Le bureau de Dorval de Placements Manuvie a perdu 12 conseillers financiers depuis qu'elle a fait l'objet d'une perquisition dans le cadre de l'affaire Amaya, en décembre, a appris La Presse.

Selon nos informations, 7 des 12 conseillers étaient courtiers de plein exercice. Parmi les sept se trouve la superviseure de cette division phare de Manuvie, qui compte une vingtaine de représentants à Dorval. Les cinq autres personnes qui sont parties oeuvraient dans une autre division, celle de la vente de fonds communs de placement.

Le 10 décembre, Manuvie Dorval a fait l'objet d'une perquisition de l'Autorité des marchés financiers (AMF). L'organisme réglementaire a des motifs raisonnables de croire que des courtiers de Manuvie ont pu aider des clients à commettre un délit d'initié sur le titre boursier d'Amaya. L'AMF a également rendu visite à Amaya, à Dorval, et à la firme de courtage Canaccord, boulevard René-Lévesque Ouest, à Montréal. Elle était accompagnée de la Gendarmerie royale du Canada.

Amaya a fait l'acquisition d'Oldford Group et de sa plateforme internet PokerStars, le 12 juin, pour la somme de 4,9 milliards US. Le titre boursier de la firme montréalaise et le volume de transactions avaient fortement augmenté au cours des semaines précédant l'annonce de la transaction, ce qui alerté les autorités.

Parmi les sept courtiers qui ont quitté Manuvie, quatre sont passés dans le camp de Mandeville Private Client, société de Burlington, en Ontario, dirigée par d'anciens cadres de Manuvie ou d'un de ses ancêtres, Berkshire Financial Group.

Les quatre travailleront dans le nouveau bureau montréalais de Mandeville, a-t-on appris de source sûre, sous la direction de Gene Kim. M. Kim a quitté Manuvie Dorval le 19 mars.

Selon le registre de l'Autorité canadienne des valeurs mobilières (ACVM), la superviseure du bureau de Dorval a été relevée de ses fonctions le 11 décembre, le lendemain de la perquisition de l'AMF. Depuis le 10 mars, elle n'est plus inscrite comme courtier ni chez Manuvie ni ailleurs. Cette dernière information a été rendue publique hier sur le registre.

La superviseure du bureau occupait cette fonction chez Manuvie Dorval depuis 2009. Il n'a pas été possible de connaître les raisons officielles de son départ. L'ex-représentante n'a pas répondu aux demandes d'entrevue de La Presse, pas plus que Gene Kim et les dirigeants de Mandeville. Manuvie n'a pas voulu commenter.

Parmi les autres courtiers qui ont rompu leurs liens avec Manuvie, une représentante travaille pour Dundee depuis le 12 mars, tandis qu'un dernier est sans emploi depuis le 25 mars.

Manuvie Dorval serait la première succursale de conseillers en placement au pays au sein de la Financière Manuvie. Son actif sous gestion, qui se chiffre en centaines de millions de dollars, serait le plus important du réseau canadien de Manuvie depuis plusieurs années.

Les soupçons de l'AMF n'ont aucunement été prouvés et il n'est pas clair que des accusations de délit d'initié sur le titre d'Amaya puissent être déposées. Il est très difficile de démontrer qu'une personne a profité d'informations privilégiées concernant une entreprise pour s'enrichir en Bourse. Les personnes reconnues coupables de délit d'initié sont rares au Canada.

Hier, en téléconférence, le PDG d'Amaya, David Baazov, a fait un commentaire sur l'enquête de l'AMF. «Amaya a procédé à une révision interne et n'a pas constaté d'infractions de la part de ses dirigeants ou employés, a-t-il dit. Nous avons bon espoir de voir l'AMF en arriver aux mêmes conclusions.»