Rogers et Telus partent en guerre contre l'idée de réserver des fréquences pour de nouveaux acteurs dans l'industrie de la téléphonie sans fil.

Rogers et Telus partent en guerre contre l'idée de réserver des fréquences pour de nouveaux acteurs dans l'industrie de la téléphonie sans fil.

L'un de ces nouveaux acteurs pourrait être Quebecor, une entreprise aux goussets plutôt bien garnis.

Or, pour Rogers et Telus, réserver des fréquences revient à subventionner les entreprises visées parce que les prix obtenus ne sont pas aussi élevés que ceux obtenus lors d'une vente ouverte à tous.

«Il n'y a pas de raison que les contribuables canadiens subventionnent les entrants, surtout lorsqu'il s'agit d'entreprises très bien capitalisées comme Quebecor», affirme le président de Rogers Communication sans fil, Rob Bruce, dans une entrevue avec La Presse Affaires.

«Lorsqu'on voit tout l'argent qui entre au Canada par le biais de fonds d'investissement privés, on constate qu'il y a beaucoup d'argent dans l'économie pour financer les entreprises qui veulent développer de nouveaux réseaux.»

En 2008, Industrie Canada mettra aux enchères de nouvelles licences de téléphonie sans fil pour des fréquences dans la gamme de 2 GHz.

Le ministère a organisé un vaste processus de consultation pour déterminer les modalités de cette mise aux enchères. Il pourrait notamment être question de réserver des fréquences pour les nouveaux acteurs du milieu.

Les parties intéressées soumettront leurs commentaires aujourd'hui. Les trois grands acteurs de la téléphonie sans fil canadienne, Rogers, Telus et Bell, aimeraient bien mettre la main sur ces nouvelles fréquences.

«Nous pourrions utiliser ce spectre supplémentaire pour continuer à servir nos clients et offrir de nouveaux services innovateurs», déclare M. Bruce.

Le vice-président exécutif aux affaires corporatives de Quebecor, Luc Lavoie, soutient toutefois que ni Rogers, ni Bell n'ont besoin de fréquences supplémentaires. Il reconnaît toutefois que Telus pourrait avoir besoin de fréquences additionnelles pour desservir la région torontoise.

M. Lavoie estime que l'arrivée de nouveaux acteurs permettrait de rehausser le niveau de compétition dans l'industrie canadienne de la téléphonie sans fil, ce qui devrait se traduire par une baisse des prix, une meilleure pénétration et des services plus avancés.

Rob Bruce n'est pas d'accord avec cette analyse. Selon lui, l'industrie canadienne de la téléphonie sans fil est déjà extrêmement compétitive.

«J'ai travaillé dans l'industrie de l'alimentation et dans celle de la boisson gazeuse et je suis passé à travers la guerre des colas, raconte-t-il. Je peux vous dire que le niveau de compétition dans l'industrie de la téléphonie sans fil dépasse tout ce que j'ai pu voir dans ma carrière.»

Il fait valoir que les trois grands acteurs canadiens offrent des milliers de plans tarifaires différents. Il ajoute qu'on ne compte que quatre joueurs nationaux aux États-Unis pour une population 10 fois plus importante que la population canadienne.

Lorsqu'il est question de prix et de taux de pénétration, les intervenants se livrent une véritable guerre de statistiques: Luc Lavoie affirme qu'avec un taux de pénétration de 58%, le Canada fait pâle figure auprès des Européens. En Italie, par exemple, le taux atteint 130%.

Michael Hennessy, vice-président, politique de large bande, chez Telus, soutient que les taux de pénétration sont élevés en Europe parce que les Européens doivent se procurer plusieurs abonnements pour éviter de payer des frais d'itinérance élevés. En Italie, le taux de pénétration tournerait plutôt autour de 80%.

M. Hennessy admet que les tarifs sont plus élevés au Canada qu'aux États-Unis lorsqu'on parle de grands utilisateurs. Par contre, ils sont moins élevés dans le cas des petits utilisateurs. Or, c'est dans ce segment que la croissance est la plus élevée, soutient-il.

M. Hennessy et M. Bruce s'insurgent également lorsque Quebecor soutient que les services qu'ils offrent sont dépassés.

«Nous avons les services de troisième génération les plus intéressants de toute l'Amérique du Nord», affirme M. Hennessy.

Les deux hommes soutiennent qu'ils n'ont rien contre l'entrée en scène de nouveaux acteurs, en autant que les règles soient équitables.

«Nous avons investi des sommes importantes, près de 7 milliards de dollars, pour bâtir un réseau national, lance M. Hennessy. Ce n'est pas juste si de grandes entreprises bénéficient de subventions pour entrer sur le marché.»

Bell a fait savoir qu'elle attendra le dépôt de son mémoire, aujourd'hui (vendredi), pour faire connaître publiquement sa position.