La Grèce a évité la faillite en obtenant vendredi un accord de ses créanciers privés pour participer à la plus grosse opération de réduction de dette de l'histoire et un feu vert de ses partenaires de la zone euro pour lui verser une aide de 130 milliards d'euros (171 milliards de dollars).

Cette annonce a déclenché une vague de réactions enthousiastes au sein de la zone euro, engluée depuis plus de deux ans dans la crise de la dette. Son tout nouveau président, fraîchement reconduit, Herman Van Rompuy, a estimé que «le tournant dans la crise est atteint». «Nous allons vers une mer plus calme», a-t-il affirmé.

Le président français Nicolas Sarkozy a lui jugé que «la page de la crise financière est en train de se tourner» tandis que le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble s'est voulu plus prudent.

«Nous ne sommes pas sortis d'affaire, mais nous avons fait un grand pas important», a-t-il déclaré devant la presse.

Au terme de neuf mois de négociations ardues, Athènes a finalement obtenu vendredi la garantie d'effacer au moins 100 milliards d'euros de dette.

L'opération -la plus grosse de ce type jamais réalisée au monde- doit permettre de considérablement alléger la dette du pays qui s'enfonce dans une profonde récession, le PIB ayant affiché en recul de 7,5% au quatrième trimestre 2011, selon des chiffres officiels publiés vendredi également.

En 2020, la dette souveraine grecque ne doit plus représenter que 120,5% du PIB contre plus de 160% actuellement, un taux jugé supportable par les créanciers, même s'il reste très élevé.

Au final, la Grèce a obtenu d'effacer près de 95,7% de sa dette détenue par des créanciers privés (206 milliards d'euros sur un total de plus de 350 milliards).

Pour parvenir à un tel résultat, elle a dû se résoudre à déclencher des clauses imposant aux créanciers récalcitrants de se rallier à l'offre.

Cette décision a conduit Fitch à abaisser la note de la Grèce et a placé le pays en «défaut partiel» après l'annonce des résultats de l'échange de dette. La note du pays devrait être révisée une fois l'opération finalisée.

Concrètement, l'échange des titres doit avoir lieu lundi pour les obligations de droit grec. Les détenteurs de titres non-soumis au droit grec bénéficient d'un délai supplémentaire, jusqu'au 23 mars, pour apporter les plus de 7 milliards d'obligations qui manquent encore à l'appel.

En dépit de ces problèmes à régler, le ministre grec des Finances Evangélos Vénizélos a exprimé vendredi sa «gratitude» à l'égard de tous les créanciers de la Grèce «qui ont soutenu» le programme de réforme et d'ajustement du pays et «qui ont partagé les sacrifices du peuple dans son effort historique».

Il s'est félicité d'une participation «massive» à l'opération, qui constitue «un vote de confiance dans les perspectives de rétablissement de l'économie grecque» et la capacité de la zone euro à tourner la page de la crise du surendettement.

Fort de ces résultats, le président de l'Eurogroupe, Jean-Claude Juncker, a fait savoir que «les conditions» étaient «réunies» pour que les pays de la zone euro versent les aides promises à la Grèce en octobre dernier, après une conférence téléphonique des ministres des Finances de ce forum.

Ce feu vert va permettre à Athènes de rembourser une échéance de 14,5 milliards d'euros d'ici le 20 mars et d'éviter une faillite désordonnée, aux conséquences imprévisibles.

Dans les faits, le versement des sommes va se faire en plusieurs étapes, mais la zone euro a déjà entamé le processus vendredi en débloquant 35,5 milliards d'aides pour les banques qui ont consenti à échanger leurs titres de dette, a indiqué M. Schäuble. Le reste du paquet --94,5 milliards d'euros sous forme de prêts essentiellement -- sera débloqué vraisemblablement la semaine prochaine.

Les dirigeants européens attendent désormais un engagement «conséquent» du Fonds monétaire international (FMI) sur le montant de sa contribution au deuxième programme pour la Grèce, malgré les réticences de l'institution. Le chiffre de 13 milliards d'euros d'aide du FMI a circulé jusqu'ici.

Une réunion doit se tenir jeudi prochain sur le sujet. En attendant, la directrice générale du FMI est restée muette sur le sujet vendredi mais a salué l'opération de restructuration de dette.

Vendredi, un comité international (ISDA) doit encore décider si le recours aux clauses d'action collective entraîne ou non le paiement des assurances souscrites pour se prémunir contre un défaut de paiement, les fameux CDS.

Ces assurances peuvent être déclenchées dès lors qu'il y a une modification dans le schéma de remboursement d'un emprunteur, comme le recours à des clauses contraignantes pour les créanciers dont la démarche n'est plus alors «volontaire».