Le plan de Telus (T.T) de fusionner avec BCE (T.BCE) ne recevrait pas l'approbation des autorités réglementaires, soutient Michael Sabia, président et chef de la direction de BCE.

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Lors d'une rencontre avec La Presse Affaires mercredi, Michael Sabia a donné des détails sur le processus de vente de l'entreprise. Ainsi, le conseil d'administration de BCE a notamment vérifié la viabilité du plan de Telus d'avaler Bell en maintenant intacte la liste de clients, notamment dans le secteur du sans fil. Or, un tel plan n'avait qu'une chance sur cinq d'être approuvée par le Bureau de la concurrence, selon les trois experts consultés par le conseil.

Samedi dernier, la maison-mère de Bell Canada a accepté l'offre d'achat du consortium dirigé par Teachers Private Capital, filiale de la caisse de retraite des enseignants de l'Ontario. Le consortium offre 42,75 $ par action pour acheter BCE, soit 34,8 milliards de dollars (51,7 milliards en incluant les dettes).

Telus avait décidé de se désister à la dernière minute, invoquant les lacunes du processus de soumission. À la lumière des propos tenus hier par Michael Sabia, il est loin d'être certain qu'une offre alléchante de Telus aurait reçu l'assentiment du conseil de BCE.

«Ce n'est pas que nous étions négatif sur la possibilité de mettre les deux entreprises ensemble (Bell et Telus). Mais la question était plutôt : comment offrir de la vraie valeur aux actionnaires. Si l'offre de quelqu'un est sujette à un nombre important de risques réglementaires, alors cette offre vaut moins qu'elle ne le paraît», a expliqué M. Sabia, qui a répondu en français durant une bonne partie de l'entrevue.

Pour BCE, la forte probabilité de réalisation d'une offre faisait partie des trois critères de sélection, avec la maximisation de la valeur aux actionnaires et la grande qualité de financement.

Malgré la fin officielle des enchères, Telus pourrait revenir à la charge avec une offre hostile. Le 21 juin, l'entreprise a proposé de fusionner les deux sociétés sans se départir de clients. Dans le secteur du sans fil, la fusion donnerait 60 % du marché au tandem Telus-Bell. Une telle diminution de la concurrence pourrait avoir des effets haussiers sur les prix.

Michael Sabia constate que le plan de Telus n'aurait pas seulement eu des problèmes réglementaires pour le secteur du sans fil, mais également dans le secteur des grandes organisations (entreprises et gouvernement).

La fusion telle que proposée n'aurait pas été avantageuse pour «nos clients et pour les consommateurs». Dans le monde, dit M. Sabia, aucun pays n'a accepté de réduire de 3 à 2 le nombre d'entreprises dans le secteur du sans fil. «Si on peut avoir des accommodements pour respecter les règles antimonopoles, c'est différent. Mais la position du gouvernement était absolument clairs : la loi est la loi», dit-il.

Concernant le processus d'enchères, Michael Sabia affirme qu'il n'agissait jamais de son propre chef pour intervenir auprès des parties intéressées, mais avec le mandat du conseil d'administration.

L'échéance du 26 juin pour remettre les offres, dit-il, a été fixée quelques semaines plus tôt, en juin. Certains auraient préféré plus tôt, comme le tandem CPP-KKR, d'autres probablement plus tard, comme Telus.

Pourquoi ne pas avoir accepté d'offrir plus de temps à Telus ? «C'est toujours une question d'équité, un effort de notre conseil d'administration pour établir un terrain de jeu égal pour tous», a dit M. Sabia, qui rappelle qu'un exploitant comme Telus a besoin de moins de temps pour faire une vérification diligente qu'une firme de capital privé, puisqu'elle connaît bien le secteur.

«Souvenez-vous que dans un processus comme celui-là, il y a toujours des tactiques de pression de tous les groupes pour obtenir un avantage. Donc c'est normal qu'il y a ait eu un débat sur la date», dit M. Sabia, selon qui l'important, en bout de course, c'est le prix obtenu.

Toujours concernant Telus, Michael Sabia affirme que BCE n'a jamais refusé à l'entreprise l'accès au dossier de Téléglobe, l'ex-filiale de BCE qui fait l'objet de lourdes poursuites. «Nous avons fait une offre à Telus pour le dossier de litiges concernant Téléglobe. Et ils n'ont rien fait. Mais d'après nous, Téléglobe n'est pas une question très sensible, comme peut l'être la stratégie de prix de Bell pour un client comme Bombardier», dit M. Sabia.

Le gestionnaire affirme qu'en devenant privé, Bell n'aura plus les contraintes de résultats trimestriels à publier pour les actionnaires en Bourse. Les nouveaux propriétaires ont des exigences de rendements à plus long terme et sont moins inquiets par une baisse momentanée des profits.

«Le plus gros changement en devenant privé est l'échéancier pour les investissements. Dans une entreprise en Bourse, il faut être vraiment conscient des résultats trimestre par trimestre. Dans une entreprise privée, ce n'est plus le cas. On peut adopter des perspectives sur trois, quatre, cinq ou six ans pour obtenir des rendements.»

Michael Sabia affirme qu'il n'a jamais été question d'établir le siège social ailleurs qu'à Montréal. Durant le processus de mise aux enchères, les réunions du comité stratégique se sont tenues tantôt à Montréal, tantôt à Toronto, mais les réunions du conseil d'administration ont toujours eu lieu à Montréal.

Pendant les enchères, dit le PDG de BCE, «le défi de notre comité stratégique a été de créer de la concurrence, de maintenir une tension créatrice de valeur», dit-il.

Cette tension s'est maintenue jusque dans la nuit du 29 au 30 juin, où Teachers a dû bonifier son offre d'une quelconque façon pour obtenir l'assentiment de BCE, vers 6 h samedi matin.