Le Portugal a passé vendredi avec succès le dernier examen de ses comptes par la troïka de ses créanciers (UE-FMI-BCE), franchissant ainsi l'ultime étape vers la sortie en douceur de son programme d'assistance financière, à l'instar de l'Irlande.

«Nous avons réussi la dernière évaluation. Le Portugal pourra retrouver la part de souveraineté qui lui manquait», s'est félicité devant la presse le vice-premier ministre Paulo Portas.

«Ce programme a demandé des efforts très douloureux aux Portugais. C'est une page qui se tourne, mettant fin à ce que j'ai décrit comme un protectorat», a-t-il relevé.

Ce satisfecit ouvre la voie au déboursement d'un dernier chèque de 2,6 milliards d'euros, sur un total de 78 milliards prévus par le plan d'aide mis en place en mai 2011.

Le Portugal deviendra ainsi le 17 mai le deuxième pays sous assistance financière de la zone euro à s'affranchir de la tutelle de ses créanciers, après trois ans de rigueur sans précédent qui s'est traduite par de lourds sacrifices pour la population.

Le départ de la troïka, salué par les Portugais, n'est toutefois pas synonyme de fin de l'austérité. Le gouvernement a présenté mercredi sa stratégie budgétaire d'ici 2018, qui confirme la poursuite de la politique de rigueur, même si l'effort demandé aux retraités et aux fonctionnaires a été quelque peu allégé.

Il y a trois ans, «le Portugal était au bord du précipice. Le pays avait à peine plus de 300 millions d'euros en caisse, pas assez pour payer les fonctionnaires jusqu'à la fin de 2011», a rappelé fin mars le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso.

Après avoir résisté pendant des mois à la pression des marchés, le premier ministre socialiste sortant José Socrates s'était finalement résolu le 6 avril 2011 à adresser une demande d'aide financière à la Commission européenne, suivant l'exemple de la Grèce et de l'Irlande.

Lourd héritage

Le bilan du passage de la troïka au Portugal est mitigé: grâce à une forte hausse des impôts et des coupes sévères dans les dépenses publiques, les déficits ont pu être réduits de 9,8 % en 2010 à 4,9 % en 2013. La dette a cependant continué à exploser, passant de 94 % à 129 % du PIB.

«L'intervention rapide de la troïka a stoppé l'hémorragie. Mais le problème est loin d'être résolu, car la maladie persiste, avec un endettement public et privé très élevé», a commenté à l'AFP Joao Luis César das Neves, professeur d'économie à l'Université catholique de Lisbonne.

Le taux de chômage s'est envolé de 12 % à 16,3 %, et le PIB a chuté en trois ans de 6 %, avant de reprendre des couleurs, avec une hausse de 1,2 % attendue en 2014.

«Le chômage, l'émigration et la pauvreté ont augmenté alors que les revenus et la consommation ont baissé», a résumé Manuel Caldeira Cabral, professeur d'économie de l'université de Minho. Pour lui, «la troïka laisse un lourd héritage» qui pèsera sur la capacité du pays à honorer ses dettes.

Malgré des difficultés persistantes, le Portugal devrait opter pour une sortie de son plan d'aide sans filet de sécurité, à l'instar de l'Irlande, profitant de la chute de ses taux d'emprunt et de ses importantes réserves financières.

«Nous sommes en mesure de montrer aux Portugais que le chemin parcouru jusque-là nous permet d'avancer par nos propres moyens à partir de maintenant», a déclaré jeudi le premier ministre Pedro Passos Coelho, laissant entendre que le pays s'apprête à suivre l'exemple de l'Irlande.

M. Passos Coelho annoncera sa décision dimanche, à la veille de la réunion des ministres des Finances de la zone euro qui se penchera sur le sort du Portugal.

«Les investisseurs sont sereins face à une éventuelle sortie sans filet de sécurité», a déclaré vendredi Joao Moreira Rato, président de l'agence portugaise de la dette.