Un ex-inspecteur à la conformité de l'Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM) soutient avoir été congédié pour son insistance à demander la poursuite d'une enquête au sujet d'allégations de transactions douteuses réalisées par des représentants d'une importante firme de courtage établie à Montréal.

David A. Kennedy a déposé une action de 1,6 million de dollars contre l'OCRCVM à la suite de ce licenciement qu'il estime injustifié survenu en septembre 2011. «Le plaignant a été congédié parce qu'il a simplement exercé sa responsabilité de mettre les intérêts des investisseurs au premier plan, au meilleur de ses connaissances», dit la requête soumise à la Cour supérieure.

M. Kennedy ne nomme pas la société de courtage et n'a pas voulu l'identifier au cours d'un entretien avec La Presse Affaires, en raison des engagements de confidentialité qui le lient à l'OCRCVM, a-t-il expliqué. Sa poursuite fait référence au dossier NJL, mais le document précise que l'abréviation n'a rien de commun avec le nom de la société.

L'ex-inspecteur y raconte en détail la genèse de son intérêt professionnel pour NJL et ses soupçons quant au fait que des représentants de la firme ont multiplié les transactions au détriment de leurs clients, dans le seul but de gonfler leurs commissions, au printemps 2009. Il reproche à l'Organisme de ne pas avoir pris ses préoccupations au sérieux et de ne pas avoir réalisé une enquête approfondie avant de conclure qu'il n'y avait pas lieu de sévir contre NJL.

Jointe par La Presse Affaires, Carmen Crépin, vice-président Québec de l'OCRCVM, n'a pas voulu faire de commentaire au sujet de la poursuite de M. Kennedy - parce que le litige est dorénavant à l'attention d'un tribunal - mais elle a indiqué que l'organisme va «contester vigoureusement» toutes les allégations de son ex-employé. Dans une lettre adressée à M. Kennedy en novembre 2011, l'Organisme a soutenu que son départ n'a aucun lien avec le dossier NJL.

David A. Kennedy travaillait pour la société TradeFreedom Securities à titre de vice-président et chef de la conformité lorsque l'OCRCVM lui a proposé un emploi d'inspecteur principal à son service de la conformité, au cours de l'été 2007, dit la poursuite pilotée à l'origine par le cabinet Tutino Edwards Joseph, mais qui n'est plus au dossier depuis août dernier. M. Kennedy assure être actuellement à la recherche d'un avocat.

En juillet 2008, il a commencé à s'intéresse au dossier NJL, qui a rapidement été référé au département des enquêtes. Consulté par son supérieur un an plus tard sur cette affaire qu'il continuait à suivre sans y être directement impliqué, M. Kennedy dit avoir à nouveau expliqué ses préoccupations concernant le comportement des représentants de NJL et avance avoir même soumis cinq cas semblables précédemment examinés par l'OCRCVM et ayant mené à des sanctions disciplinaires.

Rencontre au sommet

Insatisfait de la progression du dossier par la suite, M. Kennedy a contacté de nombreuses personnes à l'interne au cours des mois suivants et s'est adressé directement à la direction de l'Organisme. Il soutient avoir participé à une téléconférence sur le dossier NJL avec le président et chef de la direction et un des vice-présidents de l'OCRCVM, le 25 octobre 2010. Il aurait préparé après coup un rapport de 22 pages à l'intention de Mme Crépin.

M. Kennedy dit avoir eu en avril 2011 la première évaluation négative de son travail depuis son entrée en fonction. Pendant ses vacances, au mois d'août, il aurait reçu un courriel indiquant que le dossier NJL était clos et un appel, le 1er septembre, pour l'aviser que la direction des ressources humaines voulait le rencontrer. Le 6 septembre, deux options lui ont été offertes: continuer à travailler à l'Organisme avec la promesse d'améliorer certaines aptitudes, notamment de communication, ou quitter son emploi. M. Kennedy dit avoir choisi la première, mais aurait tout de même été congédié le 20 septembre 2011.