L'Autorité des marchés financiers du Québec (AMF) calcule que des amis et associés du chef de la direction d'Amaya, ainsi que son frère, ont engrangé des profits totalisant près de 1,5 million de dollars grâce à des informations privilégiées au sujet d'acquisitions, notamment la transaction qui a fait de la firme montréalaise le plus grand groupe de poker en ligne du monde, il y a deux ans.

Selon les documents publiés par l'AMF, le grand patron d'Amaya, David Baazov, serait la « principale source » des fuites d'informations privilégiées.

M. Baazov fait face à cinq chefs d'accusation, notamment d'avoir influencé ou tenté d'influencer le cours du titre d'Amaya et d'avoir communiqué une information privilégiée. Deux autres personnes et trois entreprises ont aussi été visées par 18 autres chefs d'accusation à la suite de l'enquête de l'AMF.

Le patron d'Amaya, âgé de 35 ans, a rejeté les accusations, qu'il a qualifiées de fausses, déclarant qu'il ne doutait pas qu'il arriverait à prouver son innocence pour chacun des chefs.

Même si les détails de l'affaire n'ont pas été dévoilés, les documents de l'AMF précisent que les délits d'initiés allégués touchent à sept transactions réalisées depuis 2011 et impliquant 13 autres personnes, dont Josh Baazov, le frère du chef de la direction d'Amaya.

Les profits tirés des transactions d'investisseurs individuels se sont établis entre 200 $ et 155 839 $, selon deux rapports sur les enquêtes publiés par un tribunal administratif indépendant associé à l'AMF.

Plus de 800 000 $ auraient été empochés en lien avec l'acquisition, par Amaya, d'Oldford Group contre 4,9 milliards US en 2014. Cette entreprise détenait entre autres les actifs PokerStars et Full Tilt Poker.

AMIS, PROCHES ET MEMBRES DE LA FAMILLE

Le Montréalais Isam Mansour aurait engrangé 500 000 $ en achetant puis en revendant les actions des entreprises associées aux ententes d'Amaya, selon les documents.

Ces documents avancent également que Craig Levett - ami et partenaire d'affaires de Josh Baazov -, sa femme et son frère ont empoché plus de 500 000 $. Les autres personnes qui seraient impliquées comprennent divers amis, membres de la famille et associés qui ont effectué des transactions à partir d'informations divulguées par Josh Baazov, selon les documents.

Parmi ceux-ci se trouve John Chatzidakis, un conseiller indépendant de la Financière Sun Life dont le contrat a été résilié lorsque sa licence a été suspendue, à la suite de l'enquête.

MM. Mansour, Levett et Josh Baazov n'ont pu être joints pour commenter la situation.

Pour sa part, M. Chatzidakis avait peu de choses à dire.

« Je suis désolé, je ne peux parler à personne au sujet de toute situation », a-t-il dit lorsque joint à son domicile. « Mais la vérité sera connue [plus tard]. »

Au cours de l'enquête, l'AMF a surveillé certains appels téléphoniques et d'autres communications entre investisseurs.

RÉPERCUSSIONS

Après avoir obtenu des informations au sujet d'une acquisition imminente, les investisseurs ont acheté des actions de la société cible ou d'Amaya, souvent pour la première fois, fait valoir l'AMF. Une fois les transactions annoncées, après la hausse des prix des actions, les investisseurs ont alors vendu leurs actions et empoché d'importants profits, selon les documents.

Aucune des allégations n'a été prouvée.

Les 13 associés de M. Baazov n'ont pas été accusés, mais ils se sont fait ordonner de ne pas négocier d'actions ou d'accéder aux produits de leurs activités.

Les profits ont été réalisés en lien avec des transactions impliquant Cryptologic, Chartwell Technology, WMS Industries, Oldford Group, BWIN.Party et Intertain Group, selon les documents de l'AMF.

L'action d'Amaya a plongé depuis le dépôt des accusations, la semaine dernière. Elle a clôturé hier à 14,81 $, en baisse de 64 cents, ou 4,1 %, à la Bourse de Toronto.

Intertain a indiqué hier que son action a perdu des plumes après que son nom a été cité dans les documents de l'AMF. Après avoir touché en juin un sommet de 20,09 $ pour les 52 dernières semaines, elle a clôturé hier en hausse de 35 cents, ou 3,6 %, à 10,00 $.

La société spécialisée dans les jeux de hasard s'est dite déçue de constater que de mauvaises informations et des décisions de vendeurs à découvert avaient nui à ses actionnaires.

Intertain, qui révise actuellement ses options stratégiques, dit avoir reçu des manifestations d'intérêt de la part de plusieurs entreprises au sujet du rachat de l'ensemble ou de certaines de ses activités.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

David Baazov, président d’Amaya, rejette les cinq chefs d’accusation auxquels il fait face et ne doute pas qu’il arriverait à prouver son innocence pour chacun des chefs.