Sous la menace d'être sanctionné pour outrage au tribunal, l'ex-président de Cinar, Ronald Weinberg, a fait une apparition in extremis au Palais de justice de Montréal lundi.

Sous la menace d'être sanctionné pour outrage au tribunal, l'ex-président de Cinar, Ronald Weinberg, a fait une apparition in extremis au Palais de justice de Montréal lundi.

M. Weinberg, qui avait fait faux bond plusieurs fois à la cour depuis un mois, a évité d'être arrêté et emprisonné, quand le juge a décidé de ne pas retenir la demande en ce sens faite lundi matin par un des avocats de la poursuite.

M. Weinberg est poursuivi au civil pour 110 M$ par Cinar, la firme qu'il a fondée, et qui lui reproche de la fraude, des malversations et un détournement de 59 M$ vers les Bahamas.

Durant les dernières semaines, M. Weinberg a ignoré plusieurs échéances devant la cour, changeant d'avocat, disparaissant vers un pays étranger dans le Sud et étant trois fois représenté par deux avocats différents s'avouant incapables de le situer sur la mappemonde.

Soupçonné par Cinar de dépenser sans égard pour une ordonnance judiciaire gelant ses avoirs, il a aussi omis de déposer une liste de tous ses actifs tel que l'exige depuis le 13 octobre le juge André Denis, de la Cour supérieure.

M. Weinberg s'est présenté en cour avec un bronzage et un nouvel avocat, mais sans la liste de ses actifs.

Son nouvel avocat, Me Jean Lozeau, du cabinet Lozeau-L'Africain, a indiqué que son client respecterait désormais toutes les échéances de la cour. M. Weinberg a fait savoir hier qu'il n'avait pas tenté de fuir la justice et qu'il entend continuer sa lutte devant les tribunaux.

Il aimerait cependant la continuer devant un juge autre que le juge Denis, qui l'a écorché dans un jugement jeudi dernier.

Son avocat, Me Lozeau, a indiqué son intention de déposer une requête en récusation contre le juge Denis.

Après avoir fait l'objet de signalements en Floride durant son escapade hors de la juridiction canadienne, M. Weinberg a fini par venir à bout de la patience du juge Denis. Le magistrat, qui l'a accusé d'outrage au tribunal, a rejeté jeudi dernier une demi-douzaine de requêtes de M. Weinberg, déclarant que « la partie de cache-cache est terminée ». Il a aussi reproché à M. Weinberg « son absence de transparence, ses faux-fuyants, ses demandes de report non motivées (et) ses procédures alambiquées ». Autant de stratégies ayant comme but de gagner du temps, a écrit le juge.

Me Lozeau, tout nouveau au dossier depuis que M. Weinberg a changé d'avocats, a obtenu du juge Denis quelques jours pour préparer diverses procédures. Il a jusqu'à demain après-midi pour demander la récusation, jusqu'à vendredi pour remettre la fameuse liste d'actifs et il doit accompagner M. Weinberg en cour lundi prochain pour l'outrage au tribunal.

Me Lozeau n'a pas voulu dire, hier, où se trouvait son client durant les dernières semaines. Il a indiqué que cela faisait partie des éléments qui justifient l'absence de M. Weinbwerg et qui seront discutés en détail le 6 décembre quand M. Weinberg comparaîtra devant le juge Denis pour se défendre de l'accusation d'outrage au tribunal.

Les deux avocats de Cinar, Mark Schrager et Cara Cameron, du cabinet Davies, Ward, Philips et Vineberg, avaient convoqué un témoin venu de Toronto et étaient prêts à plaider hier une partie de la poursuite. Ils devront attendre jusqu'au 11 décembre. Ils se sont dits mécontents des reports accordés par le juge : « C'est toujours la même histoire, il cherche des délais », a dit Me Schreger, au sujet de M. Weinberg, qui est rentré à Montréal vendredi dernier.

À la prison Parthenais

Me Schreger, qui a souligné le sérieux des accusations d'outrage au tribunal, a plaidé pour que M. Weinberg soit sur le champ condamné à la prison jusqu'à ce qu'il produise la fameuse liste d'actifs. « Il pourrait s'asseoir avec ses comptables à Parthenais et la confectionner », a-t-il, dit, demandant du même coup que le passeport de M. Weinberg lui soit confisqué dès sa détention, « jusqu'à ce qu'il obéisse à la cour ».

Le juge Denis n'a pas retenu les suggestions de Me Schreger. Ce dernier avait observé en cour que M. Weinberg, qui « n'est pas analphabète » et qui « a des ressources », a eu amplement de temps pour préparer sa fameuse liste d'actifs : pour quelqu'un qui dit avoir travaillé toute la fin de semaine, « il n'a pas grand-chose de fait », a-t-il dit.

Me Schreger a plaidé que M. Weinberg aurait dû arriver en cour hier avec, au minimum, une déclaration assermentée déclinant ses excuses pour « l'insulte » que constitue son comportement récent, ainsi qu'une explication de ses absences répétées, sous forme d'une défense aux accusation d'outrage au tribunal qui pèsent sur lui.

Les avocats de Cinar s'étaient vu instruire par la juge d'être prêts, hier matin, à plaider « ex parte » (en l'absence des défendeurs). Me Schreger et Me Cameron s'attendaient donc à plaider hier une fraction (11 millions) des dommages et intérêts réclamés à M. Weinberg et d'autres défendeurs.

« En quoi a-t-on avancé aujourd'hui? Que va-t-il se passer si le 11 décembre M. Weinberg n'est pas là? Ou s'il veut un autre avocat? »