Le PDG de la première compagnie aérienne de Russie, Aeroflot, qui veut développer sa flotte de long-courriers, a annoncé mercredi son "intention" d'acheter 22 Boeing à partir de 2010, puis autant d'Airbus dès 2012, une victoire a priori pour le constructeur américain.

Le PDG de la première compagnie aérienne de Russie, Aeroflot, qui veut développer sa flotte de long-courriers, a annoncé mercredi son "intention" d'acheter 22 Boeing à partir de 2010, puis autant d'Airbus dès 2012, une victoire a priori pour le constructeur américain.

"Cela ne veut pas dire que nous avons choisi Boeing. Nous avons l'intention d'acheter et des Boeing et des Airbus", a cependant tenu à souligner le PDG de cette compagnie contrôlée par l'Etat russe, Valeri Okoulov, cité depuis Irkoutsk, en Sibérie, par les agences russes.

Il a évoqué l'achat de 22 avions long-courriers B787 d'abord à Boeing, entre 2010 et 2012, pour un contrat estimé par les experts à 2,5 milliards de dollars. Seulement ensuite seront passées les commandes à Airbus de son A350, entre 2012 et 2016.

"Ceci est lié au fait que les délais de livraison pour les Boeing 787 sont meilleurs que pour les Airbus A350", a confirmé à l'AFP Lev Kochliakov, vice-directeur général d'Aeroflot.

M. Kochliakov explique la préférence de la direction d'Aeroflot pour les nouveaux long-courriers de Boeing par un souci d'unité de sa flotte de long-courriers, déjà composée de Boeing. Onze Boeing s'ajoutent à six Iliouchine russes au sein de ce parc de seulement 17 long-courriers, a-t-il dit, soulignant l'urgence à le développer.

"C'est la position de la direction, que nous avons soumise au conseil d'administration, dont les représentants de l'Etat", a précisé M. Kochliakov, disant attendre "chaque jour" la décision du conseil, qui a encore repoussé sa confirmation lors de sa dernière réunion vendredi, alors que l'appel d'offres pour 22 appareils avait été annoncé à la mi-septembre.

Le scénario de la direction privilégiant Boeing intervient dans un contexte de luttes au sein d'Aeroflot, autour du choix entre américains et européens pour l'achat de ces nouveaux avions, soulignent les analystes russes.

Signe de ce jeu de surenchère verbale autour du choix entre Boeing et Airbus, la veille de l'annonce de M. Okoulov en faveur de l'américain, Alexandre Lebedev, un des plus importants actionnaires d'Aeroflot après l'Etat, a dit avoir signé un accord préliminaire pour l'achat de 22 Boeing 787.

"Les politiques veulent commander des Airbus et la direction d'Aeroflot des Boeing", résume Konstantin Makienko, spécialiste en aéronautique du Centre d'analyse sur les stratégies et technologies, pour expliquer les luttes qui se poursuivent jusqu'au sein du conseil d'administration entre la direction d'Aeroflot et les représentants de l'actionnaire majoritaire qu'est l'Etat.

M. Makienko évoque les tensions avivées ces derniers mois entre Washington et Moscou, et la crainte par exemple des autorités russes de voir Aeroflot touchée par un embargo, comme le sont le monopole d'exportations d'armes Rosoboronexport et le constructeur aéronautique Soukhoï, pour leurs activitées présumées avec l'Iran.

"Comment dès lors ferait Aeroflot pour ses pièces de rechange?".

Comme lui, Alexeï Zinitski, rédacteur en chef de la Revue d'aéronautique, pointe du doigt les motifs politiques dans le blocage de la commande.

"Aeroflot veut conclure cet achat rapidement mais le gouvernement y est opposé pour des raisons politiques", dit-il, évoquant le refus américain jusqu'ici d'accepter l'entrée de la Russie dans l'Organisation mondiale du commerce (OMC).

"Et Aeroflot se retrouve pris en otage au milieu de ces jeux politiques que mènent les autorités russes avec les Etats-Unis et l'Union européenne", ajoute-t-il, évoquant le "poids" de ce gros contrat dans d'autres discussions, alors que la Russie affiche des ambitions dans le groupe européen d'aéronautique et de défense EADS, dont elle vient de s'offrir 5% du capital.

"Il y a des luttes politiques derrière tous les gros contrats", a laconiquement acquiescé le vice-directeur général d'Aeroflot, Lev Kochliakov.

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