Madame vous demande de passer à l'épicerie, de faire le ménage puis d'aller la chercher au bureau? Monsieur, ne rouspéter surtout pas. Elle pourrait faire bien pire. Comme négocier les termes financiers de votre éventuelle séparation!

Madame vous demande de passer à l'épicerie, de faire le ménage puis d'aller la chercher au bureau? Monsieur, ne rouspéter surtout pas. Elle pourrait faire bien pire. Comme négocier les termes financiers de votre éventuelle séparation!

Chaque année, Me Carole De Lagrave reçoit quelques jeunes couples à son bureau d'Outremont.

Les amoureux filent le parfait bonheur sans s'être embrassés devant parents et amis à l'église ou au Palais de justice. Ils se demandent néanmoins ce qui adviendra de leurs avoirs en cas de séparation. "Les filles consultent souvent sans leur copain, dit l'avocate spécialisée en droit familial. Ça ne se fait pas en cachette: le gars est au courant. Les gens veulent simplement être informés. Ils savent qu'il est presque impossible de passer toute sa vie avec la même personne."

Contrairement aux couples mariés ou unis civilement, les conjoints de fait n'ont pas à payer une pension alimentaire à leur ex-conjoint (sauf pour subvenir aux besoins de leurs enfants). Mais ils ne peuvent pas éviter tous les tracas financiers reliés à une séparation.

Monsieur a payé les dettes d'études de Madame? Il a contribué à l'achat de sa voiture? Il lui a offert un voyage en Europe dans l'espoir de sauver son couple? Il a payé les couches des enfants que Madame a eus d'une autre relation? Il devra vivre avec les conséquences... de sa générosité. "Il est présumé avoir fait des cadeaux en toute bonne foi, dit Me De Lagrave. Ce sont des dons. Il ne peut pas changer d'idée et lui demander de le rembourser."

Les couples qui n'ont pas les mêmes revenus doivent donc savoir dans quelle aventure (financière) ils s'embarquent.

Partenaires d'affaires

"Je dis souvent à mes clients qu'à partir de maintenant, ils deviennent aussi des partenaires d'affaires", dit Me De Lagrave.

Les conjoints de fait ont le luxe de pouvoir négocier les termes de leur éventuelle séparation. "Quand ils achètent leur condo, ils peuvent faire inscrire au contrat les modalités de partage du montant de la vente, dit Me De Lagrave. Si un conjoint contribue à 60%, il peut demander 60%. C'est généralement mieux de procéder ainsi. Ça fait moins de chicane."

Si les rôles s'inversent au fil des ans (et des promotions), ils peuvent entamer une nouvelle ronde de négociations sans passer chez le notaire. Ils n'ont qu'à signer une nouvelle entente.

Une contre-lettre

Dans le jargon juridique, on parle d'une contre-lettre.

Après avoir peaufiné les derniers détails de leur séparation, les deux tourtereaux n'ont plus qu'à commencer leur vie à deux. Et espérer ne pas se retrouver coincés entre deux philosophies d'épargne, deux rythmes de vie, deux habitudes de consommation.

"C'est là que la dynamique du couple entre en ligne de compte, dit Denis Bellemare, planificateur financier à la direction de la gestion des avoirs du Mouvement Desjardins. Certains couples veulent gérer leurs affaires chacun de leur côté.

D'autres veulent tout mettre en commun."

Il faut souvent un ménage à trois pour que les parties fassent des concessions majeures.

"Quand les gens n'ont pas d'enfants ensemble, ils préfèrent gérer leurs finances séparément, dit M. Bellemare. Il faut adopter la théorie des petits pas, faire des changements graduels. Les deux personnes doivent être à l'aise avec leur stratégie financière. Chacun doit y trouver son compte et se permettre des petites victoires."

Un dernier conseil mais non le moindre: ne jamais discuter d'argent quand la mer est houleuse. "Les circonstances doivent être propices au dialogue et à l'échange", dit M. Bellemare.

Et si la mer n'est jamais calme? Peut-être la situation se réglera-t-elle d'elle-même. Par une séparation.

En couple sans le savoir

Après trois ans de vie commune, les amoureux sont dorénavant considérés comme des conjoints. Le cauchemar de tous les gars (et les filles...) qui ont peur de s'engager. À Vos Affaires a une bonne et une mauvaise nouvelles à leur annoncer.

La bonne: la règle des trois ans n'est qu'un mythe tenace. La mauvaise: ils sont peut-être déjà en couple depuis longtemps sans le savoir!

"La règle des trois ans est une légende urbaine très répandue, dit Me Carole De Lagrave. Pour les fins de la séparation de leurs biens communs, un couple ne peut être vieux que de quelques jours. Encore faut-il avoir le temps d'effectuer des transactions communes!" Pour les fins des programmes gouvernementaux, la période de vie commune nécessaire à la formation d'un couple varie selon les lois particulières. "Quand le gouvernement reçoit de l'argent, le délai est généralement court, dit Me De Lagrave. C'est plus long quand le gouvernement doit donner de l'argent."