La société américaine de compléments alimentaires et de produits minceur Herbalife a remporté vendredi un long bras de fer avec un grand nom de Wall Street, l'accusant de fraude pyramidale, mais devra payer à ses membres 200 millions de dollars de compensations.

La commission fédérale de la concurrence américaine (FTC) a jugé que la manière de fonctionner d'Herbalife n'est pas frauduleuse, mais qu'elle devra être néanmoins profondément modifiée.

La société, objet depuis plusieurs années de dénonciations de l'investisseur Bill Ackman, qui l'accusait d'être un mécanisme frauduleux de style «Ponzi», se voit ainsi exonérée de cette accusation, même si elle ne sort pas totalement blanchie de l'enquête de la FTC.

«Cette décision exige d'Herbalife de restructurer fondamentalement ses activités de manière à ce que les participants soient récompensés pour ce qu'ils vendent et non pas sur la base du nombre de personnes qu'ils recrutent», a souligné dans un communiqué la présidente de la FTC Edith Ramirez.

«Herbalife va maintenant devoir présenter de manière honnête combien ses membres peuvent gagner et devra compenser les consommateurs pour les pertes qu'ils ont subies en conséquence de ce que nous considérons comme des pratiques déloyales et trompeuses», a-t-elle ajouté.

Herbalife a souligné dans un communiqué que la décision de la FTC ne l'obligeait pas à changer son modèle de vente directe au consommateur. Elle a également indiqué que, suite à cette décision, un autre grand nom de Wall Street, Carl Icahn, allait pouvoir porter sa participation en son sein de 25% à 34,99%.

Icahn contre Ackman

M. Ackman, un des investisseurs les plus réputés de Wall Street, estime qu'Herbalife est une fraude pyramidale. Il avait misé jusqu'à un milliard de dollars sur l'effondrement boursier du groupe.

Par le biais de son fonds d'investissement Pershing, il a indiqué vendredi qu'il s'attendait à ce qu'«une fois la restructuration des activités d'Herbalife finalisée, ces changements structurels provoqueront l'effondrement de la pyramide, car les principaux distributeurs et les autres emmèneront leurs réseaux de distribution ailleurs ou abandonneront leurs activités».

«Si Bill Ackman et moi-même avons des relations amicales, nous sommes d'accord pour ne pas être d'accord sur le sujet» d'Herbalife, a souligné Carl Icahn dans un communiqué séparé, affirmant que ceux qui avaient parié contre Herbalife avaient eu «complètement tort».

Herbalife, fondée en 1980, écoule dans plus de 80 pays ses substituts de repas et ses barres énergétiques sur le modèle de Tupperware, c'est-à-dire par un réseau de distributeurs qui pratiquent cette activité à domicile. Pour Bill Ackman, la société gagne de l'argent non en vendant ses produits aux particuliers mais en recrutant sans cesse de nouveaux revendeurs obligés d'acquérir ces produits.

À la suite de la décision de la FTC, le cours de l'action Herbalife progressait de 9,84% à 65,21 dollars vers 13 h 30 à Wall Street. M. Ackman avait parié qu'elle tomberait à 47 dollars.

Selon la FTC, Herbalife affirmait à ses membres qu'ils pouvaient quitter leur emploi pour gagner des milliers de dollars par mois en vendant les produits du groupe et s'enrichir. Mais, selon la Commission, «la vérité (...) est que la grande majorité des distributeurs qui rejoignaient l'opération ne gagnait que peu ou pas d'argent» et que le revenu des «chefs de ventes» pour 2014 ne dépassait pas en moyenne 300 dollars.

Selon des propres chiffres d'Herbalife cités par la FTC, les responsables des «clubs nutritionnels» chargés de distribuer les produits devaient réaliser un investissement initial de 8.500 dollars, mais 57% d'entre eux ont ensuite indiqué de pas gagner d'argent, voire en perdre.

Parmi les mesures qu'Herbalife va devoir prendre pour changer ses pratiques, il lui faudra désormais différencier entre ceux qui rejoignent le groupe pour acheter et ceux qui les vendent, les acheteurs ne pouvant être en même temps vendeurs. Les revenus devront être assis sur les ventes réellement effectuées et non sur la base du nombre de membres recrutés et les frais liés à l'ouverture des centres devront être supportés par l'entreprise et non les membres.

Herbalife devra aussi pour les sept prochaines années faire vérifier ses activités par un contrôleur indépendant.

Les détails du plan de compensation et sur la manière dont seront distribués les 200 millions de dollars seront annoncés ultérieurement, a précisé la FTC.