Les bureaux montréalais d'Amaya, de Manuvie et de Canaccord ne sont pas les seuls endroits où l'Autorité des marchés financiers (AMF) a réalisé des perquisitions dans le cadre de son enquête pour délit d'initiés. L'AMF a aussi effectué des saisies dans des bureaux montréalais de Bell Mobilité ainsi que dans ceux de Rogers et de sa filiale Fido.

Après être débarqués le 10 décembre chez Amaya, à Pointe-Claire, chez Placements Manuvie, à Dorval, et chez Canaccord, au centre-ville, des représentants de l'AMF se sont présentés le 6 février chez Bell et Rogers.

Des documents obtenus par La Presse révèlent qu'un volume important d'éléments d'enquête a été saisi chez les fournisseurs de services téléphoniques.

Chez Bell Mobilité, rue De La Gauchetière, l'AMF a saisi un disque compact comprenant «le registre des communications du 12 mars au 30 septembre 2014» pour un numéro de téléphone précis. D'après nos recherches, ce numéro est lié à un condo de la rue Saint-Hubert appartenant à un ingénieur montréalais qui n'a pu être joint.

Le CD saisi comprend également des factures pour un numéro lié à une résidence de Saint-Lazare. Selon nos informations, cette maison est celle de l'ex-superviseure du bureau de Manuvie Dorval, Heather Borelli.

Dans les bureaux de Rogers/Fido, également situés rue De La Gauchetière, l'AMF a saisi une boîte contenant des factures pour 12 personnes, un registre d'appels pour ces 12 personnes ainsi que des tableaux descriptifs.

Deuxième perquisition chez Canaccord

L'AMF a effectué au moins six perquisitions depuis le début de son enquête. Selon ce que La Presse a appris, les bureaux montréalais de Canaccord, situés en face du Centre Bell, boulevard René-Lévesque Ouest, ont jusqu'ici fait l'objet de perquisitions à deux reprises.

Après s'y être d'abord rendue le 10 décembre, l'AMF s'y est de nouveau présentée le 25 février, un nouveau mandat de perquisition en main.

Cette journée-là, l'AMF a saisi une clé USB contenant les boîtes de courriels de deux personnes ainsi que trois boîtes de documents.

Le gendarme boursier québécois procède à l'analyse des éléments saisis au bureau de la conformité de Canaccord en sachant que la société financière conserve une sauvegarde de l'ensemble des courriels de ses employés pour une période de sept ans et une copie de sauvegarde des courriels supprimés pour une période de deux ans.

L'AMF sait aussi que chez Canaccord, les appels entre les représentants et leurs clients ne sont pas enregistrés, sauf au Québec, et qu'un registre des appels de tous les représentants est conservé. L'AMF s'est aussi fait confirmer que Canaccord enregistre les appels entre les représentants et le pupitre de négociations des options négociées en Bourse. Il s'agirait là aussi d'une information pertinente à son enquête.

Acquisition de PokerStars

Une cinquantaine de représentants ou d'employés de Canaccord ont été avisés du projet d'acquisition de PokerStars avant son annonce. Canaccord était le banquier d'Amaya pour la transaction.

Le gendarme boursier québécois a des motifs raisonnables de croire que plusieurs personnes ont effectué des opérations sur l'action d'Amaya alors qu'ils disposaient d'une information privilégiée et que quatre personnes ont communiqué de l'information privilégiée sur le titre d'Amaya.

L'action d'Amaya ainsi que le volume de transactions avaient fortement augmenté dans les semaines précédant l'acquisition.

Amaya a réalisé la plus importante transaction financière au Québec l'an passé en procédant à l'acquisition des sites PokerStars et Full Tilt Poker, en juin 2014, pour 4,9 milliards US.

Mis à part le volet Canaccord, trois membres de la haute direction d'Amaya, dont le PDG David Baazov et le chef des finances Daniel Sebag, ainsi qu'une quinzaine d'employés ou ex-employés de Manuvie sont visés par l'investigation.

L'AMF tente de connaître les noms de ceux qui ont été informés du projet d'acquisition depuis son origine afin de bien comprendre comment l'information a circulé.

Les soupçons de l'AMF n'ont aucunement été prouvés devant un tribunal.