La population du Québec vieillit. Faut-il s'en inquiéter? Nos collaborateurs de HEC Montréal poursuivent leur analyse des effets de ce phénomène sur la gestion des organisations publiques et privées.

La population du Québec vieillit. Faut-il s'en inquiéter? Nos collaborateurs de HEC Montréal poursuivent leur analyse des effets de ce phénomène sur la gestion des organisations publiques et privées.

Nous sommes tous préoccupés par l'efficacité et la viabilité de notre système de santé public. Les dépenses totales de santé croissent plus vite que l'économie de la province. Et encore, il n'y a pas que les coûts! Sur le plan démographique, de 13 % en 2001, la proportion des personnes de 65 ans et plus atteindra 27 % en 2031. Serons-nous capables d'adapter le système aux besoins de cette clientèle en croissance?

La prévalence accrue du diabète, de l'hypertension et d'autres maladies chroniques compte parmi les facteurs qui entraînent la nécessité de revoir l'organisation des soins de santé au Québec.

À ce problème vient s'ajouter le fait qu'il est de plus en plus difficile de retenir les médecins dans les régions rurales et éloignées. En raison de la baisse du nombre de médecins en région, les patients sont souvent tenus d'effectuer des déplacements coûteux vers les milieux urbains afin d'obtenir des traitements spécialisés ou parfois même un simple diagnostic.

La télésurveillance à domicile

Une façon d'envisager l'amélioration du système de santé et d'en réduire les coûts est d'accroître les efforts au chapitre de la prévention et du suivi des maladies. À ce chapitre, les nouvelles technologies de l'information peuvent devenir un levier puissant.

C'est dans ce contexte qu'un projet de télésurveillance à domicile fut réalisé au Service régional de soins à domicile de l'hôpital Maisonneuve-Rosemont. Ce centre dispense des soins spécialisés aux adultes souffrants de problèmes pulmonaires chroniques, tel que l'emphysème.

Le projet visait à mettre en pratique un suivi à distance intensif et continu haussant la capacité d'intervention et de renforcement auprès du patient. Chaque patient était muni d'un Webphone avec écran tactile et modem intégrés (New ITTM). Est-ce une solution trop technologique pour cette clientèle? Regardons donc l'expérience d'un patient participant à ce programme et les résultats obtenus.

Comment ça marche?

Pour chacun des patients, un protocole de suivi clinique individualisé est préalablement programmé dans l'appareil puis enseigné au patient lors d'une première rencontre avec l'infirmière. Le patient doit alors saisir et transmettre quotidiennement des données concernant sa consommation d'oxygène, ses symptômes et la médication consommée.

L'information transmise par Internet est consultée par une infirmière qui peut suivre à distance l'état de santé des patients. De surcroît, le système analyse les données transmises et il réagit automatiquement à celles qui paraissent anormales.

Ainsi, le système permet de générer des alertes, à la fois au patient et au personnel clinique, lorsqu'on détecte qu'un patient n'a pas passé un test à la date prévue ou encore qu'il n'a pas adhéré à sa médication. Dans de telles situations, le système transmet également au patient des conseils sur la conduite appropriée.

Parallèlement, l'infirmière peut alors suivre à distance les réactions du patient et, si elle le juge à propos, intervenir directement en lui téléphonant ou même en informer le médecin traitant.

Afin de déterminer les effets attribuables au projet, une recherche fut menée pendant six mois. Les résultats obtenus corroborent ceux d'études similaires ayant analysé l'efficacité de la télésurveillance à domicile chez les patients souffrant de maladies pulmonaires.

D'abord, malgré leur âge avancé, les patients ont rapidement accepté et maîtrisé l'utilisation du Webphone. Le programme de télésurveillance à domicile, en comparaison au suivi traditionnel à domicile, a offert des bénéfices importants. En particulier, nous avons noté une diminution significative du nombre de visites à domicile par patient et du temps perdu sur la route par l'infirmière. Mais surtout, nous avons constaté une réduction du nombre d'hospitalisations par patient.

Sur le plan économique, le projet pilote a permis de dégager un bénéfice net de 12 % par rapport au programme traditionnel, un résultat pour le moins fort encourageant. Qui plus est, les patients ont déclaré se sentir plus en sécurité.

Il est donc permis de croire que de tels programmes permettront de mieux répondre aux besoins de la population tout en assurant l'accessibilité des soins en région éloignée.

Dans un contexte de restructuration où le virage ambulatoire et les services à domicile représentent le secteur en plus forte expansion, la télésurveillance à domicile pourrait, si elle est soigneusement planifiée, devenir un service de routine pratique, économique et apprécié par tous.

L'auteur est titulaire de la Chaire de recherche du Canada en TI dans le secteur de la santé HEC Montréal.