Le premier ministre grec devait mettre la dernière main mardi soir à la version finale du nouveau memorandum prévoyant les réformes à mener en Grèce, qui a été négocié toute la journée et sera finalement proposé mercredi à l'assentiment des chefs des partis de la coalition gouvernementale.

Au soir d'une journée de grève générale contre l'austérité, le premier ministre Lucas Papademos a décidé de reporter à mercredi -«probablement à la mi-journée» selon son cabinet - une rencontre avec le socialiste Georges Papandréou, le conservateur Antonis Samaras et le leader d'extrême-droite Georges Karatzaféris.

L'aval des trois responsables politiques est explicitement demandé par les créanciers publics et privés du pays pour débloquer un 2e plan d'aide vital pour le pays, prévoyant à la fois renflouement financier et désendettement, et préparé depuis la fin octobre par la zone euro.

Ce nouveau report, alors que la réunion de M. Papademos avec le trio politique était au départ prévue lundi, «n'est pas un signe de blocage, rien de dramatique n'est survenu, simplement une série de points très techniques à boucler qui a pris plus de temps que prévu», a ajouté la source au cabinet du premier ministre.

M. Papademos a ainsi entamé une réunion tard dans la soirée avec les représentants de la «troïka» de créanciers publics (Commission européenne, Banque centrale européenne et Fonds monétaire international) pour finaliser le nouveau train de mesures de rigueur et de déréglementation.

Plus tôt dans la soirée, M. Papademos, nommé premier ministre d'un gouvernement de coalition en novembre, a rencontré les principaux dirigeants du lobby bancaire mondial IIF, Charles Dallara et Joseph Ackermann, pour boucler les derniers points en suspens du vaste plan d'effacement de dette de la Grèce, a indiqué la même source.

Cette frénésie de réunions conclut une journée de grève générale contre le nouveau train de mesures réclamé par l'UE et le FMI en échange de leur soutien.

Plus de 20 000 personnes ont manifesté à Athènes et Salonique pour protester contre la nouvelle cure d'austérité en préparation, prévoyant notamment une réduction du salaire minimum, des coupes dans les retraites complémentaires et 15 000 suppressions d'emplois dans la Fonction publique.

«La situation a atteint ses limites. Soit c'est eux qui sautent, soit c'est nous» disait dans le cortège, Yorgos, plombier à Athènes. Tandis que Costas, employé de banque, se lamentait de voir le pays «qui s'enfonce» alors qu'il est «gouverné par des voyous».

«Non aux licenciements dans la fonction publique», «Non à la baisse du salaire minimum» et «Non aux réduction des retraites complémentaires»: les bannières résumaient les nouveaux sacrifices se profilant, après déjà trois trains de mesures de rigueur en contrepartie des premiers prêts UE-FMI de mai 2010.

«On est là parce qu'on sera dans les premiers de la prochaine fournée de 15 000 à être licenciés», a expliqué Vassilis Bakalis, 34 ans, conservateur au musée Byzantin d'Athènes. Les administrations, services et transports publics ont été affectés par la grève.

Peu impressionnés par les mouvements de protestation, les créanciers du pays, dont la patience s'épuise face aux retards grecs à mettre en oeuvre les réformes, réclament un engagement explicite des trois partis gouvernementaux sur cette nouvelle purge pour débloquer les 130 milliards de prêts promis fin octobre, et donner leur feu vert au lancement de la restructuration de la dette grecque détenue par les créanciers privés.

Avec MM. Ackerman et Dallara, M. Papademos devait passer en revue les derniers points laissés en suspens pour cette opération, après la quasi-finalisation d'un accord fin janvier. Cet effacement de 100 milliards de créances détenus par banques et fonds, au prix pour eux de pertes réelles d'environ 70%, devrait ramener la dette grecque autour de 120% du PIB en 2020.

Devant les tergiversations des leaders politiques, certaines voix au sein des pays créanciers et partenaires de la Grèce ont accru la pression: la commissaire européenne chargée des Nouvelles Technologies, la Néerlandaise Neelie Kroes, a estimé qu'il n'y aurait «pas mort d'homme» si la Grèce sortait de la zone euro.

Le couple Merkel-Sarkozy a, lui, suggéré la création d'un compte bloqué pour garantir que les prêts à la Grèce iraient au service de la dette, une proposition soutenue par le chef de file des ministres des Finances de la zone euro, Jean-Claude Juncker.

Du coup, le président de la Commission européenne a dû monter au créneau mardi pour affirmer que la place de la Grèce restait dans la zone euro.

«Nous voulons que la Grèce reste dans l'euro», a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse où il est apparu au côté du Français Jacques Delors, qui fut président de la Commission européenne de 1985 à 1994.

M. Barroso a souligné que «les coûts d'une sortie de la Grèce de l'euro seraient plus élevés que les coûts pour continuer à soutenir la Grèce».

Malgré l'agitation sociale et la nervosité des marchés, la Grèce a réussi mardi à lever 812,5 millions d'euros en bons du Trésor à six mois, à un taux d'intérêt en très légère baisse (4,86%) par rapport à la dernière émission du même type.

Si l'accord des partis tant attendu intervient mercredi, le contreseing politique grec serait formalisé en conseil des ministres mercredi ou jeudi, puis présenté dans la foulée à l'Eurogroupe.