Capital garanti, distributions régulières, traitement fiscal avantageux, potentiel de rendement supérieur... La nouvelle vague de billets à capital protégé est conçue pour toucher le coeur des épargnants. Mais attention aux petits caractères de ces billets doux!

Capital garanti, distributions régulières, traitement fiscal avantageux, potentiel de rendement supérieur... La nouvelle vague de billets à capital protégé est conçue pour toucher le coeur des épargnants. Mais attention aux petits caractères de ces billets doux!

La proposition est séduisante, surtout pour les investisseurs plus craintifs qui ne veulent pas plonger à la Bourse sans veste de sauvetage.

Les billets à capital garanti leur assurent de récupérer leur dépôt initial à l'échéance, tout en leur faisant miroiter des rendements supérieurs aux taux d'intérêt des obligations... si faibles en ce moment.

Les épargnants font le saut. Au Canada, les actifs investis dans les billets ont grimpé de 1,9 milliard en 2001 à 13,8 milliards en août 2006, selon la firme de recherche en finance Investor Economics.

L'industrie des billets bourgeonne. On les trouve partout: non seulement dans les firmes de courtage, mais aussi aux comptoirs des banques.

Les émetteurs structurent des produits de plus en plus sophistiqués. La nouvelle génération de billets est conçue pour faire vibrer bien des cordes sensibles chez les investisseurs, plus particulièrement les retraités.

De vrais portefeuilles

«Il y a quelques années, les billets permettaient simplement d'avoir une exposition à un marché précis, avec une garantie de capital. Mais aujourd'hui, on offre des portefeuilles diversifiés», explique Yanic Chagnon, directeur principal, Solutions d'investissements, à la Banque Nationale.

Grâce à la «magie» des options et d'autres produits dérivés, les possibilités sont infinies.

Par exemple, la Banque Nationale distribue présentement le billet SMART, qui permet aux épargnants d'obtenir le meilleur rendement parmi trois portefeuilles diversifiés (actions, obligations, matières premières).

L'un des portefeuilles met davantage l'accent sur les États-Unis, l'autre sur l'Europe et le dernier sur l'Asie. Lequel connaîtra la meilleure performance dans le futur? Personne ne le sait. Mais l'épargnant est assuré d'obtenir le rendement le plus élevé à l'échéance, dans huit ans. Le meilleur des trois mondes!

Et quel investisseur n'a jamais rêvé d'investir, année après année, dans le pays ou l'actif qui a été le plus payant?

Dans cet esprit, plusieurs billets utilisent une stratégie qui sélectionne, à la fin de chaque année, l'indice qui a obtenu le meilleur rendement à l'intérieur par exemple d'un panier de huit indices. Chaque année, l'indice gagnant est ensuite retiré du panier, et ainsi de suite jusqu'à l'échéance dans huit ans.

Cette stratégie permet de profiter des cycles du marché et d'éviter les corrections qui suivent souvent les années exceptionnelles. Tout ça grâce aux options!

En fait, beaucoup de billets sont de véritables portefeuilles avec un style d'investissement particulier, des catégories d'actifs diversifiées, des mécanismes de rééquilibrage automatique... Presque des fonds communs!

Nouvel enrobage pour les fonds

Et d'autre part, beaucoup de familles de fonds communs utilisent maintenant les billets à capital protégé pour présenter aux investisseurs leurs produits dans un nouvel emballage.

«Les billets liés à des fonds ont gagné beaucoup d'intérêt et de momentum ces dernières années», confirme Jimmy Chu, analyste chez Investor Economics.

Question de titiller les retraités qui ont besoin de revenus réguliers pour vivre, les sociétés de fonds créent des billets qui versent des revenus (voir tableau).

Il y a quelques jours, par exemple, la famille de fonds Dynamique a lancé trois nouveaux billets baptisés Portefeuilles de revenu QuasiRetraite, avec des échéances de 15, 20 ou 25 ans.

Ces billets sont fondés sur un portefeuille de sept fonds Dynamique. Le portefeuille s'équilibre automatiquement pour viser une répartition d'actifs plus prudente, au fur et à mesure que le détenteur vieillit.

Mais surtout, les billets Dynamique versent des revenus de 6,6% par année. Les revenus ne sont pas considérés comme du gain en capital ou des intérêts, mais plutôt comme un remboursement du capital à l'investisseur. Ainsi, il n'y a pas d'impôt à payer sur le champ.

En fait, la facture d'impôt est reportée à plus tard. Aux fins fiscales, chaque remboursement de capital diminue le coût d'achat du billet. À l'échéance, le gain en capital s'en trouvera gonflé. Qu'à cela ne tienne: il est toujours préférable de reporter l'impôt à plus tard!

Mais il faut bien l'avouer: avec toutes ces nouvelles caractéristiques, l'architecture financière des billets s'est complexifiée.

Pour éviter les déceptions, les investisseurs doivent poser les bonnes questions (voir autre texte) et lire en détail les brochures d'information.

Malgré tout, les billets sont tellement différents les uns des autres qu'ils demeurent difficiles à comparer, d'autant plus qu'il n'existe aucune base de données qui collige et synthétise l'information sur l'ensemble des billets, comme il en existe pour les fonds ou les actions.

10 QUESTIONS CRUCIALES

1- Avez-vous besoin de protégé votre capital?

Sur de longues périodes, la probabilité que vos placements baissent est mince. La protection du capital est donc plutôt d'ordre psychologique, surtout si le billet est fondé sur des actifs très diversifiés.

