Une semaine après la fin du party des fiducies de revenu, les détenteurs de parts ont toujours mal à la tête. La valeur du sous-indice des fiducies continue à perdre des plumes à la Bourse de Toronto.

Une semaine après la fin du party des fiducies de revenu, les détenteurs de parts ont toujours mal à la tête. La valeur du sous-indice des fiducies continue à perdre des plumes à la Bourse de Toronto.

Les investisseurs n'ont cependant pas tous la mine basse, loin de là. L'indice S&P/TSX, qui avait encaissé mercredi dernier son pire recul depuis la mi-2004, a effacé toutes ses pertes en une semaine, grâce aux gains d'autres secteurs.

Le 31 octobre dernier, après la fermeture des marchés, le ministre fédéral des Finances a provoqué une onde de choc en décrétant la fin de l'avantage fiscal dont bénéficient les fiducies de revenus. Au lendemain de son annonce, le sous-indice des fiducies a dégringolé de 12,4%, rayant de la carte l'équivalent de 24 milliards de dollars en capitalisation boursière.

Une semaine plus tard, le S&P/TSX a repris du tonus. Il a clôturé à 12378 points hier, en hausse de 0,27% par rapport à la fermeture du 31 octobre. Le sous-indice des fiducies de revenu, lui, a terminé hier en baisse de 12,71% par rapport au 31 octobre.

"Les fiducies ont bénéficié d'un avantage fiscal substantiel qui est maintenant disparu, alors cette prime (sur le cours des parts) ne reviendra jamais", explique l'économiste David Wolf, de Merrill Lynch, joint à Toronto.

Même si la fête est finie, les fiducies pourraient remonter légèrement en Bourse d'ici 2011, moment où elles cesseront de bénéficier du congé fiscal octroyé par Ottawa pour atténuer l'impact de sa nouvelle loi.

Pour satisfaire les investisseurs et voir leurs titres s'apprécier en Bourse, elles devront toutefois revenir au b.a.-ba de la saine gestion, ont répété tous les experts que nous avons consultés.

"On revient un peu à la réalité d'avant: les gens vont devoir regarder les entreprises qui peuvent assurer leur croissance, réinvestir et qui ont la possibilité d'augmenter leurs dividendes", a souligné Denis Durand, associé principal chez Jarislowsky Fraser, pendant un entretien téléphonique.

La fin des fiducies

La conversion d'entreprises en nouvelles fiducies de revenu est désormais impensable, car seules celles formées avant le 31 octobre dernier bénéficieront du congé d'impôt jusqu'en 2011 accordé par le ministre Flaherty. Déjà, Bell et Telus, qui avaient annoncé cet automne leurs transformations prochaines, remettent fortement en question ce geste.

CI Financial Fiducie de revenu, deuxième société canadienne de fonds communs de placement, a même annoncé sa reconversion en société par actions à la fin de 2010. Un geste qui sera maintes fois imité, croit Denis Durand.

"J'ai moi-même fait mes enquêtes auprès de fiscalistes, et ils disent que c'est plus facile de se reconvertir en corporation qui paie des impôts que ça peut l'être de se convertir en fiducie de revenu."

Christopher Sears, vice-président et directeur adjoint à la recherche chez MacDougall, MacDougall & MacTier, va plus loin: il prévoit carrément la disparition des fiducies de revenu en 2011. "C'est comme un congé fiscal, elles vont en profiter. Mais après quatre ans, je pense qu'il n'y aura plus de fiducies (...) il n'y aura pas d'avantages."

Malgré la fermeté d'Ottawa dans sa décision de stopper la prolifération des fiducies de revenu, les représentants de ces industries ne lâchent pas le morceau. Dans une lettre envoyée hier à La Presse, George Kesteven, président de l'Association canadienne des fonds de revenu, y est allé d'un long réquisitoire contre le gouvernement.

"Le ministre des Finances affirme avoir agi dans le but d'éviter une perte de 500 millions de dollars en impôts corporatifs. En réalité, cette décision va plutôt faire en sorte que 25 milliards d'avoirs financiers s'envolent en fumée", a déploré M. Kesteven.

Denis Durand, de Jarislowsky Fraser, réfute cette vision des choses, qu'il juge quelque peu fallacieuse.

"Oui, c'est une perte, à condition que vous ayez acheté (vos parts) la journée avant. Mais les gens avaient acheté ça bien avant. Il oublie de dire que pendant l'année précédente, les fiducies de revenu se sont peut-être appréciées de 25 milliards. On ne perd pas ce qu'on n'a pas. Elles ont perdu l'appréciation qu'elles avaient déjà gagnée."

David Wolf en rajoute. "Un jour ordinaire, si le marché grimpe de 100 points, on ne voit pas les gens sortir et clamer: les Canadiens sont plus riches de 10 milliards! Ça semble quelque peu incompatible de retenir ce nombre et de s'énerver avec", a-t-il tranché.