L'ex-vice président aux finances de Norbourg, Éric Asselin, a reçu un paiement de 120 000 $ de Vincent Lacroix alors qu'il était toujours enquêteur à la Commission des valeurs mobilières du Québec.

L'ex-vice président aux finances de Norbourg, Éric Asselin, a reçu un paiement de 120 000 $ de Vincent Lacroix alors qu'il était toujours enquêteur à la Commission des valeurs mobilières du Québec.

Voilà un des éléments qui ressortent d'une série de poursuites qui ont été intentées hier par le syndic Gilles Robillard, de RSM Richter, contre sept personnes impliquées dans le scandale Norbourg.

Éric Asselin a été enquêteur à la CVMQ (maintenant l'Autorité des marchés financiers) avant d'être engagé par Norbourg en mars 2002.

Or, selon la poursuite, M. Asselin a touché un premier chèque de 120 000 $ deux semaines plus tôt, soit le 25 février. Et sa démission a été effective le 7 mars, a déclaré hier à La Presse Affaires Frédéric Alberro, porte-parole de l'AMF.

Ce paiement et d'autres subséquents sont " une partie du prix du silence d'Éric Asselin et de sa rétribution pour sa participation aux malversations financières ayant eu cours au sein du Groupe Norbourg ", affirme le syndic. Mais selon M. Asselin, joint hier au téléphone, les 120 000 $ ne sont rien de plus et rien de moins qu'un " boni de signature " accordé par Norbourg.

Tout aussi étonnant: on apprend dans les documents déposés en Cour que M. Asselin aurait été recruté par Norbourg dès l'automne 2001, soit plusieurs mois avant de quitter son poste d'enquêteur à la CVMQ.

" Selon les informations obtenues par le syndic, Éric Asselin avait alors requis de Vincent Lacroix que son emploi ne débute officiellement au sein du Groupe Norbourg qu'à compter du mois de mars 2002, afin qu'il puisse compléter l'année 2001 au sein de la Commission des valeurs mobilières du Québec et qu'il puisse ainsi toucher de cette dernière le boni qu'il pouvait anticiper pour l'année 2001 et qui ne serait versé qu'au début de l'année 2002 ", peut-on lire dans la poursuite du syndic Robillard.

" Le 25 février 2002, soit avant même le début de son entrée en fonction officielle au sein du Groupe Norbourg, Éric Asselin s'est fait remettre une somme de 120 000 $ par voie d'une traite de banque tirée sur le compte personnel de Vincent Lacroix ", ajoute le syndic.

M. Asselin, principal présumé complice de M. Lacroix dans l'élaboration de faux documents destinés à tromper l'Autorité des marchés financiers, a vu hier plus que doubler la réclamation à son endroit.

L'été dernier, il avait déjà reçu une réclamation de 330 000 $ du syndic Robillard. Ce paiement reçu de Norbourg avait servi à acheter sa maison de Beauport, qu'il possède avec sa conjointe Chantal Thibodeau. M. Asselin a reçu hier deux autres poursuites distinctes, qui font passer à 829 727 $ les réclamations totales contre lui, sa société de consultation Confomia et sa femme.

M. Asselin est le délateur qui a permis à la Gendarmerie royale du Canada de mettre à jour, en août 2005, le détournement de fonds chez Norbourg.

L'ancien candidat libéral fédéral Michel Fragasso, le vice-président de Norbourg Serge Beugré, de même que l'avocat en transactions offshore Robert Hindle, de Montréal, sont parmi les sept personnes qui ont été frappées hier par neuf réclamations judiciaires déposées en vrac par le syndic Gilles Robillard.

Le comptable Rémi Déchambault, qui a approuvé les états financiers des fonds Norbourg durant quatre ans, est aussi visé, de même qu'un représentant, Denis Robitaille.

Le total des sommes réclamées en Cour s'élève à près de 5 millions de dollars, des sommes versées par Norbourg et reçues par les personnes visées " sans aucune considération, sans droit, illégalement et en fraude des droits des créanciers ", allèguent les poursuites.

Dépenses électorales

Michel Fragasso et sa compagnie, Investissement Fragesco, de Québec, sont intimés de rembourser deux sommes totalisant 300 000 $. M. Fragasso était président du conseil des Fonds Evolution, vendus à Norbourg par la Caisse de dépôt et placement du Québec en 2004. M. Fragasso, qui était aussi président de l'Institut des fonds d'investissement du Canada, a accepté deux chèques de 150 000 $ de Norbourg.

Selon une des deux poursuites, la firme Ascencia (à l'époque Norbourg International) lui a versé le 9 février 2005 150 000 $ " afin d'aider financièrement M. Fragasso qui, au printemps précédent, s'était lancé dans la campagne électorale fédérale et avait perdu ses élections et son dépôt et devait assumer des dépenses importantes ".

L'autre chèque de 150 000 $ aurait été versé le 2 mars 2004 par l'entremise d'un compte fantôme de Norbourg Gestion d'Actifs. Dans un article publié par La Presse en novembre 2005, M. Fragasso avait indiqué que ce chèque de 150 000 $ avait été encaissé en mars 2004, le même mois que son assemblée d'investiture libérale dans la circonscription de Louis-Saint-Laurent, à Québec. Mais ce paiement n'était pas lié à son saut en politique, avait-il ajouté.

L'ancien bras droit de M. Lacroix chez Norbourg, le vice-président et stratège financier Serge Beugré, se voit réclamer pour sa part 656 558 $. Sa firme de consultation, Ivoire Finance, est aussi visée.

Une multitude de versements au fil des ans, allant de 3000 $ à 150 000 $, et provenant de trois filiales de Norbourg et de M. Lacroix personnellement, sont contestés par le syndic Robillard.

Le comptable Rémi Deschambault se fait réclamer 954 000 $, tandis qu'un représentant, Denis Robitaille, se fait réclamer 515 000 $.

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