Produits forestiers Résolu invoque un contrat remontant à 1926 afin de ne pas se soumettre à une réclamation de plus de 3 millions de dollars d'Hydro-Québec pour le paiement de redevances au Fonds des générations.

L'entreprise a allongé la somme sous protêt à la suite d'une entente intervenue avec la société d'État, en avril dernier, notamment afin d'éviter l'ajout d'intérêts, mais elles ont convenu de déférer le litige au tribunal à la faveur d'une requête en jugement déclaratoire.

La dispute a trait à la somme exigée par Hydro-Québec pour la consommation d'électricité de l'usine de Résolu à Gatineau, dont les activités sont interrompues depuis mai 2010. Selon la demande déposée cette semaine par Résolu au palais de justice de Montréal, Hydro-Québec lui a envoyé une facture de plus de 3 millions pour un ajustement du prix lié aux redevances que le producteur d'électricité doit verser au Fonds des générations.

Le gouvernement québécois a créé le Fonds en 2006 avec la Loi sur la réduction de la dette. Depuis sa promulgation, Hydro-Québec est tenue de souscrire au Fonds à hauteur de 0,625$ par 1000 kilowatts-heures vendus, plus l'inflation annuelle composée.

Envoi tardif

Résolu soutient dans sa requête qu'Hydro ne lui a envoyé sa première réclamation d'ajustement de prix, sous prétexte du Fonds des générations, qu'en décembre 2011, bien qu'elle y soit soumise depuis janvier 2007.

Mais envoi tardif ou pas, la société papetière argue que la société d'État ne peut rien lui exiger. Résolu se base sur les termes du contrat d'électricité de l'usine de Gatineau conclu en 1926 entre Gatineau Power, devenue une filiale d'Hydro lors de la nationalisation de l'électricité dans les années 1960, et la Canadian International Paper, dont Résolu est détentrice des droits à la suite d'une série de transactions au fil des ans. L'entente avait un premier terme de 40 ans, puis a été renouvelée aux 10 ans. Sa plus récente version fixe l'échéance au 18 juillet 2026.

Selon Résolu, le contrat ne prévoit des ajustements de tarif - établi au prix fixe de 2,234$/kW par mois, selon la requête - que dans l'éventualité de nouvelles taxes ou charges gouvernementales, ce que n'est pas la redevance due par Hydro au Fonds des générations, argue la société. Et elle cite le ministre des Finances du Québec en 2006, Michel Audet, lors du discours sur le budget créant le Fonds des générations. «Pour alimenter le Fonds des générations, il n'est pas envisageable d'accroître les taxes et les impôts actuels...».

L'intention des parties

Qui plus est, l'usine de Gatineau n'a pas d'entente avec Hydro, mais avec Gatineau Power, et cette dernière n'est pas assujettie aux redevances du Fonds. Seule Hydro l'est, ajoute l'entreprise. «Si [Hydro-Québec] paie des redevances[...], elle ne peut en réclamer le paiement à [Résolu] puisqu'elle n'est pas partie au contrat [entre Résolu et Gatineau Power], écrit le cabinet montréalais Stikeman Elliott, représentant de Résolu.

Finalement, Résolu invoque l'intention des parties au moment de la signature de l'entente de 1926. «L'article 20 du contrat vise à prémunir le vendeur d'électricité (Gatineau Power, qui était à l'époque une entité indépendante) de taxes imposées par un tiers; l'intention des parties n'était pas de permettre au vendeur d'imposer unilatéralement à l'acheteur un ajustement du prix de vente et d'augmenter ses revenus ou ceux d'une partie liée, au détriment de l'acheteur».

La société papetière demande donc à la Cour supérieure de statuer que les redevances du Fonds des générations ne peuvent lui être réclamées et que les 3,1 millions qu'elle a versés sous protêt lui soient restitués, plus les intérêts.