Échaudée par plus de deux ans de crise, l'Europe a largement perdu confiance dans la capacité d'Athènes à appliquer les réformes promises et multiplie les verrous en échange de son aide, certains n'hésitant plus à évoquer une sortie du pays de la zone euro.

«Nous ne pouvons pas vivre dans un système où des promesses sont faites et répétées, répétées, mais où les mesures pour les mettre en oeuvre sont trop faibles», a martelé le président de l'Eurogroupe, Jean-Claude Juncker, à l'issue d'une réunion des ministres des Finances de la zone euro jeudi soir.

Athènes risque le défaut de paiement dès le 20 mars, date où arrivent à échéance 14,5 milliards d'obligations.

Pour le gouvernement compte d'une part sur l'effacement de 100 milliards d'euros de dette grecque par ses créanciers privés, qui semble en bonne voie, et d'autre part sur un deuxième programme de prêts de 130 milliards d'euros de ses créanciers publics (UE et Fonds monétaire international). Mais ce programme ne sera débloqué que si la Grèce applique un plan de rigueur drastique.

En arrivant à Bruxelles jeudi après avoir obtenu de haute lutte l'accord des partis politiques à un nouveau plan d'austérité, le ministre grec des Finances, Evangélos Vénizélos, espérait décrocher enfin le feu vert tant attendu au déblocage de cette aide.

Mais ses collègues ont fermement demandé à Athènes de revoir encore sa copie et de revenir le 15 février avec des éléments plus tangibles sur la table. M. Juncker a fait état «d'échanges vifs» à ce sujet.

«La Grèce a encore du travail à faire», a souligné à la fin de la rencontre le ministre néerlandais Jan Kees De Jager, ajoutant que «beaucoup de mesures doivent être clarifiées ou adoptées».

Le gouvernement grec va devoir trouver en six jours 325 millions d'euros d'économies nouvelles, mais surtout, les Européens demandent des gages politiques. Le parlement grec doit approuver le plan de rigueur dimanche, et les partis de la coalition au pouvoir à Athènes devront apporter des garanties par écrit sur leur soutien à ce plan.

«Le second programme d'aide ne doit pas être soumis aux incertitudes politiques» liées à la campagne en vue des élections prévues au printemps en Grèce, a estimé vendredi le porte-parole de la Commission pour les questions économiques, Amadeu Altafaj, alors que le parti d'extrême droite Laos a d'ores et déjà averti qu'il ne voterait pas le plan d'austérité.

Du coup, le contrôle des Européen sur le gouvernement grec ne cesse de se renforcer et les demandes de garanties augmentent. «Ce n'est pas que la méfiance règne, mais bon...», soupire un diplomate européen.

Des équipes d'experts de la Commission, de plusieurs pays de l'UE et du FMI sont en Grèce de manière quasi-permanente pour aider à mettre en oeuvre ces réformes, par exemple en matière de collecte des impôts. Elles vont être encore renforcées pour améliorer les «mécanismes de surveillance», a annoncé M. Rehn jeudi.

Il est aussi question de créer un compte bloqué spécial qui recueillera une parité des prêts à la Grèce. Objectif: s'assurer du remboursement des intérêts la dette grecque.

Au delà, le débat sur une sortie de la zone euro ressurgit. «Il n'y aurait pas mort d'homme» si ce devait être le cas, a lâché cette semaine une vice-présidente de la Commission, la Néerlandaise Neelie Kroes. Un avis partagé par le Premier ministre des Pays-Bas, Mark Rutte.

«Les atermoiements du gouvernement grec ont rompu la confiance politique avec le reste de ses créanciers», résume Bruno Cavalier, chef économiste d'Oddo Securities, vendredi dans le quotidien Les Echos.

«On peut donc se poser la question de savoir si on n'est pas arrivé à un point où, pour la Grèce comme pour l'Europe, il ne serait pas préférable d'envisager une autre solution que de la maintenir à l'intérieur d'une organisation monétaire dont elle ne respecte pas les règles élémentaires».