La majorité des entreprises canadiennes n'ont pas de programme pour garder au travail les baby-boomers qui prendront leur retraite bientôt.

La majorité des entreprises canadiennes n'ont pas de programme pour garder au travail les baby-boomers qui prendront leur retraite bientôt.

Pourtant, il n'y a pas assez de jeunes ni d'immigration suffisante pour remplacer cette génération dont les plus âgés ont 60 ans cette année.

" Pour compenser, les organisations devront adopter de nouvelles technologies, augmenter l'automatisation, modifier leurs processus de travail et recruter de la main-d'oeuvre non conventionnelle comme les retraités ", prévoit Owen Parker, du Conference Board du Canada. Tout cela exige un plan stratégique dès maintenant.

L'organisme de recherche dévoilait hier les résultats d'une consultation menée auprès de hauts dirigeants canadiens dont 137 ont répondu à l'appel. Quatre d'entre eux sur cinq reconnaissent que le vieillissement de leur personnel créera des problèmes à leur entreprise d'ici cinq ans, près d'un sur quatre les vivent déjà.

Fort peu affirment cependant avoir pris le taureau par les cornes. Plus de la moitié prétextent que ce n'est pas une priorité tandis que le tiers plaident n'avoir ni l'argent pour s'en occuper, ni le temps.

Les problèmes qui pointent à l'horizon ne manquent pas pourtant, d'autant que le Canada a déjà un taux de chômage très faible. Les répondants craignent que les prochains départs à la retraite vont drainer une partie du savoir-faire de leur entreprise qu'ils ne pourront combler par l'embauche de jeunes. Ils savent aussi que les coûts liés aux avantages sociaux vont s'accroître, s'ils veulent retenir leurs employés plus longtemps.

Trois options se présentent, posant chacune leurs défis propres.

Avant tout, garder ses employés. Finis les programmes avantageux de préretraite, place plutôt à un bouquet de mesures et d'avantages offerts aux plus âgés afin qu'ils restent. Ces attraits devront aussi être conçus pour endiguer le maraudage interentreprises. Un employé qualifié aura la partie belle de changer d'entreprise, s'il estime le concurrent ou le voisin plus accueillant ou plus respectueux envers les cheveux gris ou teints.

La matière grise est de plus en plus en demande. En 1998, le taux de chômage était de 6,8 % chez les 55-65 ans, cette année, il n'est plus que de 5,4 %. Durant la même période leur taux d'emploi a grimpé de 10 points de pourcentage.

Bref, ils sont à la fois plus nombreux à vouloir travailler et moins nombreux à chômer. Le rapport classique du marché du travail s'inverse: ce ne sont plus les travailleurs qui se font concurrence pour être embauchés, ce sont les entreprises qui se disputeront les rares travailleurs disponibles.

Les entreprises doivent aussi commencer à recruter ailleurs que dans leurs bassins traditionnels, chez les immigrants, les femmes et les autochtones dont le taux de participation au marché du travail reste plus faible. Même les retraités peuvent être sollicités.

Enfin, les employeurs devront augmenter l'efficacité de leur personnel en place par la réduction de l'absentéisme, l'augmentation de leur bien-être et de leur formation, l'achat de technologies plus performantes et l'amélioration de leur mode de gestion.

La rétention des employés âgés peut être compliquée par une culture de mépris à leur endroit. Cela est particulièrement vrai dans la haute technologie où les plus jeunes font souvent la loi.

Il faudra désormais penser à offrir aux aînés des horaires plus flexibles, voire réduits. Cela pose problème car certaines lois ou réglementations y font obstacle. La discrimination selon l'âge contrevient à la Charte des droits; les régimes à prestations déterminées ne sont pas conçus pour les retraites progressives, etc.

Déjà près du quart des entreprises font face à des pénuries. La mesure trimestrielle du Board de son indice de confiance des entreprises révèle que plus d'une entreprise sur trois identifient la rareté de main-d'oeuvre qualifiée comme principal obstacle à l'investissement. Le deuxième obstacle est un corollaire du premier: les coûts de la main-d'oeuvre augmentent.

Ces résultats viennent confirmer ceux de l'enquête de Statistique Canada sur les perspectives des fabricants publiés hier. Après la poussée du huard et des prix des matières premières, ils voient dans les pénuries de main-d'oeuvre le troisième obstacle à la production. Les entreprises de services ou les producteurs de produits de base ne peuvent prétexter les deux premiers obstacles pour ne pas s'attaquer au troisième.

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