Coup de théâtre dans l'arrondissement du Sud-Ouest, jeudi: le père de la conseillère municipale Line Hamel, l'entrepreneur en construction Michel Hamel, a été arrêté chez lui par la Sûreté du Québec, au petit matin, avant d'être accusé de fraudes auprès d'un promoteur immobilier et de trafic d'influence.

Coup de théâtre dans l'arrondissement du Sud-Ouest, jeudi: le père de la conseillère municipale Line Hamel, l'entrepreneur en construction Michel Hamel, a été arrêté chez lui par la Sûreté du Québec, au petit matin, avant d'être accusé de fraudes auprès d'un promoteur immobilier et de trafic d'influence.

Selon la SQ, «l'enquête tend à démontrer que l'individu approchait des promoteurs qui avaient besoin de modifications de zonage ou de réglementation pour réaliser leurs projets. Il leur demandait des sommes d'argent afin de faciliter l'acceptation de leurs projets respectifs».

Michel Hamel, de la compagnie Albert Hamel Construction, a notamment été accusé d'avoir, en 2004, prétendu auprès du promoteur immobilier Jean-Jacques Rousseau qu'il avait de l'influence «auprès de fonctionnaires de la Ville de Montréal» pour faire accepter son projet, et d'avoir exigé pour cela une somme d'argent.

La conseillère municipale Line Hamel s'est aussitôt retirée du caucus de son parti, Vision Montréal. Elle siégera comme indépendante jusqu'à la fin du processus judiciaire. Le chef du parti, François Purcell, a annoncé que cette décision avait été prise d'un commun accord.

«Mme Hamel est sous le choc. Elle ne comprend pas ce qu'il lui arrive. Elle est atterrée», a-t-il ajouté. Il a été impossible hier d'obtenir les commentaires de la conseillère municipale. M. Purcell a indiqué qu'il n'était pas en mesure de faire connaître l'opinion de Mme Hamel sur les faits reprochés à son père.

Selon l'enquête, Michel Hamel aurait profité du fait que l'arrondissement du Sud-Ouest a une situation politique particulière.

Depuis 2006, la mairesse Jacqueline Montpetit, d'Union Montréal, est minoritaire au conseil d'arrondissement, où il y a trois élus de Vision Montréal (Jean-Yves Cartier, Ronald Bossy et Line Hamel) et deux d'Union Montréal (Mme Montpetit et Pierre Fréchette).

Auparavant, le conseil d'arrondissement était composé entièrement d'élus de Vision Montréal. Mme Montpetit a toutefois changé d'allégeance politique en 2005.

La conseillère Line Hamel est aussi la présidente du Comité consultatif d'urbanisme de l'arrondissement du Sud-Ouest, l'autorité qui étudie tous les projets immobiliers et fait des recommandations au conseil d'arrondissement. Elle occupe ce poste depuis son élection en 2001.

Projet vain

M. Rousseau essayait donc en vain d'obtenir un permis pour transformer l'ancien édifice de la RCÀ Victor, rue Lenoir. Chaque fois qu'il présentait une demande, les élus de Vision Montréal refusaient les plans proposés.

Selon des sources bien informées, Michel Hamel a ensuite demandé de l'argent à M. Rousseau: 75 000$ à verser en plusieurs fois, à chaque étape franchie par le projet immobilier au conseil d'arrondissement.

Selon l'acte d'accusation, le promoteur aurait versé une partie de cet argent, puisque Michel Hamel est accusé d'avoir «par la supercherie, le mensonge ou autre moyen dolosif, frustré Jean-Jacques Rousseau d'une somme dépassant 5000$».

Selon la SQ, d'autres promoteurs ont été lésés par M. Hamel, et l'enquête de la Sûreté du Québec se poursuivrait pour cette raison. Hier, les conseillers municipaux et plusieurs fonctionnaires étaient d'ailleurs interrogés par les policiers.

L'ancien député et conseiller municipal Robert Libman a agi ces dernières années à titre d'architecte auprès de plusieurs promoteurs immobiliers, à Montréal, pour les aider dans leurs démarches auprès des administrations municipales. Il a dit à La Presse, jeudi, que des rumeurs de trafic d'influence couraient dans ce secteur de la ville.

«Dans le Sud-Ouest, on ne savait jamais si ces rumeurs étaient vraies ou fausses, a dit M. Libman. Après l'affaire des conseillers Irving Grundman et René Dussault (dans Saint-Laurent), j'étais très étonné de voir que cette situation pouvait exister.» Ces deux conseillers municipaux de Saint-Laurent ont été reconnus coupables de corruption, en 2005, et condamnés à une peine de 23 mois de prison à purger dans la société et à des amendes totalisant 75 000$.

Dans le cas d'un projet immobilier dont s'occupait M. Libman dans l'arrondissement du Sud-Ouest, celui du Complexe Dompark, un des responsables s'est également fait dire que «ça prendrait 100 000$ pour faire avancer le dossier».

Michel Hamel n'a pas pris contact avec le responsable en question. Il s'agit plutôt d'«un autre promoteur», a appris La Presse.

Le projet du Complexe Dompark est allé de l'avant, mais ses promoteurs ont dû devenir commanditaires d'activités spécifiques sur le boulevard Monk. Ils verseront 25 000$ la première année dans ce cadre, nous ont expliqué plusieurs sources.

Ce coin de Montréal est décidément dans l'actualité judiciaire puisqu'un ami de Michel Hamel, le sénateur Raymond Lavigne, ex-député libéral de Verdun, a été accusé de fraude, d'abus de confiance et d'entrave à la justice, en août après une enquête de la GRC.

L'hiver dernier, M. Lavigne songeait à se présenter comme candidat libéral dans la circonscription de Jeanne-Le Ber.

Mais comme il faisait déjà l'objet d'une enquête et que sa candidature n'était pas souhaitée par le PLC, il avait songé à proposer le nom de Line Hamel pour le remplacer. Michel Hamel était d'ailleurs jusqu'à tout récemment le président de l'association libérale fédérale dans cette circonscription.