C'est l'Once Picsou qui serait content. L'or a traversé allègrement le seuil des 1200 $US l'once jeudi dernier et maintient un bel écart depuis jusqu'à dessiner la figure technique prometteuse de la « tasse avec anse ».

À 1209 $US l'once hier, malgré une correction de 30 $ alors que les Bourses asiatiques explosaient, le métal précieux marque son retour en faveur après six années de misère accentuées par un dévissage en règle à la fin de l'année dernière. Pour ainsi dire, il avait d'abord bu la tasse.

Converti en dollars canadiens, l'or est presque à un sommet de tous les temps, faisait remarquer la semaine dernière Sean Boyd, chef de la direction de la société Agnico Eagle Mines. Pour un producteur d'or comme elle, dont les coûts sont en pauvres huards et les revenus en beaux billets verts, c'est le pactole.

Payé en pétrole, l'or n'a même jamais été aussi cher, fait pour sa part remarquer le stratège Jim Reid, de la Deutsche Bank. Le prix du lingot jaune est actuellement 44 fois plus élevé que celui de l'or noir, alors que le multiple moyen historique est de 16. Le plus grand différentiel (41) avant aujourd'hui remontait à 1892.

L'or marque un gain de 15 % depuis son bas de décembre, il y a deux mois à peine. Techniquement, le cycle baissier sera cassé quand il aura remonté à 1256 $US en clôture. Voilà qui devrait inspirer les investisseurs qui désespèrent de voir la Bourse se relever après à peine neuf mois de fléchissement.

ANALYSES TECHNIQUES

L'analyste Claude Bordeleau, éditeur du site spécialisé L'Observateur Technique, estime que l'or métal est en position de force avant de repartir à la hausse en ayant créé une « superbe figure chartiste haussière » pour la suite des événements, soit « une magnifique tasse avec son anse ».

Dennis Mark, analyste technique de la Financière Banque Nationale, croit de même que « l'or a fait un pas dans la bonne direction en cassant une importante tendance à la baisse construite sur trois ans ». La prochaine confrontation sera aux alentours de 1300 $US. Tout recul contenu entre 1180 $US et 1200 $US formerait un bon support.

Son collègue Robert Sluymer, de RBC Marchés des Capitaux, ajoute toutefois que l'or serait « suracheté » suivant l'indice technique de force relative RSI. Cet indicateur très suivi cherche à mesurer le souffle du marché en soupesant la puissance des séances positives et négatives durant une période de temps donnée. Il avait donné un signal d'achat probant au tournant de l'année.

ANALYSES FONDAMENTALES

Chris Matthews, du magazine Fortune, fait par ailleurs remarquer que l'or a tendance à s'enflammer avec les achats au Nouvel An chinois, comme c'était le cas la semaine dernière. C'est aussi arrivé ces dernières années et le marché est redevenu bien terre à terre après les célébrations de la nouvelle Lune, note le chroniqueur.

L'expert en mines et métaux Jorge Beristain, de la Deutsche Bank, estime qu'il est toujours aussi difficile de prédire le prix de l'or alors que le recyclage compte pour le quart de l'offre. L'environnement lui paraît cependant « plus constructif » avec la réduction de la production mondiale ces dernières années, le changement de trajectoire des taux d'intérêt et la dévaluation du renminbi chinois qui lui faisait concurrence avec le dollar américain.

LA RECOMMANDATION

Les prix de l'or et de l'argent pourraient encore augmenter un peu à court terme, prévoient François Dupuis, économiste en chef, et Mathieu D'Anjou, économiste principal, du Mouvement Desjardins. « Ces gains nous paraissent toutefois très fragiles puisqu'ils reflètent surtout la poussée d'inquiétudes des investisseurs et la perception que les taux directeurs américains demeureront inchangés toute l'année. À notre avis, il est plus probable que les choses finiront par se calmer », peut-on lire dans leur plus récent bulletin de tendances des matières premières.

INFOGRAPHIE LA PRESSE