Québec espère se refaire une santé financière en majorant la taxe sur les produits du tabac et en procédant à l'uniformisation de celle sur les boissons alcoolisées.

Les dépanneurs de la province risquent d'être achalandés ce mercredi soir. Car à compter de minuit, la taxe sur la cartouche de cigarettes sera augmentée de 4 $, soit 0,50 $ par paquet.

En adoptant cette mesure, le gouvernement Couillard espère générer des recettes fiscales de 90 millions $ en 2014-2015, de 120 millions $ en 2015-2016, puis de 115 millions $ l'année suivante.

La hausse de la taxe sur le tabac a non seulement pour objectif de regarnir les coffres de l'État, ce qui ne devrait pas poser de problème d'«acceptabilité», a suggéré mercredi le ministre des Finances, Carlos Leitao, mais elle vise aussi à encourager les Québécois à écraser, souligne-t-on dans le budget.

Selon l'estimation du ministère des Finances, cette augmentation devrait inciter environ 50 000 fumeurs à abandonner leur mauvaise habitude et devrait ainsi diminuer le nombre de décès dus au tabagisme au Québec en plus de relâcher un peu de pression sur le système de santé.

Le ministère de la Santé et des Services sociaux évalue que le tabagisme cause 10 400 décès par année au Québec et impose des coûts de santé et des coûts indirects estimés à près de 4 milliards $ annuellement.

Les sommes dégagées grâce à cette hausse de taxe seront notamment réinvesties dans le Fonds pour le développement du sport et de l'activité physique et le Fonds avenir mécénat culture. Celui-ci sera créé dans le cadre de la loi omnibus sur le budget.

Par ailleurs, afin de prévenir toute hausse de la contrebande du tabac, 1 million $ supplémentaire sera consacré à la lutte contre le commerce illicite des produits du tabac.

L'annonce a évidemment suscité des réactions diamétralement opposées du côté des groupes d'intérêt.

«Nous applaudissons le gouvernement du Québec pour avoir décidé de respecter le consensus scientifique à l'effet qu'une majoration des taxes sur le tabac aura un impact direct et important sur le tabagisme», s'est réjouie Suzanne Dubois, directrice générale de la division québécoise de la Société canadienne du cancer.

Les cigarettiers, eux sont tombés à bras raccourcis sur le gouvernement de Philippe Couillard, qu'il a accusé par voie de communiqué d'avoir pris une décision «irresponsable» et «insouciante» qui fera essentiellement le bonheur d'un seul groupe au sein de la société: les contrebandiers.

«Il semble que les libéraux aient finalement penché du côté d'un groupe restreint de lobbyiste qui fait du bruit et dont l'objectif consiste à éradiquer à tout prix l'industrie légale, et ce, peu importe l'incidence sur le commerce illégal du tabac», s'est insurgé Éric Gagnon, directeur aux affaires corporatives chez Imperial Tobacco Canada.

Le président du Conseil du patronat, Yves-Thomas Dorval, ne voit pas non plus cette mesure d'un bon oeil, craignant lui aussi une résurgence du phénomène de contrebande.

«À un moment donné, le pourcentage des taxes dans le produit fait en sorte que les gens disent: "Bon, c'est rendu trop, alors je vais aller chercher mes produits en contrebande "», a-t-il avancé.

Boissons alcoolisées

Le gouvernement dit accéder à une revendication de longue date des exploitants d'établissements de restauration et de débits de boisson en uniformisant les taux de taxe sur l'alcool.

Pour rétablir une «neutralité fiscale», Québec va ainsi hausser dès le 1er août les taxes sur les boissons alcoolisées vendues en épicerie, dans les dépanneurs et à la Société des alcools du Québec (SAQ) tout en diminuant celles des boissons destinées à une consommation sur place, soit dans les restaurants et les bars.

L'impact de cette uniformisation sur le prix des produits vendus pour consommation à domicile se traduira par des hausses d'environ 5 cents par bouteille de bière de 341 ml, 24 cents pour une bouteille de vin de 750 ml et 37 cents pour une bouteille de spiritueux de 1,14 litre.

Quant à la diminution de la taxe sur les boissons alcoolisées vendues pour consommation sur place, elle se chiffrera à environ 7 cents par bouteille de bière de 341 ml, 92 cents pour une bouteille de vin de 750 ml et 1,40 $ pour une bouteille de spiritueux de 1,14 litre.

Le ministre des Finances s'est dit confiant que cette baisse se répercutera sur la facture des clients. La concurrence entre les tenanciers devrait faire en sorte que cela se produise, a-t-il soutenu en conférence de presse, mercredi.

«Je ne pense pas qu'il y ait un cartel des restaurants au Québec, donc les mécanismes normaux de marché vont s'assurer que cela se fera», a affirmé M. Leitao.

Québec évalue que cet ajustement fiscal permettra de générer des recettes additionnelles de 36 millions $ pour 2014-2015 et de 55 millions $ pour 2015-2016.

À compter de l'an prochain, une partie de cette taxe sera versée au Fonds des générations.