il a monté une campagne de marketing sophistiquée et professionnelle qui a vanté la FIBG à plus de 1000 investisseurs de 1998 à 2000. La Grenade était utilisée comme base pour former des représentants qu'on amenait sur l'île pour des cours. Puis ils rentraient aux États-Unis pour solliciter les victimes.

«Il touchait des commissions énormes en plus d'un salaire de 18 000 $ par mois», a dit Me Fay.

Les autorités ont retrouvé un million de dollars dans trois comptes en banque au nom de M. Barnabé.

L'avocat de M. Barnabé, Me Doug Stringer, a indiqué à La Presse qu'il ne fera pas de commentaires avant la sentence, le 11 juin.