La couleur, c'est bien plus que de l'esthétique et de la décoration. Un mauvais choix de couleurs peut réduire la productivité, provoquer de l'absentéisme et rendre malades des employés. Même des non voyants sont touchés par la couleur.

La couleur, c'est bien plus que de l'esthétique et de la décoration. Un mauvais choix de couleurs peut réduire la productivité, provoquer de l'absentéisme et rendre malades des employés. Même des non voyants sont touchés par la couleur.

Bernard Pepin, président fondateur d'Atmosphère Design, de Montréal, se spécialise dans la couleur depuis 20 ans et il a en outre été nommé récemment vice-président canadien du comité de direction de l'International Association of Colour Consultants/Designers (IACC), de Londres.

Sur seulement 65 membres en Amérique du Nord, dont quatre au Canada, l'IACC ne compte qu'un seul Québécois, et c'est lui qui représente le pays.

Bernard Pepin décrit la couleur comme un outil économique souvent insoupçonné, mais d'une redoutable efficacité. Sa liste de clients est d'ailleurs éloquente. Le designer doit publier bientôt un traité sur la couleur.

Le Conseil national de la recherche du Canada (CNR) va d'ailleurs scruter durant deux jours, au début de septembre, à Ottawa, les avantages que cachent la lumière naturelle et la couleur, au cours d'un symposium avec des ingénieurs.

Il faudrait se débarrasser des fluorescents et des ampoules carencées, qu'on retrouve souvent dans les bureaux et les institutions scolaires et hospitalières, rappelle Bernard Pepin.

Métabolisme et humeur

Ce matériel d'éclairage ne reproduit pas le spectre complet de la lumière naturelle et affecte le métabolisme et les humeurs, dit-il. Le designer promet une révolution dans l'éclairage, après la découverte récente d'un quatrième photorécepteur dans l'oeil.

Affirmer que la couleur tue, c'est trop fort, mais elle peut avoir tout un impact sur la santé, comme augmenter les caries dentaires des enfants de 30 %, prétend Bernard Pepin.

Il se base sur les recherches fondamentales du Dr Harry Wolfhart, à qui il succède à l'IACC. De nombreux enfants pourraient même se passer de Ritalin, grâce à un environnement aux bonnes couleurs qui les rendrait moins agités. Si par ailleurs les institutions d'enseignement choisissaient les couleurs appropriées, au lieu de se contenter du gris du béton, leur taux d'absentéisme chuterait de 30 % et les notes de leurs étudiants augmenteraient de 15 %, toujours selon le spécialiste.

Après son diplôme en architecture, Bernard Pepin a étudié durant quatre ans à San Diego une science encore méconnue, la chromologie. Le président de l'IACC, Frank Mahnke, a été le directeur de thèse de Bernard Pepin, qui portait sur l'influence thérapeutique des couleurs et qui lui a valu une mention de cette association de Londres.

Il ne faut peut-être pas s'étonner qu'Atmosphère Design compte de nombreux centres hospitaliers parmi sa clientèle, comme l'Institut de cardiologie de Montréal, mais aussi des sociétés pétrolières, Alcan, AT&T, Bombardier, Loto-Québec, la Société de transport de Montréal, les universités McGill et UQAM. Les brasseries Labatt et Molson, des hôtels comme le Royal William, de Québec, Radio-Canada et le Cirque du Soleil sont aussi des clients.

Bernard Pepin a ainsi transformé des voitures de Via Rail et du métro de Montréal, pour améliorer l'humeur des passagers de même que leur perception de sécurité et de propreté des lieux.

Le spécialiste a par ailleurs refait, l'an dernier, la coloration de l'usine de Valcourt de BRP (ex-Bombardier), pour diminuer l'absentéisme et les accidents de travail et pour augmenter la concentration et l'esprit d'équipe.

Bernard Pepin déconseille le gris, qui accentue la nonchalance et la non-performance.

Il préfère des teintes de bleu dans la chambre à coucher, pour lutter contre l'insomnie et l'insécurité qui finissent par provoquer l'absentéisme.

Pour le travail, le designer aime le jaune ambré, l'orangé, le terra cota et le vert, pour favoriser la créativité, l'acuité, l'éveil et le confort.

Les couleurs préférées dans le monde, sauf en Asie, comprennent le bleu, le vert (par les femmes) et le rouge (par les hommes), mais les teintes dites naturelles (terre, plantes) gagnent en popularité.

Selon les pays, il faut tenir compte de la luminosité et du climat dans le choix des couleurs, conclut Bernard Pepin.

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