Les avocats des dirigeants du fabricant de jouets Mega Brands (T.MB) accusés de délits d'initiés par l'Autorité des marchés financiers (AMF) ont tenté de discréditer des éléments de l'enquête, hier, au cours de la première journée audience réglementaire. L'AMF réclame 6,5 millions de dollars en amendes aux dirigeants.

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Entre autres, ces avocats ont questionné sur un ton critique le principal enquêteur de l'AMF et premier témoin à la barre, Fréderic Marchand, sur l'origine des soupçons de délits d'initiés envers les quatre dirigeants de Mega Brands, dont des membres de la famille fondatrice, les frères Marc et Vic Bertrand.

Un rappel: les transactions d'actions qui leur sont reprochées remontent à la mi-décembre 2005, dans les trois jours après qu'ils eurent appris la mort d'un bambin américain des suites de l'ingestion de petits aimants provenant d'un jouet d'une filiale de Mega Brands, Rose Art, acquise quelques mois plus tôt.

Mais hier, devant le Bureau de décision et de révision qui est le tribunal administratif du Québec en matière boursière et financière, les avocats des dirigeants de Mega Brands ont critiqué l'enquêteur de l'AMF pour avoir fondé ses soupçons sur les commentaires faits beaucoup plus tard par des dirigeants de Rose Art, alors qu'ils étaient en litige juridique avec Mega Brands concernant le prix final d'acquisition.

Contre-interrogatoire

Aussi, au cours de leur contre-interrogatoire de l'enquêteur de l'AMF, les avocats des dirigeants de Mega Brands ont suggéré qu'il n'aurait pas consulté des «experts» de l'industrie du jouet pour déterminer les dommages potentiels à l'entreprise, au moment des premières informations sur la mort du bambin américain en décembre 2005.

Selon Raynald Langlois, avocat principal des dirigeants de Mega Brands, une telle évaluation externe aurait été importante pour étayer les motifs présumés de ses clients lors de leurs transactions de milliers d'actions à la mi-décembre 2005.

Car à ce moment-là, selon l'avocat, les informations sur les circonstances de la mort du bambin auraient été trop incomplètes pour que les dirigeants de Mega Brands puissent évaluer son «impact matériel» sur l'entreprise et en fassent une déclaration publique, comme l'exige la réglementation boursière.

Par conséquent, il serait «erroné» de la part de l'AMF de les accuser de délits d'initiés parce qu'ils ont exercé une partie de leurs options d'achats d'actions dans les jours suivants.

Selon l'AMF, les quatre dirigeants de Mega Brands ont alors obtenu au moins 245 000 actions à très bas prix avant de les revendre rapidement en Bourse de deux à sept fois leur coût d'obtention.

Ces transactions se sont avérées ensuite très opportunes pour les quatre dirigeants de Mega Brands, parce qu'au cours des mois et des deux années suivantes, la valeur boursière de la société a été très touchée par les conséquences d'affaires de cet incident mortel lié à un jouet de sa nouvelle filiale.

Avec ces accusations de délits d'initiés, l'AMF réclame aux dirigeants de Mega Brands des amendes et des restitutions de gains présumés illégaux qui pourraient atteindre 6,5 millions.

C'est la plus importante réclamation pour délits d'initiés jamais inscrite à ce jour par les régulateurs boursiers au Québec.

Sans fondement

Mais pour les avocats des accusés, ces accusations de délits d'initiés pour les transactions d'actions survenues à la mi-décembre 2005 seraient sans fondement. Elles auraient néanmoins causé des «préjudices énormes» pour les dirigeants de Mega Brands, leur valant aussi une «perception publique d'avoir trahi les investisseurs».

L'audience réglementaire doit se poursuivre plusieurs jours devant un groupe de trois membres du Bureau de décision et révision, qui est dirigé par Alain Gélinas.

À la Bourse de Toronto, hier, l'action de Mega Brands a connu une baisse de 0,9%, à 8,20$, à contre-courant d'un gain de 1% de l'indice de marché S&P/TSX et d'un léger gain de l'indice sectoriel de la consommation discrétionnaire.

Autour de 8$, l'action de Mega Brands cote presque à la moitié de sa valeur d'il y a un an.