L'ex-courtier Louis-Philippe Séguin poursuit sa longue bagarre judiciaire contre l'Organisme canadien de réglementation du commerce des valeurs mobilières (OCRCVM) en Cour d'appel, où il conteste un récent jugement de la Cour du Québec confirmant sa culpabilité à une infraction réglementaire.

Toutefois, la même décision, rendue à la mi-décembre par le juge Henri Richard, annule la radiation permanente prononcée contre M. Séguin en mars 2008 par le comité de discipline de l'OCRCVM (dont l'acronyme à l'époque était ACCOVAM) et confirmée par le Bureau de décision et de révision (BDR), en décembre 2010. Le magistrat réduit également de 77 000$ à 20 000$ l'amende infligée à l'ex-courtier.

La Cour d'appel a accordé à M. Séguin, il y a une dizaine de jours, la permission de lui soumettre un appel sur sa culpabilité, et a fait de même pour l'OCRCVM, qui réclame que les sanctions soient rétablies.

M. Séguin a été poursuivi et condamné pour avoir refusé de collaborer à une enquête de l'OCRCVM sur des transactions auxquelles le nom de l'ex-courtier Martin Tremblay, des Bahamas, était aussi associé. Ce dernier a écopé de 48 mois de prison aux États-Unis pour blanchiment d'argent, en mars 2007, dans une affaire non liée.

L'OCRCVM a avisé M. Séguin qu'il était l'objet d'une enquête en juin 2005, selon le compte rendu de la décision du juge Richard. Le courtier a remis sa démission le 30 décembre suivant, puis a reçu une convocation d'un enquêteur de l'Organisme, le 25 janvier 2006.

M. Séguin a rencontré des représentants de l'Organisme le 13 mars 2006 et s'est rendu au rendez-vous avec son avocat et un sténographe. Mais les enquêteurs ont refusé la présence du sténographe.

M. Séguin a donc quitté les lieux, puis a avisé l'OCRCVM qu'il ne se soumettrait à l'interrogatoire que s'il pouvait obtenir un enregistrement des propos échangés. L'Organisme et lui ne se sont pas entendus et l'OCRCVM a déposé une plainte pour refus de collaborer le 22 mars 2006.

M. Séguin a d'abord contesté la compétence du comité de discipline de l'OCRCVM à son sujet, puisqu'il n'était plus courtier au moment de sa convocation.

La Cour supérieure a rejeté sa requête en mars 2007. Le comité de discipline a également écarté ses prétentions à ce sujet, puis a entendu la plainte et l'a condamné. M. Séguin n'a pas eu plus de succès en révision judiciaire devant le BDR.

Louis-Philippe Séguin s'est alors tourné vers la Cour du Québec. Mais le juge Henri Richard a estimé, avec un bémol, que les précédentes décisions sur le fond étaient justifiées, vu les décisions précédentes des tribunaux dans des sujets similaires. Mais il a révisé la sévérité des sanctions.

«Le Tribunal constate que ni la formation d'instruction [comité de discipline] de l'ACCOVAM ni le BDR n'appliquent un des principes importants en matière d'imposition de sanctions, soit la gradation de celles-ci. La preuve démontre que Me Séguin [il est aussi avocat, NDLR] en était à une première infraction», écrit le juge Richard.

«En conséquence de ce qui précède, le Tribunal conclut que le BDR ne rend pas une décision raisonnable lorsqu'il avalise les sanctions imposées», ajoute-t-il.

Sur le fond, le magistrat estime que Louis-Philippe Séguin ne pouvait pas imposer la présence d'un sténographe puisqu'une telle éventualité n'était pas incluse dans l'entente écrite le liant à l'OCRCVM.

«En droit, il est impossible qu'une partie à un contrat puisse imposer à l'autre des conditions qui n'y apparaissent pas. Me Séguin tente d'imposer à l'enquêteur D'Astous une condition et, ainsi, de s'arroger un droit qui n'est pas prévu au contrat. Sa position est insoutenable en droit.»

La Presse Affaires a joint le bureau du représentant de M. Séguin, Philippe Frère, afin d'avoir des commentaires, mais l'avocat ne nous a pas rappelé.