Les hypothèques parapluie, qui permettent aux institutions financières d'utiliser la valeur de votre maison pour garantir une multitude d'autres dettes, telles que vos cartes de crédit ou marges de crédit, représentent maintenant la majorité des contrats de prêts hypothécaires consentis.

Mais les consommateurs ne comprennent pas toujours les conséquences possibles d'un tel contrat, qui risque de les attacher à leur institution financière et peut restreindre leur pouvoir de négociation. Dans le budget dévoilé mardi, le ministre des Finances, Jim Flaherty, a promis d'exiger de meilleures informations pour les emprunteurs au sujet des hypothèques parapluie, appelées hypothèques subsidiaires dans le jargon financier.

S'ils ignorent encore quelles obligations seront imposées aux institutions financières, les groupes de défense des consommateurs se réjouissent de voir cette question apparaître sur le radar d'Ottawa.

Il est temps que les gouvernements interviennent parce que, selon eux, les hypothèques parapluie...

1- ... sont mal comprises par les emprunteurs

La majorité des emprunteurs ne savent pas qu'ils ont contracté une hypothèque parapluie, qui permet au prêteur de prendre leur propriété en garantie collatérale pour d'autres dettes, actuelles ou futures, ou encore ils n'en comprennent pas toute la portée, révèle une étude réalisée en 2012 par Option consommateurs. «Ces contrats sont complexes, ils font parfois plus de 50 pages. Même des juristes ne s'y retrouvent pas, souligne Caroline Arel, directrice générale de l'organisme. Et les employés des institutions financières ne sont pas toujours bien formés pour les expliquer aux clients.»

Selon Denis Doucet, directeur chez Multi-Prêts Hypothèques, les aspects pratiques de ces prêts séduisent les emprunteurs: marge de crédit préapprouvée, avec un taux d'intérêt plus bas, possibilité d'accès à des fonds supplémentaires à peu de frais, sans passer devant le notaire, etc. «Mais les gens ne savent pas qu'ils peuvent être désavantagés s'ils veulent changer d'institution ou si leur situation personnelle change», note M. Doucet.

2- ... peuvent avoir des conséquences insoupçonnées

Des exemples des désavantages?

Si un consommateur emprunte avec une autre personne, par exemple son conjoint, la propriété hypothéquée pourrait garantir toutes les dettes actuelles et futures du conjoint, sans même que le coemprunteur soit avisé des nouveaux emprunts. Si le couple se sépare et vend la maison, l'un des conjoints pourrait être obligé de rembourser non seulement son prêt hypothécaire, mais aussi la marge de crédit de son «ex» pour obtenir la radiation de son hypothèque.

À la fin du remboursement de son hypothèque, l'emprunteur devra aussi rembourser toutes les dettes garanties par la propriété avant d'obtenir sa quittance.

À la limite, un propriétaire pourrait perdre sa maison s'il a une dette impayée sur sa carte de crédit et que cette dette est garantie par sa propriété.

3- ... favorisent le surendettement

Les institutions financières prêtent parfois des montants qui dépassent la valeur de la propriété prise en garantie en tablant sur l'augmentation future de sa valeur. Des maisons sont parfois hypothéquées à 125%.

Cette situation favorise le surendettement, déplore Me Charlaine Bouchard, notaire et professeure à la faculté de droit de l'Université Laval, qui s'intéresse depuis longtemps à ces hypothèques. «On donne aux consommateurs accès à des montants plus élevés que ce qu'ils ont demandé au départ, ce qui les incite à s'en servir, souligne Me Bouchard. Étant donné la situation de surendettement des ménages, il faudrait interdire de telles pratiques.»

De plus, un consommateur qui se trouverait en difficulté financière ne pourrait pas obtenir une hypothèque de deuxième rang sur sa propriété auprès d'un autre prêteur, si son premier prêteur a pris la totalité de sa valeur en garantie. Il serait donc à la merci de son premier créancier.

4- ... sont utilisées par les banques pour garder leurs clients

Un consommateur lié avec son prêteur par une hypothèque parapluie pourrait avoir plus de difficulté à changer d'institution au terme de son prêt. «Ceux qui veulent transférer leur prêt doivent payer toutes leurs dettes et peut-être repasser chez le notaire, avec les coûts que ça occasionne, indique Denis Doucet, de Multi-Prêts. En raison des frais, ça ne vaut parfois pas la peine de changer de prêteur, même si on leur offre un meilleur taux ailleurs.»

À la signature du contrat, les institutions financières offrent souvent de très bons taux d'intérêt aux emprunteurs. Mais au renouvellement, les taux sont beaucoup moins intéressants, a remarqué M. Doucet. «Les consommateurs perdent leur pouvoir de négociation.»

«C'est une façon pour les banques d'attacher leurs clients à vie», souligne Me Bouchard.