Un courtier basé à Londres devait comparaître mercredi devant la justice britannique dans le cadre d'une procédure d'extradition vers les États-Unis, où il est accusé de fraude et de manipulations partiellement responsables du mini-krach boursier de mai 2010.

Arrêté mardi à Hounslow, dans l'ouest de Londres, Navinder Singh Sarao, 36 ans, a empoché 40 millions de dollars US grâce à cette fraude qui a duré cinq ans jusqu'en avril 2014.

Il devait comparaître mercredi matin devant le tribunal londonien de Westminster Magistrates' Court. L'audience qui devait démarrer à 9h00 GMT a été retardée.

M. Sarao est visé aux États-Unis par une vingtaine de chefs d'accusation, dont celui de fraude électronique et manipulation de contrats à terme sur le Chicago Mercantile Exchange (CME) et de «spoofing», une technique de manipulation boursière qui consiste à prétendre vouloir acheter ou vendre un titre dans l'intention d'annuler cette opération au dernier moment.

Sa société, Nav Sarao Futures Limited, est enregistrée à une adresse à Hounslow, qui se trouve être la maison où il vit avec ses parents.

Interrogé par le quotidien britannique The Times, le père de Navinder Singh Sarao a dit tout ignorer des accusations portées contre son fils.

«Tout ça est nouveau pour moi. Ce que vous me dites est une surprise pour moi», a déclaré Nachhattar Singh Sarao. «Je n'y connais rien aux ordinateurs», a-t-il ajouté quand le quotidien l'a interrogé sur le travail de son fils.

Usant d'un logiciel électronique, Navinder Singh Sarao est soupçonné d'avoir employé une stratégie dite de «superposition» en plaçant simultanément de multiples ordres de grande ampleur à différents prix, créant l'illusion d'un marché très actif et bien réel.

«Activités suspectes»

D'après le Département de la Justice des États-Unis, les autorités boursières américaines et européennes avaient relevé plusieurs fois en 2009 et 2010 les «activités suspectes» de M. Sarao, faisant part de leurs inquiétudes à la maison de courtage utilisée par M. Sarao.

En mars 2010, après que le CME se soit plaint auprès de cette maison de courtage d'un grand nombre d'ordres annulés par M. Sarao, ce dernier s'est défendu de tout comportement illégal, disant avoir voulu montrer à un ami comme agissaient les courtiers à haute fréquence, selon les extraits de ce courriel publiés par le Département de la Justice.

Dans un autre courriel envoyé par M. Sarao à sa maison de courtage le 25 mai 2010, il indique avoir appelé le CME et leur avoir dit «d'aller se faire foutre».

Dans plusieurs de ses échanges avec sa maison de courtage et/ou les régulateurs, M. Sarao nie l'utilisation d'algorithmes pour placer ses ordres de vente et d'achat, se décrivant comme un «courtier à l'ancienne» capable d'opérer «extrêmement rapidement» manuellement.

Selon la CFTC, l'autorité américaine des produits dérivés, M. Sarao a été «très actif» sur le marché lors de la séance du «Flash Crash», le 6 mai 2010.

Ce jour-là, dans un contexte de forte volatilité alors que déjà des inquiétudes pesaient sur la dette grecque, l'indice Dow Jones s'était écroulé de 600 points en quelques minutes après une chute des prix des E-minis.

Ces contrats à terme électroniques sont basés sur l'indice Standard & Poor's 500. Un rapport à l'époque du gendarme boursier, la SEC, avait mentionné que 140 000 ordres de ventes d'E-minis s'étaient bousculés au même instant conduisant par ricochet à un décrochage brutal de Wall Street.