La présentation du budget du gouvernement du Québec a souvent donné lieu au dévoilement de mesures audacieuses qui ont fait époque. C'est lors du budget de Jacques Parizeau que le Québec s'est doté du régime d'épargne-actions du Québec (REA), une mesure incitative qui a favorisé la capitalisation de futurs fleurons de l'économie comme Bombardier et Cascades.

En prévision du budget de demain, La Presse Affaires fait un retour en arrière et a demandé à cinq experts des finances publiques de nommer des initiatives qui ont marqué les esprits.

Hausse de la TVQ et fin (temporaire) du déséquilibre fiscal

Dates: 19 mars 2009 et 30 mars 2010

Ministres des Finances: Monique Jérôme-Forget et Raymond Bachand

Le gouvernement s'y est pris par deux fois pour récupérer l'espace fiscal laissé vacant par Ottawa à la suite de la baisse de la TPS de 7,5% à 5%. Le Québec a haussé la TVQ d'un point de pourcentage le 1er janvier 2011 et d'un autre point le 1er janvier suivant.

Ces hausses impopulaires ont permis de régler momentanément le fameux déséquilibre fiscal entre le fédéral et le Québec. C'est la rondelette somme d'environ 3 milliards qui entre annuellement dans les coffres du Trésor grâce à cette mesure. «Les points de TVQ que Québec a repris ont été utiles parce qu'on n'avait peut-être pas les moyens d'avoir baissé l'impôt sur le revenu en 2008», fait remarquer a posteriori Luc Godbout, professeur de fiscalité.

Baisse de l'impôt des particuliers de près de 1 milliard

Date: 24 mai 2007

Ministre des Finances: Monique Jérôme-Forget

Profitant d'une hausse des paiements de transferts du fédéral, le gouvernement québécois ajoute 700 millions aux baisses d'impôt de 250 millions déjà promises l'année précédente. Cette baisse d'impôt, totalisant donc 950 millions, représente pour une famille de quatre un gain de 2000$ par an. Pour une personne seule, le gain peut atteindre 1000$ par an.

«Cette décision n'a peut-être pas été nécessairement la meilleure chose à faire», dit aujourd'hui Yves St-Maurice, économiste en chef adjoint au Mouvement Desjardins, en regardant l'état des finances publiques.

Lancement du programme d'infrastructures de 30 milliards

Date: 24 mai 2007

Ministre des Finances: Monique Jérôme-Forget

Dans ce même budget de 2007-2008, la ministre des Finances annonce l'important chantier du renouvellement des infrastructures vieillissantes du Québec.

«L'impact a été très important durant la crise financière, souligne l'économiste Yves St-Maurice, du Mouvement Desjardins. Le programme a aidé à maintenir la croissance économique au Québec.»

L'enveloppe budgétaire s'élevait à 30 milliards pour cinq ans. L'annonce est survenue quelques mois après l'effondrement du viaduc du boulevard de la Concorde, à Laval, le 30 septembre 2006, tragédie qui avait fait cinq morts et six blessés.

Création du Fonds des générations

Date: 23 mars 2006

Ministre des Finances: Michel Audet

En 2006, le déficit zéro est devenu une réalité, mais le problème de la dette demeure entier. Michel Audet prend la balle au bond et annonce la création du Fonds des générations.

«Il y a un message très clair qu'on doit s'attaquer à la dette en utilisant la rente des ressources naturelles», dit Michel Audet, dans un entretien.

Certains trouvent plus prudent de rembourser la dette directement, plutôt que de déposer à la Caisse de dépôt et placement en espérant que le rendement obtenu excède le coût d'emprunt du gouvernement. Les mauvais rendements de la Caisse en 2008 sont venus leur donner momentanément raison.

Quoi qu'il en soit, Michel Audet se réjouit qu'aucun gouvernement, peu importe sa couleur, ne se soit servi à d'autres fins de l'argent du fonds, dont le solde approche maintenant les 6 milliards.

Crédits d'impôt et jeux vidéo

Date: 25 mars 1997

Ministre des Finances: Bernard Landry

En 1996, le lobbyiste Sylvain Vaugeois convainc Québec de financer la moitié des salaires des emplois que la société de jeux vidéo Ubisoft créerait à l'avenir à Montréal. «La jeune femme qui travaille chez Ubisoft, c'est vrai qu'elle nous a coûté cher, mais elle nous a rapporté de l'impôt en maudit», dit aujourd'hui Bernard Landry, qui a autorisé l'aide à Ubisoft à l'époque.

La mesure controversée fait des petits par la suite, dans le multimédia et les affaires électroniques.

«C'est clair que la mesure a changé le profil économique du Québec et de Montréal, dit Stéphane Leblanc, fiscaliste associé chez Ernst&Young. On est devenus une plate-forme importante dans le développement de jeux vidéo.»

Les technologies de l'information et des communications comptent environ 130 000 emplois au Québec.