La Banque centrale européenne (BCE) a décidé jeudi sans surprise de laisser son principal taux directeur inchangé à 1%, dans l'attente de nouveaux pronostics de croissance et d'inflation pour la zone euro en mars.

Pour le moment, après une fin d'année 2011 catastrophique pour la région, le tableau est relativement optimiste.

Le président de la BCE Mario Draghi, après avoir début janvier constaté «des signes hésitants d'une stabilisation de l'activité à de bas niveaux», a fait état il y a une quinze jours de «progrès spectaculaires».

Pour Christian Schulz, cela laisse présager «d'un retour à la croissance pour l'Allemagne et les autres pays 'coeur' au deuxième trimestre 2012 et pour la zone euro dans son ensemble au troisième trimestre, à condition que l'Europe garde sa crise sous contrôle».

Mais, selon lui, la BCE sera contrainte de réviser à la baisse en mars sa prévision de croissance pour 2012 (de 0,3% actuellement) et de baisser son taux directeur de 0,25 point.

Après l'annonce du maintien du taux directeur à son plus bas niveau historique, les analystes attendaient la conférence de presse mensuelle de M. Draghi à partir de 13h30 GMT (8h30 à Montréal) et notamment ses déclarations sur la Grèce.

Ils n'attendent aucune mesure nouvelle en faveur des banques, largement alimentées en liquidités en décembre avec un prêt inédit sur trois ans (489 milliards d'euros accordés). Une seconde opération sur trois ans, à montant toujours illimité, est prévue le 29 février.

Cette mesure a été saluée comme ayant contribué à réduire les tensions sur le marché interbancaire et sur le marché de la dette publique en zone euro, une partie de l'argent distribué ayant visiblement servi aux banques à acheter des obligations souveraines. Certains analystes s'attendent à une demande encore plus forte fin février.

M. Schulz attend au contraire un montant en baisse, et ce sera pour lui «un signe positif car cela confirmerait la normalisation du système financier». Jonathan Loynes, de Capital Economics, se garde pourtant de tout optimisme et attend de voir les effets sur l'économie réelle de la mesure, à savoir si les banques seront plus disposées à prêter aux ménages et entreprises.

Le dernier sondage de la BCE auprès des banques montre que les conditions du crédit se sont encore resserrées au quatrième trimestre 2011 en zone euro -à l'exception de l'Allemagne- et vont continuer à l'être ce trimestre.

Ce sont donc les propos de M. Draghi sur la Grèce qui vont susciter le plus d'attention.

Alors que les pertes de 100 milliards d'euros consenties par les banques et fonds d'investissement créanciers d'Athènes sont jugées, notamment par le FMI, insuffisantes pour permettre au pays de s'en sortir, la BCE, qui détiendrait 45 milliards d'euros d'obligations publiques grecques, est sous pression pour renoncer à une partie de ses créances. Une éventualité à laquelle elle se refuse jusqu'ici.

Selon les scénarios évoqués ici et là, la BCE pourrait transférer au fonds de secours européen (FESF) ses obligations grecques à leur valeur d'achat, acquises en moyenne à 75% de leur valeur, ce qui signifierait une ristourne de 11 à 12 milliards d'euros. Elle pourrait aussi accepter une décote sur ces obligations, comme les banques.

Depuis le printemps 2010 la BCE achète, de mauvaise grâce, de la dette sur le marché secondaire pour soutenir Athènes et les autres capitales à la peine.

Si elle est contrainte d'accepter des pertes sur ces titres, «cela signifierait que le programme (de rachats d'obligations) est contre-productif», juge un banquier central, laissant entendre que la BCE pourrait alors se montrer plus réticente encore à le poursuivre.

Depuis le début de l'année, elle a déjà significativement baissé ses achats.