Les militants d'un nouveau parti anti-euro ont clamé leur objectif d'entrer au Parlement allemand cet automne pour mener leur combat contre la monnaie unique qui, selon eux, «détruit l'Europe», lors de leur congrès fondateur dimanche à Berlin.

«C'est parti, c'est parti !», la salle comble de l'hôtel 5 étoiles où était organisé le rassemblement, salue debout les derniers mots du discours de Bernd Lucke, porte-parole du parti «Alternative pour l'Allemagne», affirmant que «le moment est mûr» pour envisager d'accéder au Bundestag (chambre basse du Parlement).

Avec, depuis sa création en février, quelque 7 500 adhérents et donateurs revendiqués, et 1 400 membres présents dimanche dans la capitale, le mouvement «Alternative für Deutschland» (AFD) croit en ses chances.

Dans le hall du congrès, à quelques mètres d'un stand qui présente un livre intitulé «Euro - lieu du crime», Heiner Garbe, journaliste indépendant de Dortmund (ouest), mise sur «6 % ou plus» en septembre prochain, pour les prochaines législatives.

Un ancien billet de 100 DM accroché à la poche de sa veste de tweed, il répète aux médias allemands et étrangers ses critiques contre la politique européenne d'Angela Merkel et son désir d'un nouveau souffle conservateur puisque «la CDU a glissé à gauche».

La colère et la déception vis-à-vis de cette politique ou plus largement de l'évolution de l'Union européenne constituent le coeur des motivations des militants présents.

«L'euro détruit l'Europe», affirme à l'AFP Andreas Homuth, 55 ans, propriétaire d'un golf, qui insiste: «nous voulons l'Europe, mais pas celle qui est actuellement mise en place».

«Je souhaite l'Europe d'avant 2002», explique Jonas Ahlbäumer, un étudiant bavarois en génie mécanique de 22 ans, qui tranche, avec son sweat à capuche dans un public plutôt âgé portant veste, souvent avec cravate.

Le sentiment que l'Allemagne n'en finit plus de payer pour les pays endettés de la zone euro domine les discours, tout comme l'impression d'une Europe toujours plus inhumaine et technocratique.

«Je comprends les Grecs qui manifestent. A leur place je ferais sans doute la même chose», déclare Hans Liesegang, ancien militaire de 64 ans, venu de Poméranie (est) tandis que le porte-parole du parti dénonce «une Grèce gouvernée non plus par le peuple, mais par la troïka».

La détérioration de l'image de l'Allemagne inquiète les militants. «Je crains que tout l'acquis des décennies de l'après-guerre dans ce domaine soit réduit à néant», dit M. Liesegang.

L'idée que les «partis politiques établis» ont perdu tout contact avec les attentes de l'électorat est l'autre grand message que souhaite mettre en avant «Alternative pour l'Allemagne».

«Nous vivons depuis trois ans une dégénérescence effrayante du parlementarisme allemand», a déclaré M. Lucke, jugeant que «cette crise a montré combien presque tous les députés du Bundestag ont perdu leurs opinions et se sont transformés en simples auxiliaires débordés du gouvernement».

«Ni de gauche, ni de droite», le nouveau parti souhaite dire à la coalition au pouvoir qu'il y a «une alternative à sa politique», a-t-il lancé, salué par des «Jawohl» («oui bien sûr») sonores.

Comptant déjà des fédérations dans quatre États régionaux, dont la Bavière (sud), l'AFD prévoit de couvrir prochainement l'ensemble du territoire.

Selon le dernier baromètre politique publié vendredi par la ZDF, plus d'un quart des Allemands interrogés verraient d'un bon oeil une sortie de l'euro et 17 % se disent prêts à voter pour un parti défendant cette option.