Les clubs de golf privés, souvent exemptés d'impôt, ne sont pas les seuls à profiter de la générosité du fisc.

Les clubs de golf privés, souvent exemptés d'impôt, ne sont pas les seuls à profiter de la générosité du fisc.

Les clubs de golf accessibles au public, gérés par des entrepreneurs, reçoivent aussi un gros coup de pouce, a appris La Presse Affaires.

À chaque année, ces golfs ont droit à un important congé de taxes foncières, au détriment des municipalités et des commissions scolaires.

Le rabais de taxes prend la forme d'un plafonnement de la valeur foncière. Globalement, ce cadeau fiscal a coûté 12,5 millions aux contribuables cette année, indique le ministère des Affaires municipales.

La semaine dernière, La Presse Affaires révélait que plusieurs clubs privés à but non lucratif font de bons profits avec des activités externes, comme les tournois, sans que le fisc n'intervienne.

Or, les golfs accessibles au public ont aussi leur bonbon fiscal, camouflé dans une vieille loi.

Valeur imposable plafonnée

Depuis 1963, la loi plafonne la valeur imposable des terrains de golf, de sorte qu'au-dessus d'un certain niveau, la valeur est non imposée.

La loi exempte également tous les aménagements du terrain (tertres, trappes de sables, etc.).

Pour être admissibles, les terrains doivent être accessibles au public et faire au moins 20 hectares.

À Montréal, par exemple, les sept clubs accessibles au public ont une valeur foncière de 80,6 millions, mais seulement 17 millions sont imposables.

Résultat : la mesure crée un manque à gagner de 2,8 millions pour la Ville de Montréal, estime Annie Gerbeau, chef de la fiscalité à la Ville.

Globalement, la valeur non imposée des terrains de golf au Québec s'élève à 424 millions de dollars, aménagements inclus, selon le ministère des Affaires municipales. Cette valeur exemptée crée un manque à gagner de quelque 11 millions pour les municipalités et d'environ 1,5 million pour les commissions scolaires. Total: 12,5 millions.

Les motifs d'une telle mesure demeurent nébuleux. Au moment de son adoption, en 1963, il était question de protéger certains clubs de golf ruraux, de même que de «favoriser la présence d'espaces verts en milieu urbain». Au fil des années, la loi sur la fiscalité municipale a été réformée, mais l'exemption, bien que modifiée, est demeurée.

L'économiste Claude Montmarquette, de l'Université de Montréal, s'interroge sur la pertinence de subventionner une telle industrie. «C'est souvent la difficulté du système fiscal au Québec. Plusieurs choses ont été mises en place et personne ne s'en souvient. Cette exemption a facilité l'offre. Et on se demande aujourd'hui pourquoi il y a trop de terrains de golf», dit-il.

Et les espaces verts? «Compte tenu de la quantité de produits chimiques qui servent à l'entretien des terrains, je ne suis pas sûr que c'est la meilleure façon d'encourager les espaces verts», croit M. Montmarquette.

Au ministère des Affaires municipales, le directeur des politiques fiscales, Bernard Guay, explique que la mesure permet de maintenir des espaces verts puisque, sans elle, certains propriétaires seraient incités à convertir leur terrain. D'ailleurs, selon la loi, un propriétaire qui déciderait de convertir son terrain devrait payer 10 ans d'arrérage d'impôt foncier, explique M. Guay.

Claude Montmarquette estime que les arrérages d'impôt constituent un frein à la fermeture et maintiennent artificiellement en vie des terrains qui devraient fermer. En effet, à moins d'une faillite, la fermeture d'un terrain devient ainsi très coûteuse, «ce qui rend plus difficile la consolidation de l'industrie».

Les terrains de golf privés, propriétés des membres, ne bénéficient plus de cette mesure depuis 1979. Par contre, certains clubs privés, comme le Royal Montréal et le Elm Ridge, à l'Île Bizard, sont situés dans une zone agricole. Ce zonage vert, imposé bien après la création de ces deux clubs, fait en sorte que la valeur du Royal Montréal et du Elm Ridge est moindre que celle d'un terrain comparable dans un autre zone. Cette valeur moindre diminue d'autant l'impôt foncier.