Si le marasme du marché de l'habitation refroidit l'ardeur du consommateur américain, les entreprises prendront en partie le relais pour assurer aux États-Unis une croissance modeste l'an prochain.

Si le marasme du marché de l'habitation refroidit l'ardeur du consommateur américain, les entreprises prendront en partie le relais pour assurer aux États-Unis une croissance modeste l'an prochain.

L

es exportateurs canadiens de machinerie et d'équipement pourront en tirer parti alors que les producteurs de bois d'oeuvre frapperont un noeud encore une fois.

Toutefois, précise Kip Beckman, du Conference Board du Canada, les risques que les ajustements présents du marché de l'habitation dégénèrent en crise sont plus élevés que ce qu'en pensent la majorité des prévisionnistes aux États-Unis.

Dans ses Perspectives économiques américaines trimestrielles, le recherchiste associé principal du Board prédit que la croissance américaine sera d'à peine 2,2 % en 2007, comparativement à 3,5 % cette année. " On est en deçà du consensus qui est plutôt à 2,6 % ", admet-il en entrevue. M. Beckman évalue à seulement 20 % les risques que le présent ralentissement se transforme en récession déclenchée par une chute du prix des maisons.

Amorcée au printemps, la décélération s'est accélérée depuis, au point où le Board voit moins de 2 % d'expansion cet automne.

Grand responsable de l'effet de richesse des consommateurs pendant cinq ans, le marché de l'habitation joue désormais le rôle contraire. Les mises en chantier, en repli de 10 % cette année par rapport à l'an dernier, chuteront de près de 18 % encore en 2007. Le prix des maisons va plafonner et peut-être baisser dans certains états où la fièvre a été trop forte. M. Kipman mentionne la Floride et la Californie. Les ménages ne pourront plus emprunter sur la plus-value de leurs maisons qui se sera en partie volatilisée.

" Un effet de richesse créé par le marché boursier touche surtout les ménages les plus fortunés et modifie assez peu leurs comportements de consommation, explique M. Beckman. Ils savent que la Bourse est volatile. Les propriétaires de maison considèrent en revanche les variations de prix comme permanentes. " Par malheur, c'est faux.

Le choc sera d'autant plus grand. Les emplois dans les métiers de la construction se feront plus rares tout comme se tarira la demande de biens de construction comme le bois, le fil, le bardeau ou la brique. Seront touchés aussi les services financiers liés aux prêts hypothécaires et aux transactions immobilières.

La création plus faible d'emplois touchera à son tour la consommation.

En revanche, les entreprises regorgent de liquidités après des profits en hausse de près de 20 % cette année. Bien que leur progression freinera de manière marquée l'an prochain, il restera assez d'argent pour augmenter les investissements en équipement et infrastructures. L'aéronautique canadienne pourrait profiter de cet essor, croit M. Beckman.

Cet optimisme étonne cependant quelque peu quand on regarde par exemple la dernière mesure de l'indice ISM des manufacturiers. Elle montrait hier son niveau le plus faible depuis un an tout en restant dans la zone associée à la croissance de l'économie.

La Réserve fédérale américaine (Fed) ne pourra faire autrement que d'abaisser son taux directeur l'an prochain. Cela affaiblira davantage le billet vert mais rendra plus alléchantes les marchandises américaines autres que l'automobile. La Chine en particulier s'intéresse aux machines agricoles de l'Oncle Sam, indique M. Beckman.

Le Board fait aussi l'hypothèse que le prix du baril de brut sera inférieur à 70 $US tout l'an prochain. Il évalue à de 5 $ à 10 $US la prime liée au programme iranien d'enrichissement d'uranium. Si le prix du brut a baissé ces dernières semaines, c'est que la tension est moins forte entre l'Iran, quatrième producteur mondial, et le Conseil de sécurité des Nations unies.

Si la situation se corsait de nouveau, les prix remonteraient en flèche, surtout si l'Iran décidait d'assoiffer l'Occident. Si en revanche la détente actuelle perdurait tout autant que le ralentissement, le prix du baril pourrait baisser davantage et donner un peu de répit au consommateur américain.

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