Les automobilistes montréalais ont eu une bien vilaine surprise en fin de journée mardi. Plusieurs détaillants de Montréal ont affiché un prix de 1,53$ pour le litre d'essence. Il s'agit du prix le plus élevé depuis 2008.

La présidente-directrice générale de l'Association québécoise des indépendants du pétrole, Sonia Marcotte, a expliqué qu'auparavant, le prix était carrément trop bas.

«À 139,9 cents le litre, les détaillants perdaient de l'argent, a-t-elle déclaré à La Presse Affaires. Ils perdaient 2,7 cents à chaque litre.»

Elle a affirmé que la marge de raffinage était très élevée, ce qui avait contribué à comprimer la marge des détaillants.

Le vice-président de la division de l'est de l'Institut canadien des produits pétroliers, Carol Montreuil, a indiqué qu'historiquement, la marge des détaillants se situait autour de 5 ou 6% sur une base annuelle.

«S'il y a des périodes où la marge est près de zéro, il y a également des périodes où elle s'approche de 10%, a-t-il soutenu. C'est le jeu de la moyenne, de la volatilité. Oui, les gens sont exaspérés lorsqu'il y a une hausse de 10 à 12 cents, mais ils ne regardent pas le fait que nous étions partis d'un prix qui était trop bas.»

Il a fait observer que le prix du baril de pétrole était particulièrement élevé depuis quelques semaines, quelques mois, notamment en raison des tensions entre l'Iran, Israël et les États-Unis.

Mme Marcotte a noté que cette tension avait un impact plus sérieux sur le brent de la mer du Nord que sur le light sweet crude (WTI). Ainsi, le cours du baril de brent a gagné 59 cents US hier sur l'Intercontinental Exchange, à Londres, pour clôturer à 115,40$US pour livraison en octobre. Le baril de WTI a gagné 63 cents pour atteindre 97,17$US.

«Historiquement, les deux avaient un prix semblable, mais ce n'est plus le cas, a affirmé Mme Marcotte. Or, au Québec, on utilise le brent de la mer du Nord, alors qu'en Ontario et vers l'Ouest, on utilise plutôt le WTI, beaucoup moins cher.»

M. Montreuil a également montré du doigt la tension sur les marchés à l'approche d'une annonce de la Réserve fédérale américaine (Fed), demain. On s'attend à ce que la Fed mette en place des mesures de soutien de l'économie, notamment par l'entremise d'une injection de liquidités.

«Tous les marchés des matières de base sont grandement influencés par cette anticipation à ce qu'il y ait beaucoup de liquidités qui inondent les marchés dans les jours, les semaines à venir, a déclaré M. Montreuil. Le marché pétrolier est un peu à la merci de ce qui se passe au niveau géopolitique et macroéconomique mondial.»

Le porte-parole de CAA-Québec, Cédric Essiminy, a blâmé la précipitation des détaillants.

Le CAA s'attend à ce que le prix du gros passe de 1,39$ à 1,43$ le litre à partir d'aujourd'hui.

«Le prix du gros n'a pas encore augmenté, il ne sera fixé que mercredi (aujourd'hui), mais les détaillants ne se sont pas gênés pour augmenter dès maintenant le prix à la pompe», a-t-il déploré.

Il a toutefois rappelé que, dans le passé, les détaillants avaient parfois réajusté le prix de l'essence à des niveaux plus raisonnables après l'avoir fortement augmenté.

«Si le coût d'acquisition est à 1,43$ et que le prix à la pompe demeure à 1,53$, on aura une marge beaucoup trop élevée, a soutenu M. Essiminy. S'il y a matière à dénonciation, on va dénoncer.»