Le Québec a dit non l'an dernier à un projet éolien de 4,5 milliards $ d'une multinationale allemande, comprenant une usine consacrée à la conception et à la production d'un nouveau modèle d'éoliennes nordiques.

Le Québec a dit non l'an dernier à un projet éolien de 4,5 milliards $ d'une multinationale allemande, comprenant une usine consacrée à la conception et à la production d'un nouveau modèle d'éoliennes nordiques.

Siemens projetait en effet d'investir pour construire l'usine au Saguenay-Lac-Saint-Jean, de même qu'un centre de recherche dans la région de Montréal, à proximité des grandes écoles de génie, dans le cadre d'un mégaprojet de 3000 MW dans le Grand Nord.

La proposition, dont Le Devoir a obtenu copie, a été soumise par Siemens le 20 avril 2005 au gouvernement, notamment au ministre des Ressources naturelles et de la Faune, Pierre Corbeil.

Le matin même, Siemens présentait brièvement son projet au pdg d'Hydro-Québec, Thierry Vandal. Les 3000 MW auraient été produits autour du bassin hydroélectrique de LG-4, à la Baie-James, ainsi que dans la région de Manicouagan, sur la Côte-Nord.

Ce projet aurait généré un investissement privé de 4,5 milliards $ et aurait produit 9 TWh, ce qui en faisait une solution de rechange au détournement de la rivière Rupert, dont Hydro-Québec escompte tirer 8,5 TWh.

Québec a finalement refusé d'aller de l'avant avec ce projet même si la multinationale offrait en retour de faire du Québec son centre de production éolienne pour l'ensemble du marché nord-américain, lequel devrait tripler de volume d'ici 2020.

L'attaché de presse du ministre Corbeil, Mathieu Saint-Amant, a déclaré au Devoir que le gouvernement et Hydro-Québec avaient préféré aller de l'avant avec un processus d'appel d'offres pour 2000 MW, plutôt que de négocier l'exclusivité de la fourniture d'équipement en échange de l'implantation de cette multinationale au Québec.

L'appel d'offres d'Hydro-Québec en éolien a été officiellement lancé le 29 juin suivant. Siemens n'y participera pas, selon les sources du Devoir.

En août dernier, la multinationale annonçait la construction de sa base industrielle nord-américaine en éolien en Iowa, à proximité d'un des meilleurs gisements éoliens après ceux du Québec.

Le 10 janvier dernier, Siemens Wind Power révélait que son carnet de commandes en Iowa atteignait déjà 1400 MW pour une valeur de 1,7 milliard $ US, ce qui se serait ajouté aux 400 à 500 machines prévues chaque année pour le projet nordique québécois.

Ce projet, qui misait sur la mise au point d'une éolienne capable de démarrer après des dizaines d'heures d'arrêt à des froids pouvant atteindre les moins 50 degrés C, aurait été totalement équipé de ce nouveau modèle "arctique".

Siemens était prête à verser des royautés à Hydro-Québec pour la vente de ce modèle ailleurs dans le monde. Mais surtout, la multinationale offrait à Québec de diminuer le coût de revient de l'électricité éolienne à 6 cents le kilowattheure, ce qui est inférieur au coût de 6,5 cents le kWh obtenu lors du premier appel d'offres de 1000 MW éoliens, en 2002.

Pour Siemens, s'installer au Saguenay-Lac-Saint-Jean offrait deux avantages. D'abord, la proximité des plus grands gisements éoliens de l'Amérique du Nord lui aurait fourni une base à long terme.

Ensuite, le transport des machines géantes aurait pu se faire par navires ou par barges à partir du fjord du Saguenay vers d'autres pays ou par l'entremise du fleuve Saint-Laurent et les Grands Lacs au golfe du Mexique, en passant par le Mississippi.

L'usine intégrée saguenéenne, qui aurait produit sur place nacelles, tours et pales, serait donc devenue la vitrine technologique nord-américaine de Siemens et sa base en Amérique.

La multinationale allemande prévoyait même de faire affaires avec d'autres entreprises québécoises de composantes d'éoliennes en raison des hauts niveaux de production envisagés, qu'elle situait entre 600 et 800 MW par année à sa nouvelle usine.

Ce projet, selon Siemens, aurait "confirmé la place du Québec comme leader nord-américain dans la production d'énergie verte", aurait généré des investissements de 4,5 milliards $, aurait assuré pendant sept ans un minimum de 600 emplois directs en région ainsi que 2000 emplois permanents dans des secteurs connexes et aurait placé le Québec en tête de la production éolienne en Amérique du Nord.