Mais la garantie n'est peut-être pas superflue si elle vous permet de dormir sur vos deux oreilles. Elle peut aussi être utile pour investir dans un marché très pointu ou très spéculatif, dont les risques de baisse à long terme sont significatifs.

Par exemple, les investisseurs qui avaient investi au Japon à l'aide d'un billet à capital protégé ont pu récupérer leur mise, même si l'indice Nikkei était en baisse de 25%.

2- Y a-t-il un rendement minimal garanti?

Dans la plupart des billets, seul le capital est garanti. Pas le rendement.

«Le profit réalisé sur votre placement peut être peu élevé, voir inexistant. Vous serez alors dans une position encore moins avantageuse que si vous aviez acheté un certificat de placement garanti», préviennent les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) dans un document disponible sur le web (www.csa-acvm.ca).

Mais certains billets garantissent un rendement minimum. D'autres permettent même de cristalliser les profits pendant la période de détention.

Entre autres, la firme torontoise One Financial a lancé 10 billets Profit Lock-In. Durant les 8,75 années de détention, l'investisseur peut changer de billet, sans frais. Et à tout moment, il peut «garantir» la valeur de son placement. Si le billet atteint un sommet, mais redescend par la suite, il touchera le montant le plus élevé à l'échéance.

3- Qui fournit la garantie?

Cela pose peu de problèmes, car les billets sont généralement garantis par des banques, des compagnies d'assurance ou des sociétés d'État qui ont une excellente cote de crédit. Mais sachez qu'en cas de faillite, la garantie ne vaudra peut-être plus rien. De plus, les billets sont rarement couverts par la Société d'assurance-dépôts du Canada ou par l'Autorité des marchés financiers du Québec.

4- Quelle est l'échéance du billet?

Les billets ont des échéances de 5 à 25 ans. Plus l'échéance est éloignée, plus les risques de pertes sont minces... moins la garantie du capital initial a de valeur.

5- Aurez-vous besoin de l'argent?

On peut revendre la plupart des billets avant l'échéance. Mais on perd la garantie, on paie des frais de rachat, et on obtient une valeur marchande dépréciée. Vaut mieux les acheter dans la perspective de les conserver jusqu'à bout. Assurez-vous de ne pas avoir besoin de l'argent, surtout si l'échéance est lointaine.

À noter: En cas de décès, la protection du capital disparaît si les héritiers sont forcés de vendre pour liquider la succession. Ils doivent vendre les billets à la valeur marchande.

6- Quelles sont les conditions de rachat?

Généralement, les billets imposent des frais de rachat aux investisseurs qui s'en départissent avant l'échéance. Ces frais atteignent près de 7% au tout début, mais diminuent avec les années.

En outre, l'investisseur qui vend en cours de route n'obtiendra pas le même rendement que l'actif sous-jacent. Par exemple, l'investisseur qui achète un billet lié à la Bourse de Toronto ne pourra pas encaisser son rendement en entier si la Bourse grimpe de 30% dès la première année. La valeur marchande de son billet ne reflétera peut-être que la moitié de ce rendement.

7- Quel est l'actif sous-jacent?

Comme le rendement découle d'un actif sous-jacent, il est crucial d'en étudier le potentiel. S'il s'agit d'un fonds, on peut consulter l'historique. S'il s'agit de l'indice boursier d'un pays ou d'une matière première, il faut s'attarder aux perspectives.

8- Quel est le potentiel de rendement?

Les investisseurs n'ont pas toujours droit au plein potentiel de rendement de l'actif sous-jacent. Certains billets impliquent que le rendement plafonne s'il dépasse un certain niveau. D'autres versent aux investisseurs seulement un pourcentage du rendement de l'actif sous-jacent. D'autres ne donnent que l'appréciation du capital, pas les dividendes.

9- Comment est structuré le billet?

Il y a deux méthodes pour garantir le capital d'un billet:

Options: Les billets liés à des indices boursiers utilisent généralement des options. Le concepteur du billet (d'une valeur de 100$) utilise environ 70$ pour acheter une obligation qui vaudra 100$ à l'échéance, en comptant les intérêts. Ainsi, l'investisseur est certain de retrouver son capital.

Avec le reste de la mise initiale (environ 30$), le concepteur du billet investit à la Bourse, en utilisant des options qui, grâce à leur effet de levier, permettront d'obtenir le rendement de l'actif sous-jacent.

Les détracteurs des billets arguent que cette recette n'est pas si compliquée, et que les investisseurs peuvent la préparer eux-mêmes, à moindres frais.

Coussin (CPPI): Les billets liés à des fonds fonctionnent différemment. Ils investissent tout le capital (ex: 100$) dans le fonds, mais calculent régulièrement le montant nécessaire (ex: 70$ au départ) pour acheter une obligation qui permettrait de garantir le capital à l'échéance. Ils s'assurent de toujours conserver un coussin suffisant.

Mais si le fonds baisse subitement, juste après l'émission, le coussin peut disparaître et l'émetteur ne pourra plus investir dans le fonds. Le fonds aura beau remonter par la suite, l'épargnant n'en profitera pas ou beaucoup moins.

10- Quels sont les frais qui en découlent?

Les billets liés à des fonds perçoivent des frais de gestion annuels qui s'établissent à environ 3%. La protection du capital forme environ 0,5 à 0,8% de ces frais.

Pour les billets liés à des indices qui utilisent des options, l'émetteur prélève les frais à l'émission. On peut l'estimer l'ensemble de la structure de frais à environ 7% de l'actif initial.