La zone euro se dirige vers l'adoption d'un plan de sauvetage de la Grèce d'une ampleur sans précédent dans le monde après le vote dimanche du programme d'austérité exigé en contrepartie par ses créanciers, qui a été salué lundi tant par Bruxelles que par Berlin.

Pour le commissaire européen aux Affaires économiques Olli Rehn, l'approbation du plan de rigueur par le Parlement grec est «une avancée cruciale» vers l'octroi de prêts de 130 milliards d'euros et l'effacement d'une partie de la dette du pays.

«Nous saluons expressément» ce vote qui «démontre la bonne volonté de la Grèce à entreprendre des réformes difficiles», a réagi de son côté le porte-parole de la chancelière allemande Angela Merkel.

M. Rehn s'est dit «confiant dans le fait que les autres conditions» imposées à Athènes par la zone euro en échange de l'aide seraient «réunies d'ici l'Eurogroupe de mercredi».

L'Union monétaire avait posé jeudi soir trois conditions et donné à Athènes six jours pour les réunir, en échange de l'aide dont la Grèce a un besoin vital pour éviter le défaut de paiement incontrôlé en mars, à l'échéance de créances de 14,5 milliards d'euros.

L'approbation du plan d'austérité par le Parlement grec était l'une de ces conditions, il en reste donc deux à remplir pour Athènes d'ici à la réunion des ministres des Finances de la zone euro mercredi à Bruxelles: trouver 325 millions d'euros d'économies supplémentaires dans le budget 2012 et apporter l'engagement écrit des responsables politiques soutenant la coalition au pouvoir sur leur soutien au plan de rigueur.

Les Européens, méfiants vis-à-vis de la classe politique du pays, veulent en effet s'assurer que les promesses ne voleront pas en éclats après les élections anticipées dont le gouvernement grec a annoncé lundi qu'elles se tiendraient en avril.

Selon une source européenne, ces deux derniers obstacles devraient être franchis d'ici à mercredi. Concernant les 325 millions, «il semble que le gouvernement grec va trouver ces économies en réduisant son budget de la Défense, ce qui n'est pas une mauvaise chose», a-t-elle dit. Le budget grec de la Défense est en proportion de la richesse nationale le plus important de l'UE, du fait des tensions avec la Turquie voisine.

La source européenne s'est aussi dite «optimiste» concernant l'engagement écrit des deux grands partis, les socialistes de Georges Papandréou et les conservateurs d'Antonis Samaras, après que le parti d'extrême droite Laos s'est exclu de lui-même en quittant le gouvernement de coalition.

Les marchés ont réagi positivement lundi au vote du Parlement grec. Les Bourses de Hong Kong et de Tokyo ont terminé en hausse, respectivement de 0,50% et 0,58%, et l'euro est remonté face au dollar. Vers 7h00, le Dax de Francfort progressait de 0,79%, la Bourse de Paris de 0,62% et elle de Londres de 0,60%.

Ce soulagement des marchés contraste avec la violence des manifestations qui ont accueilli en Grèce le vote d'un plan comprenant des mesures particulièrement douloureuses pour la population, avec notamment une baisse de 22% du salaire minimum.

À Athènes, les manifestations, qui ont rassemblé 80 000 personnes dimanche selon la police, ont donné lieu à des incidents qui ont fait plusieurs dizaines de blessés, et de nombreux bâtiments du centre d'Athènes ont été incendiés ou vandalisés, laissant un spectacle de chaos dans les rues.

M. Rehn a condamné ces violences «inacceptables», soulignant que leurs auteurs «ne représentent pas la vaste majorité des citoyens grecs».

«La Commission européenne continue de se tenir aux côtés des Grecs», a-t-il insisté, expliquant que le programme d'austérité «est très exigeant, mais permettra de redresser la situation» économique du pays.

La gauche européenne, mais aussi des observateurs extérieurs de renom comme le financier américain George Soros ou le prix Nobel d'économie Paul Krugman ne ménagent pas leurs critiques envers la rigueur imposée à Athènes. Ils jugent qu'un plan de relance eut été plus profitable à l'économie grecque qu'une austérité plongeant les Grecs dans la pauvreté.

Mais pour le porte-parole de Mme Merkel, il ne s'agit pas «d'économiser pour économiser», mais de «libérer les forces productives» grecques. «Personne n'a d'argent pour un plan de relance budgétaire, et l'aide au pays se compte déjà en milliards d'euros», a souligné pour sa part un responsable de haut rang au sein de la Commission européenne,

L'aide de 130 milliards d'euros qu'attend Athènes de ses créanciers publics s'ajouterait à un précédent programme de 110 milliards d'euros. Les prêts iront de pair avec l'effacement de 100 milliards d'euros de dette grecque par ses créanciers privés (banques, fonds d'investissement et assurances), un montant inédit jusqu'ici: la dette de l'Argentine atteignait 82 milliards de dollars lorsqu'elle a fait défaut en janvier 2002.