L'accès à la justice n'est pas un droit facile à faire valoir. Même pour un médaillé d'or olympique.

L'ex-sprinter Bruny Surin, médaillé d'or aux Jeux olympiques d'Atlanta en 1996, a intenté un litige civil pour au moins 90 000 $ contre le fabricant d'articles de sport Puma qui vend une série de chaussures sous l'appellation « Cell Surin ». Or, Puma tentait de faire rejeter d'emblée la poursuite civile sans trancher le débat au fond, alléguant que les tribunaux québécois n'étaient pas compétents pour entendre le litige. 

La Cour supérieure a rejeté les requêtes de Puma et choisi d'entendre le litige sur le fond.

Puma prétendait que la cause devait être entendue aux États-Unis plutôt qu'au Québec, puisque l'entreprise allemande n'a pas de domicile ou établissement stable au Québec et que les chaussures « Cell Surin » étaient en vente au Canada par l'entremise d'un site transactionnel américain.

La Cour supérieure du Québec a jugé au contraire être compétente pour entendre le litige, citant au passage la question d'accès à la justice. « Étant donné que la réclamation financière est limitée, que [M. Surin] fait face à une entité corporative ayant des ressources supérieures à celle d'une personne physique, et étant donné les coûts impliqués, dans une perspective d'accès à la justice, l'intérêt de la justice favorise que le litige soit entendu au Québec », écrit l'honorable juge Simon Hébert dans une décision rendue le 15 août dernier.

UN SEUL PROCÈS

Le tribunal québécois a aussi rejeté la requête de Puma de scinder le litige en deux. Puma voulait un premier litige pour déterminer sa responsabilité. Si M. Surin l'avait emporté, un deuxième litige aurait été nécessaire pour déterminer les dommages. La Cour supérieure a refusé le scinder ainsi le litige, qui n'est que de 90 000 $ pour l'instant. 

« Imposer au demandeur la tenue de deux procès, vu la valeur du litige, va à l'encontre du principe de la proportionnalité. [...] Le Tribunal doute qu'il y ait une véritable économie à procéder en deux volets. » - L'honorable juge Simon Hébert

Dans la dernière requête, M. Surin demandait que Puma lui communique les revenus et les profits par pays des « Cell Surin ». Le tribunal a tranché ce débat en deux : Puma doit communiquer « pour le moment » les données financières des « Cell Surin » au Canada, où Bruny Surin détient des marques de commerce sur son nom. 

« CONFUSION »

Dans sa poursuite déposée en 2016, M. Surin allègue que l'utilisation de son nom a « créé une confusion » et qu'il n'a jamais donné son accord à Puma pour vendre des chaussures de course avec l'appellation « Surin ». Puma estime au contraire qu'il n'y a pas de confusion.

Bruny Surin a été de loin le meilleur sprinteur québécois de son époque. Durant sa carrière de 1986 à 2002, il a gagné cinq médailles aux Championnats du monde d'athlétisme, dont deux médailles d'argent au 100 m en 1995 et 1997. Il a fait partie du célèbre quatuor canadien ayant gagné l'or au relais 4x100 m aux Jeux olympiques d'Atlanta en 1996.

M. Surin n'a pas fait de commentaires sur le litige, et Puma n'a pas rappelé La Presse.

- Avec la collaboration de Vincent Larouche, La Presse

Photo Leonhard Foeger, archives Reuters

Puma a tenté de faire rejeter d'emblée la poursuite civile intentée par Bruny Surin sans trancher le débat au fond, alléguant que les tribunaux québécois n'étaient pas compétents pour entendre le litige.