Boeing a rompu les discussions amorcées par le gouvernement canadien dans l'espoir de résoudre le différend commercial qui oppose le constructeur américain à la multinationale québécoise Bombardier, a confirmé mardi l'ambassadeur du Canada aux États-Unis.

Selon David MacNaughton, les représentants canadiens essayaient de comprendre pourquoi Boeing s'en prenait ainsi à Bombardier, alors que les deux entreprises ne sont pas des concurrents directs dans les mêmes marchés.

Boeing reproche à Bombardier d'avoir vendu des appareils CSeries au transporteur aérien américain Delta Airlines à un prix plus bas que le marché, grâce aux subventions du gouvernement canadien.

Croisé mardi à Saint-Jean, à Terre-Neuve-et-Labrador, où il a été invité à participer à la réunion présessionnelle du cabinet fédéral, l'ambassadeur MacNaughton a indiqué que les deux parties avaient soumis des propositions de règlement, mais que Boeing avait décidé unilatéralement de mettre fin aux discussions.

Un haut responsable chez Boeing expliquait plus tôt ce mois-ci à La Presse canadienne que l'entreprise américaine craignait que l'entente de Bombardier avec Delta mette en péril sa prospérité à long terme - et celle de tout le secteur aéronautique en général.

Les commentaires de l'ambassadeur MacNaughton confirment pour la première fois que le gouvernement de Justin Trudeau a discuté directement avec le géant américain de ce différend commercial qui est devenu épineux pour les libéraux. On apprenait aussi dans certains médias que la première ministre britannique, Theresa May, qui visitera le Canada la semaine prochaine, a récemment défendu Bombardier face à Boeing lors d'un entretien téléphonique avec le président américain Donald Trump.

Des appuis à Bombardier

Un haut fonctionnaire canadien qui a requis l'anonymat a confirmé que Mme May devrait visiter le Canada le 18 septembre, et qu'on pourrait alors évoquer le différend commercial entre Bombardier et Boeing.

Bombardier emploie 4200 personnes à son usine de Belfast, en Irlande du Nord, et exerce aussi d'autres activités au Royaume-Uni. La ministre canadienne des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, et M. MacNaughton ont discuté de l'affaire Bombardier-Boeing avec des représentants du gouvernement britannique à deux reprises, a soutenu mardi l'ambassadeur, sans donner plus de détails.

Le différend entre Boeing et Bombardier a pris des proportions épiques au fil du temps. Le département américain du Commerce a ouvert une enquête à la suite d'une plainte déposée par Boeing, et les résultats préliminaires sont attendus dans deux semaines, le 25 septembre. Washington pourrait alors décider d'imposer des amendes ou des tarifs douaniers à Bombardier.

De son côté, Ottawa a menacé de ne plus acheter à Boeing ses avions-chasseurs Super Hornet si l'entreprise américaine ne retire pas sa plainte contre Bombardier. Le premier ministre Justin Trudeau a aussi rappelé au gouverneur du Missouri, où sont construits les Super Hornet, que Boeing jouit elle aussi de coups de pouce financiers aux États-Unis.

Plusieurs membres du Congrès ont également apporté leur soutien à Bombardier et rappelé à la Maison-Blanche que de nombreux emplois aux États-Unis étaient directement liés aux activités de l'entreprise canadienne.

Mais Boeing n'a montré aucun signe de repli: Marc Allen, président de la division internationale, indiquait encore ce mois-ci qu'il souhaitait que toutes les entreprises du secteur aéronautique concurrencent à armes égales.