La restauration est un dur combat: plus de la moitié des nouvelles tables du Québec ne vivent pas assez longtemps pour fêter leur troisième anniversaire. Mais pour chaque soldat qui tombe, il en arrive généralement un autre pour prendre la relève.

La restauration est un dur combat: plus de la moitié des nouvelles tables du Québec ne vivent pas assez longtemps pour fêter leur troisième anniversaire. Mais pour chaque soldat qui tombe, il en arrive généralement un autre pour prendre la relève.

Exit les Chèvres, le Chou et Anise? Bonjour le Garde-Manger, la Montée de lait et Cuisine et dépendances. C'est business as usual pour l'industrie.

Bon an, mal an, de 2000 à 3000 restaurants ferment leurs portes au Québec, dont la moitié à Mont-réal, explique le porte-parole de l'Association des restaurateurs du Québec, François Meunier. Mais le nombre d'établissements ne diminue pas, il est même en croissance depuis 2001. De nouvelles enseignes apparaissent, tandis que des locaux délaissés reprennent vie sous une nouvelle administration.

Selon les données fournies par l'association, le nombre de restaurants avec service complet est passé de 8748 à 9625 au Québec entre 2001 et 2005. Pendant la même période, il s'est ajouté 500 tables à Montréal.

Depuis cinq ans, l'industrie a connu une bonne croissance de ses ventes, qui reflète la bonne santé de l'économie. Les ventes des restaurants sont étroitement liées à l'évolution de l'économie, dit François Meunier. «Quand il y a un ralentissement, les restaurants sont les premiers à écoper.»

Le bon vent des dernières années commence à faiblir. Depuis septembre 2006, le chiffre d'affaires des restaurants québécois est en baisse et ce sont les restaurants avec service qui souffrent, rapporte Statistique Canada. En octobre, le chiffre d'affaires des établissements avec service a décliné de 8%, alors que les ventes des restaurants sans service aux tables (les fast food) ont augmenté de 6,2%.

Malgré cette baisse de régime, les perspectives restent bonnes pour l'industrie de la restauration. Les Québécois mangent de plus en plus à l'extérieur de la maison.

Plus du tiers du budget alimentaire des familles est dépensé hors du foyer, une progression constante depuis 1992. La tendance est nord-américaine: aux États-Unis, pour la première fois cette année, les ménages ont dépensé plus d'argent pour manger dans les restaurants qu'à la maison.

S'ils mangent plus souvent au resto, les Québécois ne peuvent pas aller chez Toqué! tous les soirs. Parce que leur revenu disponible est plus bas qu'en Ontario et que les taxes sont plus élevées, le budget restaurant des familles est limité. Il s'élève en moyenne à 1756$ par année comparativement à 2024$ en Ontario.

Les nécessaires congrès

«Les plus grandes tables (qui sont aussi les plus chères) ne peuvent pas compter uniquement sur la clientèle locale, souligne François Meunier. Elles doivent attirer les touristes, notamment les gens d'affaires et la clientèle des congrès.»

Du côté des congrès internationaux, Montréal vit actuellement une disette provoquée par les événements du 11 septembre 2001. Comme ce genre de grands événements est planifié cinq ou six ans à l'avance, les attentats terroristes ont enrayé la machine et créé un vide qui aggrave actuellement les difficultés des restaurants haut de gamme.

La conjoncture économique peut être plus ou moins favorable, ce qui ne change pas, c'est la concurrence féroce qui sévit dans l'industrie. La restauration est encore considérée comme un secteur facile pour quelqu'un qui veut se lancer en affaires. Dans tout Québécois, il y aurait un restaurateur qui sommeille, dit-on dans l'industrie.

«C'est facile au sens d'accessible, parce qu'on n'a besoin d'aucun permis et d'aucun diplôme, convient le porte-parole de l'Association des restaurateurs. Mais ça prend des compétences.»

À l'Institut de tourisme et d'hôtellerie du Québec, le tiers des étudiants de niveau collégial arrivent avec la ferme intention d'ouvrir leur propre boîte à la fin de leur cours. Plusieurs changent d'idée en cours de route, indique Cliff Boyd, directeur de la formation collégiale à l'ITHQ.

Selon lui, les notions de gestion qu'ils acquièrent à l'Institut découragent beaucoup de restaurateurs en herbe. «C'est un secteur qui exige des investissements importants et où la rentabilité est loin d'être assurée», résume M. Boyd en soulignant que les banques ne prêtent pas d'argent aux nouveaux restaurateurs.