«Il est temps de croire en l'Europe.»

«Il est temps de croire en l'Europe.»

C'est le message qu'a lancé, jeudi à Montréal, Audrey Childe-Freeman, économiste spécialisée dans la Zone euro, pour CIBC Marchés mondiaux.

Alors que le gouvernement américain annonce une révision à la baisse de sa croissance économique, à 0,6% à un rythme annualisé pour le premier trimestre de l'année, la locomotive européenne continue à filer tout près des 3%.

«Nous nous attendons à une progression au-delà de la croissance potentielle pour la deuxième année consécutive et à un dépassement de l'économie américaine pour la première fois depuis 2001», avance l'économiste londonienne.

L'an dernier, les pays européens ont affiché une croissance de 2,8%. Pour cette année et pour l'an prochain, la spécialiste s'attend à des avancées respectives de 2,7% et 2,6%.

Au cours des prochains trimestres, l'Espagne continuera à mener la marche, suivie des Pays-Bas et de l'Allemagne.

Pour le moment, les exportations nettes sont le principal moteur mais Mme Childe-Freeman constate que la consommation des ménages est en train de prendre le relais.

Cela dit, précise-t-elle, «l'amélioration marquée du marché du travail représente un risque inflationniste».

Pour l'instant, le taux d'inflation est sous la barre des 2% mais la spécialiste s'attend à une accélération des prix d'ici la fin de l'année.

Dans ces conditions, Audrey Childe-Freeman prévoit au moins deux hausses de taux supplémentaires, en juin et en septembre, par la Banque centrale européenne.

«Ensuite, on devrait voir une politique attentiste, pense-t-elle. Étant donné le ralentissement de l'économie américaine, la perspective est totalement différente pour la Fed qui entrera dans une phase de baisse des taux avant la fin de l'année.»

Cette toile de fond fait en sorte que «l'Europe a plus à gagner» du point de vue des actions.

«À priori, le marché boursier européen dispose d'un meilleur positionnement, dit-elle. L'économie va bien et elle est à même de mieux affronter un ralentissement de la demande internationale.»

Cela dit, précise-t-elle, les Bourses européennes ne sont pas à l'abri d'un choc de l'économie mondiale.

À son avis, le marché boursier allemand est particulièrement intéressant pour les investisseurs.

Ses importantes réformes lancées au cours des dernières années, notamment sur le marché du travail, commencent à porter fruits. Cela se traduit par une évolution favorable de l'emploi.

Selon elle, le secteur de la consommation devrait rattraper le temps perdu. «Il faut s'attendre à une bonne performance de ce côté», dit-elle.

Elle s'intéresse aussi aux entreprises allemandes spécialisées dans l'immobilier. «Je suis plus sceptique pour le marché immobilier espagnol qui montre des signes de correction après avoir bien fait, ajoute-elle.

Audrey Childe-Freeman garde aussi un oeil sur le marché boursier français avec l'arrivée du nouveau président Nicolas Sarkozy.

«C'était le candidat de la communauté des investisseurs, rappelle-t-elle. À moyen terme, l'impact des réformes qu'il souhaite entreprendre sera positive, mais il faut être patient.»

Parmi les mesures annoncées, le président français souhaite mettre en place une approche «adaptée» de la loi sur la semaine de travail de 35 heures.

«Ce ne sera plus un maximum, mais un minimum, explique l'économiste. Dans le cas des heures supplémentaires consenties par les travailleurs, les employeurs seront exemptés des charges sociales.»

De façon générale, l'économiste penche aussi du côté des titres financiers européens.

«Les banques et les assureurs bénéficient d'un environnement favorable, constate-t-elle. Sans compter que la restructuration des sociétés financières les rendent plus compétitives.»

Cela dit, l'économiste remarque que les entreprises semblent en mesure de faire face, pour l'instant, à la vigueur de l'euro.

«Évidemment, si la devise s'apprécie de façon plus prononcée cela risque d'être problématique», signale Audrey Childe-Freeman.